Le vice-président syrien Farouk al-Chareh a affiché ouvertement ses divergences avec Bachar al-Assad en se prononçant pour une solution négociée. Il bénéficierait d'un soutien total de l'Iran selon un spécialiste du pays. Pour la première fois, un haut dirigeant syrien a fait état de profondes divergences avec le président Bachar el-Assad, dans un contexte où le chaos s'étend dans le pays. Dans la capitale, des combats ont opposé des partisans du régime et des rebelles pendant que l'aviation bombardait la banlieue est de Damas. Deux Russes ont été enlevés avec leur collègue, un ingénieur italien, a déclaré, mardi, le porte-parole de l'ambassade de Russie en Syrie, Sergueï Markov. Le ministère italien des Affaires étrangères avait fait état lundi de l'enlèvement en Syrie d'un ingénieur italien et de deux collègues d'autres nationalités qui travaillaient dans une aciérie du port de Lattaquié, sans plus de précisions. Dans un entretien accordé à Damas à un quotidien libanais pro-syrien, le vice-président Chareh assure que les désaccords sur la résolution de la crise en Syrie, qui a fait 43 000 morts selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), atteignent le plus haut niveau de l'Etat. Bachar el-Assad «ne cache pas sa volonté d'aboutir militairement jusqu'à la victoire finale» et il croit qu'»après, le dialogue politique sera réellement possible», ajoute-t-il. Le vice-président sunnite se dit quant à lui favorable à une solution de compromis, aucune partie n'étant selon lui en mesure de l'emporter par les seules armes. Evoqué pour remplacer Bachar el-Assad en cas de transition négociée, Farouk al-Chareh a appelé de ses vœux un accord «historique» entre les parties. «Assad détient tous les pouvoirs du pays. Mais il y a des opinions et des points de vues différents dans le commandement syrien. Cependant, ce n'est pas arrivé au point où on peut parler de courants ou de dissensions profondes», a-t-il estimé. C'est la première fois qu'un haut dirigeant syrien fait état de telles divergences au sommet de l'Etat, et dans un pays autocratique comme la Syrie, il ne peut s'exprimer ainsi sans bénéficier d'appuis importants. Agé de 73 ans, Farouk al-Chareh a été pendant 22 ans le chef de la diplomatie syrienne. Selon un expert de la Syrie qui a refusé d'être identifié car il effectue encore des séjours dans le pays, il jouit d'un soutien total de l'Iran, allié de la Syrie. Téhéran a d'ailleurs présenté lundi les détails d'un «plan de sortie» de crise en six points, comprenant «l'arrêt des violences» et un «dialogue national» entre le régime et l'opposition en vue de former un «gouvernement de transition». «Ce gouvernement sera chargé d'organiser des élections libres pour le Parlement, l'Assemblée constituante, et la présidence», selon les médias iraniens. Sur le terrain, les affrontements opposant des rebelles à des combattants palestiniens pro-régime du FPLP-CG ont repris dans le camp de Yarmouk, où vivent 150 000 Palestiniens, selon l'OSDH. Un témoin a évoqué «un grand mouvement de panique ce lundi matin» des habitants de Yarmouk cherchant un endroit sûr, alors que leur camp, situé sur la ligne de confrontation entre les forces du régime et les insurgés, a été la cible dimanche d'un raid aérien, pour la première fois en 21 mois de combats. Signe que les affrontements ont en revanche baissé d'intensité à Alep, le Premier ministre Waël al Halaqi a visité la grande métropole du nord pour la première fois depuis qu'elle est secouée par des combats lancés en juillet, a rapporté la télévision d'Etat syrienne. Selon l'OSDH, la rébellion a lancé lundi une offensive généralisée contre les postes de l'armée régulière dans la province de Hama, au centre de la Syrie, qui jusqu'à présent jouissait d'un calme relatif. «Il s'agit des combats les plus violents dans cette province depuis des mois», a affirmé Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. Sur le front diplomatique, les Etats-Unis ont décidé de considérer comme un «terroriste international» l'ancien ministre libanais prosyrien Michel Samaha, accusé d'avoir préparé des attentats au Liban, en affirmant réagir ainsi aux «tentatives menées par le régime al-Assad pour s'immiscer dans les affaires de ses voisins et déstabiliser davantage la région». Par ailleurs, le ministère autrichien des Affaires étrangères avait demandé lundi à Damas de s'expliquer après l'arrestation d'un Autrichien d'origine syrienne, Jamal Orabi, qui distribuait apparemment de l'aide humanitaire en Syrie.