Elle a succombé jeudi à une crise cardiaque survenue à son domicile au Caire. Warda dont la dépouille a été rapatriée hier sera enterrée aujourd'hui au cimetière d'El-Alia. Warda dont la voix chaude et les mélodies langoureuses ont bercé les cœurs amoureux sur plusieurs générations a tiré sa révérence laissant derrière elle un riche répertoire. Warda Ftouki de son vrai nom a vu le jour le 22 juillet 1940 à Puteaux dans les Hauts-de-Seine, d'un père algérien (Mohammed Ftouki) originaire de Souk-Ahras et d'une mère libanaise. Dotée d'une voix prodigieuse, elle commence à chanter en 1951 au Tam-Tam, un établissement du Quartier latin de Paris appartenant à son père, alors qu'elle a tout juste onze ans. Au lendemain du déclenchement de la guerre du 1er Novembre, sous la tutelle de son père, de son frère Messaoud et de sa sœur Nadia, l'adolescente se fait connaître pour ses chansons patriotiques, en donnant des concerts à travers plusieurs pays arabes. Les recettes sont reversées au FLN. Affichant un militantisme sans faille, elle finit par être chassée en 1958 du sol français. Elle trouve refuge à Rabat puis à Beyrouth. Après l'indépendance du pays, elle revient sur sa terre natale et se marie la même année. Son époux lui interdit alors de chanter. Dix ans plus tard, le président Houari Boumediene, lui demande de chanter pour commémorer l'indépendance de l'Algérie, ce qu'elle fait accompagnée d'un orchestre égyptien. Son mari demande suite à cela le divorce. Elle se décide, dès lors, à ne se consacrer qu'à la musique. Warda part s'installer en Egypte, le pays du tarab, d'Oum Keltoum et de Abdelhalim Hafez. Elle y fait la rencontre du célèbre compositeur Baligh Hamdi qui devient son second époux. Dans ce pays d'adoption qui lui ouvre grands les bras, elle connaît un immense succès. Warda collabore avec les plus grands compositeurs arabes, à l'image de Mohammed Abdel Wahab, Ryadh Soumbati, Hilmi Bakr et Sayed Mekawi. Son succès ne s'arrête pas qu'à la chanson, puisqu'elle campe aussi quelques grands rôles dans des films égyptiens. Le répertoire de Warda est aussi riche que varié mais ses titres ne sont pas toujours bien accueillis par les autorités. Aussi, suite à la sortie de El-Ghala Yenzad, une chanson qui fait l'éloge de la famille du Prophète et particulièrement du leader libyen Mouammar Kadhafi, elle est interdite de séjour en Egypte durant trois années. Des tensions apparaissaient entre l'Egypte et la Libye à chaque fois que la radio et la télévision libyennes diffusaient la chanson. Ce qui exaspérait le président Sadate. Elle finit par être interdite de galas et de télévision en Egypte. C'est Jihane Sadate qui interviendra auprès de son époux, à la demande de la chanteuse pour qu'il accepte de lever l'interdiction. Elle a vendu plus de 100 millions d'albums à travers le monde pour un répertoire comprenant plus de 300 chansons. Ses chansons les plus connues sont El-Ouyoun essoud, Khalik hena, Dendana, Fi Youm ou leila, Lola el malama, Batwannes bik, Harramt ahibbak, Essaidoune, Wahashtouni, Talata ikhoua, Laabat el ayam, Kelmat itab, Andah alik et Awqati btehlaw. Après une éclipse de plusieurs années, Warda effectue un retour tonitruant à la fin des années 1990 avec Nagham el hawa, le titre d'un album de compilation qui mêle orchestration classique et arrangements modernes. Les fans sont au rendez-vous et saluent ce retour tant attendu. Warda qui a souffert de graves problèmes de santé a toujours su surmonter les difficultés pour revenir encore plus forte sur le devant de la scène pour retrouver son public. Warda que l'on entendait, ces derniers jours régulièrement, dans un spot publicitaire, entonner Mazal Waqfin sur les ondes radio et à la télévision algérienne, n'avait rien perdu de la beauté, ni de la force de sa voix malgré ses 72 ans. Sa mort est une perte pour la chanson arabe mais surtout pour l'Algérie dont elle fut une superbe ambassadrice. Puisse-t-elle reposer en paix.