Le Théâtre régional Azzeddine-Medjoubi d'Annaba abritera la première édition du Festival national de la production théâtrale féminine. Le coup d'envoi de la 1re édition du festival national culturel de la production théâtrale féminine sera dédié à la regrettée comédienne Keltoum. Placé sous le slogan «Nouveau théâtre, nouvelles perspectives», ce premier festival a la prétention de rendre un vibrant hommage à toutes ces femmes qui ont emprunté la voie des planches pour exprimer tout leur talent. La directrice du TRA, Mme Sakina Mekkiou, plus connue sous son nom d'artiste Sonia, a indiqué que cette manifestation constitue une «opportunité pour faire connaître et évaluer le parcours professionnel des femmes qui ont choisi d'investir le quatrième art et d'en faire un facteur d'expression du talent et du savoir-faire». Cette manifestation culturelle permettra de rendre hommage à une femme symbole, en l'occurrence la défunte Aïcha Adjouri, connue sous son nom d'artiste Keltoum. Cette première édition regroupera une douzaine de représentations théâtrales. La comédienne Sonia a, toutefois, indiqué que la manifestation verra la participation de troupes d'Alger, Annaba, Skikda, Batna et de Sidi Bel-Abbès, auxquelles se joindront des formations tunisienne et soudanaise. De même que des conférences seront consacrées à la place de la femme dans le théâtre algérien, ainsi que des ateliers artistiques autour de l'interprétation et de la mise en scène. La regrettée Keltoum sera donc à l'honneur avec une exposition de ses photos, de ses costumes et accessoires. Le public pourra également découvrir une exposition intitulée «Traces». Cette dernière mettra l'accent sur ces femmes qui ont laissé une empreinte indélébile dans le théâtre algérien. Dans le registre des représentations théâtrales, citons le passage, le deuxième jour du festival, de la pièce Essaouad fi al amal de l'association culturelle Errimah d'Alger. Pour la soirée du 27, à l'affiche la pièce Souk erdjel réalisée par Souad Sebki de l'association M'Hamed El Yazid d'Alger. Les organisateurs de cette manifestation ont voulu que cette première édition de la production théâtrale féminine soit l'occasion idoine pour faire bénéficier le large public ainsi que les étudiants de la cité universitaire de Chaïba à Annaba, et ce, à travers une petite tournée. Pour rappel, la regrettée Keltoum a brillé aussi bien au théâtre qu'au cinéma. Dès son très jeune âge, elle avait été attirée par la danse et le théâtre. A plusieurs reprises, étant enfant, elle s'était sauvée de chez ses parents pour aller voir et suivre des acteurs et danseurs ambulants. C'est Mahieddine Bachtarzi qui la découvrit à Blida, en 1935, et lui offrit sa chance et, en dépit des préjugés de sa famille, Keltoum ne la laissa point échapper. Une grande tournée en France et en Belgique ne tarda pas à prouver tant au directeur de la troupe qu'à l'artiste qu'ils ne s'étaient pas trompés. Anvers, Liège, Bruxelles, Paris, Lyon, Marseille l'applaudirent. A Nice, elle dansa, un soir, devant 20.000 personnes au jardin Albert 1er. C'est au cours d'une tournée au Maroc qu'elle affirmera son talent de comédienne. Elle devait ensuite créer de nombreuses pièces, soit aux côtés de Bachtarzi, soit avec Rachid Ksentini ou Habib Réda. L'aventure de la première saison arabe de l'Opéra d'Alger eut lieu en 1947. Depuis, c'est à Keltoum que furent confiés les principaux rôles féminins, qu'il s'agisse de comédie ou de tragédie. La radiodiffusion en langue arabe la compta parmi ses pensionnaires les plus écoutés. Le cinéma ne pouvait manquer de l'attirer. Elle y fit ses débuts dans La Septième porte Svoboda. C'est au moment où elle s'apprêtait à signer de nouveaux contrats qu'un incident vint interrompre, le 30 mai 1951, sa carrière, mais pas pour longtemps. En 1952, elle reprit le rôle de Desdémone dans Othello, la fameuse pièce de Shakespeare, traduite en arabe par Ahmed Toufik EI-Madani. En 1956, elle arrêta ses activités artistiques et ne reprit qu'en 1963 avec le TNA jusqu'à sa retraite. Son vrai premier rôle, elle le joua dans la pièce de Bachtarzi, Mariage par téléphone, en compagnie de Rachid Ksentini. Elle joua tout à fait par hasard dans un film allemand en 1945, mais sa carrière cinématographique ne commencera que vingt ans plus tard, en 1966 avec Le vent des Aurès de Mohammed Lakhdar-Hamina dans lequel elle tient magistralement le rôle d'une mère qui cherche désespérément son fils raflé par l'armée française pendant la guerre. Elle joua dans plus de soixante-dix pièces de théâtre et dans au moins une vingtaine de films, enregistra cinq disques avant 1962 (Ya ouled el ourbane, Ahd Thnine, etc.). Elle arrêta de chanter après la naissance de son enfant en 1954. Depuis 1981, elle n'avait pas eu la possibilité de camper un rôle et quand, en 1987, Fawzia Aït El-Hadj l'appela pour jouer dans Mort d'un commis voyageur, huit jours avant la «générale» de la pièce, on lui signifia sa mise à la retraite. Elle fut choquée par cette décision, elle qui croyait encore être en pleine possession de ressources et rappelait à juste titre qu'elle n'avait vécu avec sa famille que pendant treize ans, alors qu'elle avait passé cinquante ans dans le théâtre. Elle fit une dernière apparition aux côtés de Rouiched dans El Bouwaboune (1991).