Le gouvernement de Mariano Rajoy a autorisé récemment les Etats-Unis à déployer sur le territoire espagnol une force d'intervention rapide relevant du corps des Marines de l'US Navy, ainsi que huit avions militaires américains, à la base de Moron de la Frontera située dans la province de Séville, en Andalousie. Cette force est composée d'un demi-millier d'éléments des forces spéciales et ce, en vue d'éventuels remous sociaux en Afrique dont l'Afrique du Nord. Les menaces qui pèsent sur les peuples et leurs Etats et les défis collectifs qui leur sont lancés doivent amener les pays du Maghreb à se doter d'une politique extérieure globale des enjeux, des problèmes et des crises que connaît le monde et à déployer ses capacités, ses moyens et son savoir-faire dans une logique de juste et fécond équilibre. Le dialogue et la concertation entre les peuples et entre les acteurs sont la clef et en même temps la meilleure des garanties pour instaurer la paix et la stabilité de manière juste et durable. C'est sur cette base, me semble-t-il, que les pays du Maghreb doivent s'engager dans le dialogue méditerranéen de l'Otan et dans d'autres initiatives régionales ou sous-régionales, notamment européennes. Car, face à l'Otan, existe une volonté politique de l'Union européenne d'avoir une stratégie de défense et de sécurité qui concerne le Maghreb. Sur le plan militaire et géostratégique, c'est à travers les activités du groupe dit des «5+5» que peut être appréciée aujourd'hui la réalité d'une telle évolution. C'est que la lecture que font les Européens des menaces et défis auxquels le monde et notre région sont confrontés repose essentiellement sur la nécessité de développer ensemble une stratégie de riposte collective et efficace concernant notamment le terrorisme international, le trafic des êtres humains et la criminalité organisée à travers la drogue et le blanchissement d'argent. Par ailleurs, selon la commission de Bruxelles et le parlement européen entre l'Europe et le Maghreb, et plus globalement l'Europe et la zone méditerranée, l'Europe et l'Afrique il s'agit de faire bloc, de rapprocher les Européens et leurs voisins immédiats. Pour le cas du Maroc, de la Tunisie et de l'Algérie qui ont signé l'Accord de libre échange avec l'Europe, en matière de défense et de sécurité, des consultations relatives à la mise en place d'un dialogue entre le Maghreb et l'Union européenne ont lieu sous forme de consultation informelles et de réunions formelles. Mais il serait souhaitable des clarifications portant sur deux questions jugées fondamentales : la valeur ajoutée de cette offre de dialogue par rapport au dialogue méditerranéen de l'OTAN et la coopération de lutte contre le terrorisme avec l'UE dans le cadre de la PESD. D'une manière générale et au vu de ce qui se passe au Sahel, il y a urgence pour l'Algérie, dont la diplomatie semble déphasée par rapport aux nouvelles réalités mondiales, et le Maghreb une stratégie d'adaptation. Pour ma part lors d'un déplacement aux USA lors d'une rencontre avec un grand responsable au département du trésor US à Washington, j'avais émis cette hypothèse naïvement que l'Algérie et le Maghreb devaient tirer profit des divergences entre la France et les Etats-Unis d'Amérique. Il m'avait répondu clairement : «il n'y a parfois que des divergences tactiques de court terme mais aucune divergence stratégique entre les Etats-Unis d'Amérique et la France et plus globalement avec l'Europe». J'en ai tiré la leçon afin de comprendre les enjeux géostratégiques et j'ai été étonné que certains veuillent encore opposer les USA à la France sur le dossier du Sahel et notamment du Mali se croyant encore aux années 1960/1970 de la confrontation des blocs, l'Algérie recelant des compétences ayant de brillants diplomates marginalisés et les transnationales uniformisant progressivement les relations économiques internationales. Il ne fallait pas être un grand diplomate et analyste pour savoir en nous en tenant à nos voisins frontaliers que le Niger, le Mali, allaient s'aligner sur la position de la France. Nous