C'est par l'ordonnance royale du 22 juillet 1834 que l'Algérie est devenue (art. 1 de cette ordonnance) «possession française», ce qui eut pour conséquence de soumettre le territoire annexé à la législation du territoire annexant. Le caractère de cette annexion a été précisé et modifié par de nombreuses lois organiques dont les plus importantes sont : a) le décret du 4 mars 1848 qui déclare l'Algérie «partie intégrante du territoire français» b) le sénatus-consulte du 13 juillet 1865 qui, dans son article premier, stipule : « l'indigène musulman est français» c) le décret du 28 août 1884 dit «décret de rattachement de l'Algérie au territoire français» La réaction algérienne a été la continuation du combat entamé en 1830 Le parti de l'émir Khaled, l'Etoile nord-africaine, créée en 1925, sera dissoute en 1937. Son chef étant Messali El Hadj, grand artisan de la lutte anticolonialiste. Le PPA. fut dissous le 26 septembre 1939. Messali et ses compagnons furent condamnés à de lourdes peines par les tribunaux du gouvernement de Vichy en 1941. d- l'ordonnance du 7 mars 1944 qui déclare les Algériens «citoyens français» et scinde la communauté algérienne en deux catégories de citoyens : Le 8 mai 1945, jour de l'armistice, alors que le monde entier fêtait la victoire sur l'hitlérisme, le peuple algérien entendait exprimer son espoir de voir ses sacrifices pris en considération et aboutir à la réalisation de ses aspirations nationales. Hélas ! des troupes françaises chargées de maintenir «l'ordre et la stabilité» se joignirent à la milice et provoquèrent une hécatombe de 45 000 victimes. Les héros du 7e régiment de Tirailleurs algériens, revenus couverts de gloire des campagnes d'Afrique et d'Europe, trouvèrent à leur retour leurs maisons détruites, leurs terrains saccagés, leurs femmes violées et leurs parents fusillés. e) la loi du 20 septembre 1947 portant statut organique de l'Algérie, selon laquelle (article l-) «l'Algérie constitue un groupe de départements. La politique coloniale dont le but est de saper les fondements de la société maghrébine et diviser la population soutenait que l'Afrique du Nord est berbère, que les Arabes sont des envahisseurs, des colonisateurs venus en Afrique du Nord au même titre que les Romains, les Vandales, les Byzantins, les Turcs et, plus tard, les Français. Elle déniait au Maghreb son arabité (El-Ourouba) . Elle finit par influencer une partie de l'élite algérienne francophone dont le Parti communiste algérien (PCA) qui avait fait sienne cette formule qui s'insérait dans sa conception de la «Nation algérienne en formation». L'apparition du berbérisme dans le PPA-MTLD remonte aux années 1946-1947 Les berbéristes revendiquaient l'identité berbère tout en rejetant l'apport arabe et islamique. Ils étaient influencés non seulement par les idéologues de la colonisation, mais par l'idéologie communiste. Les communistes, rappelons-le, étaient contre le concept d'une «nation algérienne» déjà formée avec ses constantes arabe et musulmane, ils défendaient le principe de la «nation algérienne en formation» à partir de la coexistence sur le même territoire des différentes communautés arabe, berbère, turque, juive, italienne, maltaise, espagnole et française, rejetant ainsi le fondement arabo-islamique de la société algérienne. Les berbéristes étaient séduits par le marxisme ainsi que par la Constitution de l'Union soviétique qui vantait le système de ses Républiques «musulmanes» : l'Azerbaïdjan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan, etc., où chaque peuple, affirmait-elle, chaque ethnie, jouit de sa propre langue, de sa propre culture et bénéficie de «l'autonomie» de gestion dans ses affaires. C'était là un argument qu'on rencontrait souvent chez les convertis au berbérisme. Imaginer l'Algérie disséquée en autant de races de cultures et de langues. Il y a lieu de faire la distinction entre berbériste et kabyle, si on examine le moteur et la composition humaine du mouvement et leur origine. On a affaire plutôt à un particularisme kabyle qui se limite à une région déterminée ( la Kabylie) qu'à un mouvement berbère englobant l'ensemble du territoire. Cette situation ayant été favorisée par les missions chrétiennes des «pères blancs» qui exploitaient leur misère matérielle et entreprenaient des essais systématiques d'évangélisation : recueil d'orphelins, distribution de secours en nature (semoule, figues, huile, denrées diverses), fondation d'écoles religieuses. Les résultats n'ont pas été à la mesure des efforts déployés si l'on en juge par les rares kabyles christianisés. De plus, la Kabylie était supposée plus apte à recevoir les bienfaits de la civilisation européenne. La scolarisation y était plus poussée que dans d'autres régions du pays, et cela afin d'y dégager une élite francophone. Insidieusement, on prêtait même volontiers une ascendance romaine, voire aryenne aux Kabyles, histoire de signifier qu'ils étaient beaucoup plus «proches» des Français, en tout cas plus «assimilables», parce que, prétendait-on, moins marqués par l'empreinte de l'islam que le reste de la population. Il y était question notamment d'un certain «parti populaire kabyle» (PPK) qui se structurait à l'intérieur même du PPA-MTLD. L'enquête menée révèle les animateurs de ce travail de division : Ouali Bennai, Omar Oussedik, Amar Ould Hammouda (Aïn El hamam), Sadek Hadjerès. Il est à noter que Amar Ould Hamouda, Omar Oussedik, Ouali Bennaï, Ait Medri, Saïd Oubouzar, Saïd Salhi étaient candidats d'Azazga aux élections d'avril 1948. Cela dénote le caractère régionaliste de l'entreprise. Krim Belkacem est alors investi de la responsabilité de l'Organisation en Grande Kabylie et Ouamrane de la Basse Kabylie. La plupart des exclus rejoindront le Parti communiste algérien dont Sadek Hadjerès qui en deviendra l'un des chefs. Après l'indépendance, Hadjerès sera le secrétaire général du PAGS (Parti d'avant-garde socialiste), nouvelle dénomination du PCA. L'attitude de Hocine Aït Ahmed qui a milité très jeune au PPA et qui a été parmi ceux qui ont répandu en Kabylie l'idée d'indépendance et la notion d'organisation, deux principes chers au Parti, dans les années difficiles de 1945 et 1946. Il n'a pas hésité à sacrifier ses études afin de se lancer dans la lutte et vivre la vie dangereuse de maquisard. Mais dans son comportement comme dans les idées qu'il professe, il a tendance à exalter sa Kabylie natale au détriment de la patrie algérienne. (A suivre)