La presse sportive algérienne, pointée du doigt comme «vecteur de la violence dans les stades» après la mort de l'attaquant de la JS Kabylie Albert Ebossé, a rejeté ces accusations lundi à Alger, lors d'une conférence-débat tenue en présence de plusieurs personnalités dont le ministre de la Communication, Hamid Grine. Les causes de la violence dans les enceintes sportives sont «multiples» et les «responsabilités sont partagées», ont estimé unanimement des représentants de médias, intervenant lors de cette rencontre initiée par l'Organisation nationale des journalistes sportifs algériens (ONJSA) . La lutte contre la violence exige, aux yeux des journalistes, une application de la loi dans toute sa rigueur et à tous les niveaux, une fois les responsabilités déterminées. Pour Rachid Abbad, journaliste à Liberté, «la violence n'existe pas uniquement dans les stades. Ce fléau touche différents pans de la société, d'où la nécessité de commencer à agir au niveau des foyers et des écoles, car la première part de responsabilité dans la lutte contre la violence incombe d'abord aux parents et aux enseignants». Un avis partagé par une majorité de ses confrères qui ont qualifié les stades de football de «fenêtre ouverte sur la société» et que les faits qu'on y constate ne sont que «le reflet de ce qui existe un peu partout». Ahmed Achour, un des doyens de la presse sportive algérienne est allé plus loin en présentant le sport, le football en particulier, comme «une victime de la violence, et non comme un vecteur de ce fléau». «Le phénomène de la violence ne concerne pas uniquement les stades d'Algérie. Il faut voir ce qui se passe dans d'autres pays. Dernièrement, un supporter a été tué par balle en Argentine et Dieu merci, en Algérie, nous n'en sommes pas arrivés là», a encore tenu à faire savoir l'ancien journaliste d'El Moudjahid, actuellement au Temps d'Algérie. Le problème se situe ailleurs «Après l'incident du stade de Tizi-Ouzou et la mort d'Ebossé, j'ai passé en revue les articles qui ont été publiés pendant les semaines ayant précédé le clasico JSK-USMA. Franchement, je n'ai trouvé aucun commentaire incitant à commettre un tel acte», a affirmé Redouane Bouhanika, rédacteur en chef du quotidien spécialisé, El Heddaf. «Les stades d'Algérie sont vieux et ne répondent pas aux normes modernes. L'accès des supporters, locaux et adverses, se fait souvent par une seule porte, ce qui mène parfois à l'affrontement», a souligné Bouhanika avant d'ajouter que «même les grands stades, comme le 5-Juillet, qui possèdent plusieurs portes d'accès, n'ouvrent que deux ou trois portes pour un public qui dépasse les 70 000 fans. Ce qui montre une autre faille, même au niveau de la gestion», a-t-il considéré. D'autres intervenants ont déploré l'absence de caméras et de fichier national des supporters pour débusquer et poursuivre les fauteurs de trouble, soulignant, à titre d'exemple, qu'«à ce jour, les agresseurs de Fayçal Badji, en 2001, et Abdelkader Laïfaoui, en 2012, courent toujours. Et ça continue avec le drame d'Ebossé.» La presse sportive a le mérite d'avoir révélé, dans plusieurs occasions, des faits dramatiques étouffés ou passés sous silence, ont fait savoir des journalistes présents. Ahmed Ifticène, journaliste à Liberté, a souligné, dans ce contexte, que son quotidien avait élaboré en 2009, en collaboration avec le quotidien El Khabar, une étude approfondie sur le phénomène de la violence en Algérie. Convié à cette conférence-débat, le ministre de la Communication, Hamid Grine, a exhorté les représentants des médias à demeurer «respectueux de l'éthique», et à «mesurer l'impact» que pourraient avoir leurs articles, ou leurs reportages. «Soyez conscients de votre rôle de sensibilisateur», leur a-t-il lancé.