ne parlerons pas de la Libye, de la Tunisie, de la Mauritanie et du Maroc qui ne s'opposeront en aucune manière à la vision US/Europe, surtout pour les deux premiers dont les régimes ont une dette envers l'Occident. Cela aurait été une erreur de croire qu'au conseil de sécurité, il y aurait une opposition de la Russie et de la Chine qui ont avalisé d'ailleurs l'intervention militaire française, n'ayant pas d'intérêts stratégiques dans la région, et également pour des raisons internes ne voulant pas être confrontées à des mouvement extrémistes islamistes en Tchétchénie en Russie et des centaines de milliers de musulmans en Chine. Il est entendu qu'à la fin de toute guerre ce sera la diplomatie qui prendra la relève. Pour nous en tenir à l'Algérie, incontestablement la position diplomatique algérienne a subi un sérieux revers qui risque de se répercuter sur son influence déclinante en Afrique, ayant depuis le début du conflit opté pour le dialogue avec les islamistes dits modérés. Mais les puissances occidentales reconnaissent que rien ne peut se faire durablement sans l'Algérie par sa position géographique, comme en témoigne l'autorisation du survol des avions militaires français au dessus de son territoire, étant par ailleurs une grande puissance militaire régionale. D'autant plus que ce conflit peut avoir des répercussions sur la tant sur toute la région Europe/Afrique via le Maghreb, que sur la sécurité intérieure de l'Algérie notamment toute la zone Sud où sont concentrés les principaux gisements pétroliers et gaziers sans compter que bon nombre de familles notamment Touaregs du Sud ont des liens étroits souvent familiaux avec les familles au niveau du Sahel et notamment au Mali. En conclusion la situation actuelle au Sahel pose la problématique de la sécurité de l'Algérie et pose fondamentalement l'urgence de l'intégration de l'Afrique du Nord (sous segment le Maghreb), pont entre l'Europe et le continent Afrique afin de faire de cette zone une région tampon de prospérité, le terrorisme se nourrissant comme rappelé précédemment fondamentalement de la misère en se livrant au trafic de tous genres, rançons, drogue, armes etc. Car, le Maghreb, pour peu que les dirigeants dépassent leurs visions étroites d'une autre époque, a toutes les potentialités pour devenir une grande puissance régionale avec une influence tant économique que militaire, dans la mesure où en ce XXIème siècle l'ère des micros Etats étant révolu et que la puissance militaire est déterminé par la puissance économique. Pour cela, des stratégies d'adaptation au nouveau monde pour le Maghreb sont nécessaires, étant multiples, nationales, régionales ou globales mettant en compétition/confrontation des acteurs de dimensions et de puissances différentes et inégales. Face aux menaces communes et aux défis lancés à la société des nations et à celles des hommes, les stratégies de riposte doivent être collectives. Cependant, dès lors qu'elles émanent d'acteurs majeurs et de premier plan, elles s'inscrivent dans une perspective globale et cachent mal des velléités car évoluant dans un environnement géopolitique régional que des acteurs majeurs façonnent aujourd'hui à partir de leurs intérêts et des préoccupations stratégiques qui leurs sont propres. Cette région est l'objet de toutes les convoitises (notamment USA via Europe/Chine) car incluse dans une sous région qui n'en finit pas de vouloir se construire, au sein du continent Afrique qui est un enjeu géostratégique majeur au XXIème siècle avec plus de 25% de la population mondiale avec d'importantes ressources non exploitées, sous réserve d'une meilleure gouvernance et d'intégration sous régionales à l'horizon 2030 l'axe de la dynamisation de la croissance de l'économie mondiale devant se déplacer de l'Asie vers l'Afrique. Le Maghreb sous segment de ce continent est appelée de se déterminer par rapport à des questions cruciales et de relever des défis dont le moins qu'on puisse dire est qu'ils dépassent en importance et en ampleur les défis qu'il a eu à relever jusqu'à présent. (suite et fin)