La directrice générale de l'Unesco, Irina Bokova, a annoncé jeudi que l'organisation onusienne ferait tout son possible pour protéger et reconstruire le patrimoine culturel du Mali. Ce patrimoine est «un élément essentiel de l'identité du pays, de son passé et de son avenir», a-t-elle souligné dans un communiqué, ajoutant que la restauration et la reconstruction de ce patrimoine donnera au peuple du Mali «la force et la confiance pour reconstruire l'unité nationale et regarder vers l'avenir». «A présent que la situation à Tombouctou va se normaliser, nous devons tout mettre en œuvre pour aider le peuple du Mali à écrire une nouvelle page de son histoire, dans un esprit de cohésion nationale», a-t-elle ajouté. «L'escalade récente de nouvelles destructions délibérées du patrimoine au Mali rend cette mission plus urgente encore. L'Unesco ne ménagera aucun effort pour aider à reconstruire les mausolées de Tombouctou et le tombeau des Askia à Gao», a-t-elle dit. L'Unesco va envoyer une mission sur place, dès que la situation le permettra, afin de procéder à une évaluation complète des dommages et déterminer les besoins les plus urgents, dans le but de finaliser un plan d'action, en collaboration avec le Gouvernement du Mali, et mieux orienter les efforts de reconstruction et de réhabilitation. Mme Bokova a également souligné que l'organisation va mobiliser toute son expertise et ses ressources pour aider à protéger et à préserver les manuscrits anciens «qui témoignent du passé glorieux de cette région comme un centre majeur de la culture islamique», appelant tous les partenaires de l'Unesco à se rejoindre dans ce travail. Les trois grandes mosquées de Tombouctou, Djingareyber, Sankoré et Sidi Yahi, ainsi que les 16 mausolées ont été inscrits sur la Liste du patrimoine mondial de l'Unesco en 1988. En 2004, le tombeau des Askia dans la ville de Gao fut à son tour inscrit. Suite à la destruction de 11 des mausolées et des portes de Sidi Yahi, en juillet 2012, par des groupes terroristes, les deux sites ont été inscrits sur la liste de l'Unesco du patrimoine mondial en danger. Durant le conflit, l'Unesco a fourni des cartes topographiques et les coordonnées des sites aux forces armées du Mali, de la France et du Tchad pour aider à prévenir le bombardement de ces monuments. «Dans cette période de tumultes, le plus grand risque réside dans le trafic illicite de biens culturels, et les manuscrits anciens du Mali sont particulièrement vulnérables», a déclaré la Directrice générale, soulignant l'importance de la Convention de l'Unesco de 1970 qui interdit l'importation, l'exportation et le transfert illicites des biens culturels. Dans ce contexte, elle a renouvelé son appel aux responsables des pays voisins du Mali, ainsi qu'à Interpol, l'Organisation mondiale des douanes et tous ceux impliqués dans le marché de l'art, les exhortant à faire preuve de vigilance pour empêcher l'exportation et le trafic illicites de tout objet culturel du pays. «Ces trésors sont précieux et sont extrêmement vulnérables. Nous devons agir rapidement», a-t-elle ajouté. Environ 300 000 manuscrits sont conservés dans des collections privées et publiques à Tombouctou. Beaucoup d'entre eux datent du 13e au 16e siècles, rédigés par les savants de la ville et d'ailleurs, échangés sur les anciens marchés d'Afrique du Nord, d'Al-Andalous et des pays les plus à l'est de la région arabe. Ces manuscrits anciens apportent un témoignage unique d'une civilisation millénaire, sur des sujets comme les études religieuses, les mathématiques, la médecine, l'astronomie, la musique, la littérature, la poésie et l'architecture. L'Unesco a aidé à la mise en place en 1974 du centre de recherche Ahmed Baba, où sont entreposés environ 40 000 des manuscrits. Parmi ceux-ci, environ 10 000 ont été numérisés. «Nous allons travailler avec les collections privées et publiques, dans le but d'assurer la conservation efficace de ce patrimoine documentaire, y compris sa numérisation lorsque cela est possible», a assuré la Directrice générale.