Le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, a dénoncé samedi à Alger des «tentatives de déstabilisation» du pays qui sont à l'origine de l'opposition à l'exploration du gaz de schiste, décidée dernièrement par les pouvoirs publics. S'adressant à la presse en marge d'une journée de vulgarisation des hydrocarbures non conventionnels, M. Yousfi a indiqué que l'Algérie, «accusée de nationalisme énergétique», fait objet de «tentatives de déstabilisation» qui visent à l'empêcher d'exploiter son potentiel en hydrocarbures. «Il nous a apparu utile et nécessaire que ceux qui contribuent à forger l'opinion publique sachent parfaitement où se situe l'intérêt vital du pays et où se cachent les tentatives de déstabilisation», a déclaré le ministre à l'adresse des journalistes de la presse nationale, présents à cette rencontre. Le ministre a ajouté que ces «tentatives de diabolisation» du schiste visaient les pays producteurs qui prônent «le nationalisme énergétique» pour asseoir leur souveraineté sur leurs ressources naturelles. Tempérant ses accusations, le ministre a reconnu qu'une partie des opposants à l'exploitation de ce gaz sont sincères car la peur de ce qui est nouveau accentue leurs craintes. Répondant aux accusations de certains partis politiques qui considèrent que l'autorisation accordée par le Conseil des ministres pour des forages pilotes du schiste comme une continuité de la politique de «la rente pétrolière», le ministre a affirmé que l'Algérie était contrainte à moyen terme, de compter sur cette manne financière pétrolière pour financer son développement. «Je répète : certains projets inscrits dans le prochain plan quinquennal demandent un financement extraordinaire à l'instar de celui de Gara Djebilet (un méga gisement de fer situé à Tindouf) qui nécessite de 10 à 15 milliards de dollars de financement», a souligné le ministre pour illustrer les besoins financiers de l'Algérie en matière de développement économique et social. «On va les financer (les projets) avec quoi ? Avec des discours ? avec du vent ? Nous avons deux millions de nouveaux abonnés au gaz. Avec quel financement allons-nous prendre en charge cette demande si ce n'est pas d'utiliser les ressources financières des hydrocarbures», a ajouté le ministre. «Est-ce qu'en cinq ou dix ans nous pouvons construire une économie complètement indépendante des hydrocarbures ?», s'est-il interrogé et d'ajouter que même si on avait une économie complètement indépendante, «n'est-il pas nécessaire de développer la production des hydrocarbures pour assurer la sécurité énergétique du pays à long terme à l'instar de ce que font les Etats-Unis et d'autres pays comme la Russie, le Canada et l'Australie». Nous n'allons pas assoiffer le pays Le ministre a saisi, par ailleurs, cette occasion pour s'exprimer sur certains sujets d'actualité touchant son secteur en apportant les précisions nécessaires. Il a affirmé, à ce titre, que le secteur disposait bel et bien d'une vision à long terme pour le développement du secteur de l'énergie, contrairement aux constats de certains experts, qui relèvent l'absence d'un modèle énergétique pour le pays. Pour le long terme, il a affirmé que le secteur allait mener à terme son programme des énergies renouvelables et pour lequel, il devrait mobiliser 100 milliards de dollars d'ici à 2030. «La politique énergétique, c'est de préparer le futur. Nous avons intensifié depuis quelques années l'exploration. En 2013, on a mis en évidence plus de 3 milliards de barils de pétrole. Si je ne me trompe pas, nous sommes parmi les premiers dans le monde dans ce domaine», a-t-il dit. Concernant le recours à la méthode de la facturation hydraulique dans l'extraction du gaz de schiste, le ministre a indiqué qu'elle est utilisée depuis plusieurs années par le groupe Sonatrach pour optimiser l'extraction du site de Hassi Messaoud, le plus grand champ pétrolier du pays. Le ministre a tenté de relativiser, assurant que les quantités d'eau nécessaires à l'extraction du non conventionnel sont inférieures à celles utilisées dans la production du conventionnel. «Ils disent qu'on va assoiffer le pays. Nous n'allons pas assoiffer le pays. La quantité d'eau pour une exploitation à grande échelle du schiste est inférieure à celle qu'on utilise actuellement pour le conventionnel (lorsqu'il s'agit d'augmenter la pression de certains gisements», a-t-il précisé. Schiste : aucun contrat n'a été signé avec une entreprise française Le ministre a réaffirmé que l'option du schiste découle d'un choix énergétique à long terme, décidé par le gouvernement en vue d'assurer la sécurité énergétique pour les générations futures. «Il n'y a pas de politique énergétique unique. Chaque pays a ses caractéristiques, ses ressources, son génie et ses moyens», a-t-il répondu aux détracteurs de l'exploitation du gaz de schiste, qui évoquent souvent le cas de la France où une interdiction des forages de schiste a été décrétée. Selon le ministre, la France dont la majorité des centrales électriques fonctionnent au nucléaire n'est pas prête à renoncer à ce choix énergétique pour exploiter le schiste. M. Yousfi a démenti, ainsi, la signature d'un contrat avec une entreprise française pour l'exploitation du schiste, en qualifiant cette information «de manipulation totale».