Ce qui se passe à Donetsk ou Kiev peut-il avoir un effet à Damas? Ce ne sont évidemment pas les mêmes enjeux, mais les acteurs sont les mêmes. Le rattachement de la Crimée à la Russie, les sanctions, les mouvements de troupes aux frontières, les sécessionnistes de l'est... Une nouvelle «guerre froide» oppose la Russie aux Occidentaux en Ukraine. Quel rôle peut-elle avoir dans d'autres foyers «chauds», et notamment la Syrie, où le conflit, dans lequel la Russie et les Etats-Unis ont un rôle majeur, est entré dans sa quatrième année ? Même si la question ukrainienne reste autonome par rapport aux autres dossiers planétaires dans lesquels sont impliquées les grandes puissances –accord sur le nucléaire iranien, projet de bouclier anti-missile, conflit syrien, etc.– les liens entre eux ne sont pas totalement négligeables, estiment certains. Selon Julien Nocetti, spécialiste de la Russie à l'Institut français des relations internationales (Ifri), «les dossiers ukrainien et syrien sont indépendants dans leurs causes et leurs développements respectifs, mais un parallèle peut être tenté au niveau des facteurs émotionnels à l'œuvre dans la psyché russe». Pour le chercheur, le conflit en Syrie aurait indirectement encouragé Vladimir Poutine à frapper plus fort en Ukraine. «Au travers des événements actuels en Crimée, Moscou veut montrer aux Occidentaux que ce qui a été fait au Kosovo, en Irak, en Libye –et qui a été tenté en Syrie–, peut avoir lieu en Ukraine.Vladimir Poutine n'a toujours pas digéré l'extension de l'Otan jusqu'aux marches de la Russie ni son aventurisme en Libye et en Afghanistan.» Si les évènements en Syrie ont pesé dans l'inconscient russe, l'impact de la crise ukrainienne sur le cours du conflit syrien est moins évident. Un prolongement de la crise en Ukraine pourrait toutefois se répercuter sur les dynamiques du conflit estime de son côté Aron Lund, chercheur et rédacteur en chef de «Syria in Crisis» au centre Carnegie pour la paix internationale. Selon Julien Nocetti, spécialiste de la Russie à l'Institut français des relations internationales (Ifri), «les dossiers ukrainien et syrien sont indépendants dans leurs causes et leurs développements respectifs, mais un parallèle peut être tenté au niveau des facteurs émotionnels à l'œuvre dans la psyché russe». Pour le chercheur, le conflit en Syrie aurait indirectement encouragé Vladimir Poutine à frapper plus fort en Ukraine. «Au travers des événements actuels en Crimée, Moscou veut montrer aux Occidentaux que ce qui a été fait au Kosovo, en Irak, en Libye –et qui a été tenté en Syrie–, peut avoir lieu en Ukraine. Vladimir Poutine n'a toujours pas digéré l'extension de l'Otan jusqu'aux marches de la Russie ni son aventurisme en Libye et en Afghanistan.» Si les évènements en Syrie ont pesé dans l'inconscient russe, l'impact de la crise ukrainienne sur le cours du conflit syrien est moins évident. «Certes, la situation en Ukraine a fait passé au second plan les événements en Syrie –du moins dans les médias. Assad doit plutôt se réjouir que l'attention planétaire se détourne de son régime. Mais je ne crois pas que l'issue au conflit syrien dépende de la résolution de la crise ukrainienne. Les acteurs et les enjeux ne sont pas les mêmes (...) Et il n'est certainement pas question de marchandage entre la Russie et les Etats-Unis sur un éventuel lâchage d'Assad en échange d'une plus grande souplesse sur l'Ukraine.» Un prolongement de la crise en Ukraine pourrait toutefois se répercuter sur les dynamiques du conflit estime de son côté Aron Lund, chercheur et rédacteur en chef de Syria in Crisis au centre Carnegie pour la paix internationale. «Les rebelles et le régime sont désormais totalement dépendants de l'aide étrangère, et les Etats-Unis et la Russie sont deux acteurs clés dans ce conflit. La crise en Ukraine ne modifiera pas en elle-même les intérêts politiques des deux superpuissances en Syrie, mais elle pourrait affecter les relations entre elles et par conséquent l'équilibre des forces sur le terrain.» Autre impact potentiel : l'avenir du cycle de conférences sur la Syrie. Si Genève 1 et Genève 2 se sont soldées par un échec total des efforts visant à trouver une solution politique au conflit, Genève 3 risque de ne jamais voir le jour si les liens entre Russes et Américains venaient à se détériorer davantage. En revanche, une détente sur le front ukrainien pourrait aider, ne serait-ce que partiellement, à une résolution, par voie diplomatique, du conflit syrien. Une nouvelle position de l'UE sur la Syrie ? C'est surtout la position de l'Europe par rapport à la Syrie qui pourrait changer, dans le sillage des évènements à la frontière russe, estiment les analystes. Premier concerné par ce tournant dans l'histoire contemporaine de l'élargissement territorial, l'Europe avait jusque-là une position assez dissonante sur le conflit syrien. Le Vieux continent était partagé entre une France va-t-en guerre et une Allemagne opposée à une intervention militaire ou à une levée de l'embargo sur la livraison d'armes à la Syrie. Julien Nocetti estime : «Les récents évènements en Ukraine vont sans doute relancer le débat au sein de l'Europe sur la politique étrangère, la stratégie de défense commune, ainsi que le soutien des membres de l'Est de l'UE (...) mais aussi sur la formulation d'une position plus commune sur la Syrie.»