Bouzid Ahmed Lakhdar, ce fils de chahid qui a exercé 25 années durant au sein de l'administration de l'OPGI de Batna fut un chef de projet de 2007 à 2010. En cette qualité, c'était lui qui approuvait les situations de travaux que présentaient les entrepreneurs contractuels aux services de cet organisme aux fins de paiement. En 2007, Bouzid dénonça avec virulence de nombreux cas de mauvaise qualité du béton d'entrepreneurs profiteurs qui veulaient s'enrichir aussi vite que possible. Mais les supérieurs de ce fonctionnaire courageux n'accordèrent aucune suite à son rapport. Ainsi et à ce jour la continuité du bâclage des constructions aux sites de la nouvelle agglomération Hamla et même à Aïn Yagout et El-Madher se poursuit. Bouzid Ahmed Lakhdar savait que si son rapport avait été pris en considération par le directeur général de l'OPGI, cela aurait conduit inévitablement à une multitude de décisions de démolition des ouvrages frauduleux. Pour cet ancien chef de projet de l'OPGI-Batna, le danger plane sur l'avenir des familles qui habitent déjà ou habiteront les logements édifiés en dehors des normes techniques réglementaires. Hamla court en effet le risque de connaître un jour le même sort que celui survenu à Boumerdès lors du séisme. Il suffirait, d'après Bouzid qu'une secousse sismique de seulement 3 degrés sur l'échelle de Richter pour que cette agglomération appelée pompeusement Nouvelle ville plongerait dans la catastrophe. C'est en fonction d'une telle retombée négative que Bouzid Ahmed Lakhdar a refusé en tant que chef de projet de signer et cautionner des procès-verbaux de réception provisoire de travaux en raison principalement des mauvais résultats d'écrasement (contrôle technique de la consistance du dosage en béton). «Tôt ou tard, nous signale Bouzid, les sites d'habitation de Hamla et même les structures universitaires du pôle de Fesdis ne survivront pas au risque d'affaissement». C'est là une alerte sérieuse que lance cet ex-chef de projet de l'OPGI-Batna et ce, en connaissance de cause. Lorsqu'il a été coincé par un mur de silence donc mis dans l'incapacité d'assurer honnêtement la bonne marche du service dont il détenait la responsabilité, Bouzid Ahmed Lakhdar demanda en 2009 un changement de poste alors qu'il comptait à cette date 21 années de service. Il connaissait la situation des chantiers comme sa poche. Il nous dit en toute franchise que «tous les maillons de la chaîne du BTH et de la promotion immobilière baignent à Batna dans une complicité dangereuse pour l'avenir du pays». Il précise même à titre d'exemple concret le rôle négatif que jouent les bureaux d'études techniques locaux lesquels ne font que présenter aux services de l'OPGI les états d'avancement de travaux, synonymes de factures à payer. D'ailleurs, se rappelle-t-il les rapports des bureaux techniques ne fournissent aucune mention négative à l'encontre des entrepreneurs concernés alors que dans le fond, leur mission consiste à assurer le suivi technique des chantiers de construction c'est-à-dire l'évaluation et le contrôle. L'on sait que les normes réglementaires admettent qu'un béton acceptable doit s'aligner sur la moyenne de 200 barres. Or il y a bien à l'OPGI-Batna des cas inférieurs au seuil de 100 barres, ce qui nécessite obligatoirement des mesures fermes de démolition des ouvrages médiocres. La réalité est qu'il n'y a jamais eu à Batna de décisions de démolition en ce sens que le laxisme est consenti ainsi au profit des entrepreneurs défaillants. Le flagrant délit de corruption à l'OPGI Par ailleurs, le mauvais dosage du béton, lorsqu'il est pratiqué délibérément, révèlerait des détournements de quantités de ciment qui sont revendues au marché noir. De nombreux entrepreneurs se reconvertissent sans honte ni pudeur, souvent, discrètement par personnes interposées, en trafiquants de ciment. L'Etat, ses institutions et ses services, ont toujours laissé faire que ce soit au niveau local ou national. Il est donc encore loin l'Etat de droit et de la justice impartiale. Récemment, un entrepreneur aurait forcé la main à un fonctionnaire de l'OPGI afin de l'amener à faire passer une situation de travaux. S'en est suivie par la suite une mise en scène de flagrant délit de corruption, ce qui a permis évidemment aux services de sécurité d'appréhender le fonctionnaire incriminé de l'OPGI-Batna. Après 21 jours passés en détention, ce fonctionnaire a pu finalement bénéficier d'un non-lieu, ce qui lui a permis à reprendre son poste de travail. Des sources, de l'intérieur des services de l'OPGI, indiquent que ce fonctionnaire aurait aussitôt entamé une opération de vengeance à l'encontre de l'entrepreneur : une opération de contrôle de l'écrasement du béton (qualité de dosage) dans un chantier de l'entrepreneur aurait été ordonnée et menée au pas de charge. Le litige serait actuellement soumis à l'appréciation de la justice et les souscripteurs qui attendent la livraison de leurs logements devront toujours attendre. Mais où va-t-on avec la prolifération de la fraude, de la gabegie et les règlements de comptes qui sapent l'intérêt public et la bonne marche des organismes et institutions publiques ? Echange de services et d'intérêts ou l'adieu à l'administration publique Mécontent de la situation prévalant à l'intérieur de l'OPGI et ne voulant pas cautionner les pratiques peu orthodoxes et sachant éviter l'histoire du pot de terre contre le pot de fer, Bouzid Ahmed Lakhdar finira par claquer la porte en optant pour une sortie en retraite. «Partout à Batna, c'est la fraude à grande échelle qui induit forcément un vaste mouvement de corruption et d'échanges de services et d'intérêts. Malheureusement, les autorités ferment les yeux et ne tiennent pas à réagir concrètement et fermement alors que les lois de l'Etat leur donnent et l'opportunité et la légalité pour défendre les principes de droit et protéger la société donc le citoyen», s'indigne avec amertume Bouzid Ahmed Lakhdar. Après avoir refusé de fermer les yeux sur le bâclage en série des constructions érigées à la nouvelle agglomération de Hamla, il combat à présent pour recouvrer ses droits de départ à la retraite. Son directeur de l'OPGI n'a pas cru devoir exécuter le procès-verbal de conciliation délivré par l'Inspection de travail laquelle reconnaît son droit à la prime de carrière, son solde de tout compte et évidemment un certificat de travail. Il paie ainsi pour avoir refusé de composer avec le système interne de l'OPGI en signant les yeux fermés, des PV de réception provisoire de certaines constructions réalisées en deça des normes techniques réglementaires. En fait, il est parti de son poste sans faire de passation de consignes à son remplaçant. Pour lui, son remplaçant devra se contenter de méditer sur le fameux rapport de dénonciation de la pratique de la «fraude» au profit d'entrepreneurs «véreux». Ce serait sa seule consigne si le remplaçant ne veut pas être utilisé comme complice des mauvaises pratiques. Ali Benbelgacem