Chaque pays a les siens émanant de la sagesse populaire, mais au fil du temps, ils sont passés d'un continent à l'autre pour leur contenu universel et leur forme poétique et symétrique. Des proverbes, il en existe même dans les langues sans support écrit, ce qui montre qu'ils sont à la base d'une culture populaire. Du point de vue terminologie, ce genre poétique connaît différentes appellations : aphorisme, maxime, précepte, sentence, adage, dicton, proverbe, en fonction de ce qu'il véhicule comme vérités sur le comportement des hommes, les sentiments, les vertus, les vices, la vie en général, le temps. D'une manière générale, ces pensées exprimées dans un langage de haute tenue, frisant parfois l'exotérisme, sont des mises en garde sur les erreurs à ne pas commettre ou les règles de conduite à observer scrupuleusement. Des phrases à valeur morale et prescriptive Ce qui les caractérise, c'est la langue esthétique dans laquelle elles ont été composées par des sages de tous les temps, dont la mémoire n'a pas retenu les noms. Les proverbes sauvés de l'oubli sont ceux qui ont été choisis par des poètes, généralement des fabulistes, pour illustrer une pensée à retenir du genre : «Rien ne sert de courir, il faut partir à point», «la raison du plus fort est toujours la meilleure», «le flatteur vit aux dépens de celui qui l'écoute». Ces phrases situationnelles sont appelées sentencieuses, sinon des génériques comme : «science sans conscience n'est que mine de l'âme», ou «la science sans religion est aveugle, la religion sans science est boiteuse». Les linguistes de la dernière heure se sont permis de définir les proverbes comme «des discours autonomes, clos et minimaux en tant que sentencieux. Naturellement, il existe des critères qui permettent des classifications en fonction de la forme et du contenu. «Loin des yeux, loin du cœur», peut rentrer dans la catégorie des proverbes déjà cités. Cependant, certains n'ont pas été considérés comme des proverbes, ils devraient plutôt être classés dans la catégorie des adages ou des dictons populaires qui remontent à la nuit des temps. C'est le cas de : «Un binage vaut deux arrosages», petite pluie abat grand vent», «en avril, ne te découvre pas d'un fil». Structure des proverbes Selon un linguiste, sinon un philosophe du langage, un proverbe c'est non pas seulement une forme, mais un contenu dont la reconnaissance pour le locuteur passe par l'identification du contexte adéquat. Il faut reconnaître qu'un proverbe est composé de deux parties comportant généralement, le même nombre de syllabes dans chacune d'entre elles, mais ceci n'est pas une règle générale. A titre d'illustration, on peut citer : «Qui aime bien châtie bien», «la parole est d'argent mais le silence est d'or». Ceci existe même dans les proverbes étrangers. En Italie, pays de vieille civilisation, on dit : «Plus tu connaîtras les hommes, plus tu aimeras les animaux». Cette forme symétrique mettant en évidence deux parties d'égale longueur, peut être courante dans d'autres continents. Ainsi, les chinois disent : «Si tu donnes un poisson à un pauvre, tu le nourris pour un jour, mais si tu lui apprends à pêcher, tu le nourris à vie !», «Pierre qui roule n'amasse pas mousse», parfaitement symétrique, n'a pas la même structure que son opposé : «Les voyages forment la jeunesse». Il arrive qu'un proverbe ait une forme binaire, à l'exemple de : «Oignez vilain, il vous poindra, poignez vilain, il vous poindra», qui rappelle malgré la rime classique qu'il est toujours d'actualité, en parlant de quelque chose d'éphémère : «Ciel ponelé et femme fardée sont tous deux de courte durée». il existe d'autres proverbes devant être classés par leur forme dans la catégorie des maximes comme : «tel père tel fils», qui de plus est de forme minimale aussi étonnante que : «Brouillard en mars, gelée en mai». Ce qui est commun presque à toutes les sociétés, la mémorisation ou la facilité à mémoriser les proverbes dépend du niveau de culture de la société d'appartenance et de chaque individu. D'une manière générale, les plus vieux ont une plus grande expérience des proverbes parce qu'ils en sont férus. Les proverbes dans les textes ou l'intertextualité Les meilleurs textes littéraires sont ceux qui sont encaillés de proverbes, dictons populaires auxquels l'auteur a recours pour mieux exprimer ce qu'il y a d'abstrait chez l'homme comme les vices réactions inattendues, problèmes d'intérêts, contrastes, comparaisons métaphoriques. On trouve chez Taos Amrouche, cette pensée sentencieuse d'origine populaire : «Elle est incapable de marcher comme une poule, elle imite la perdrix», (rue des tambourins, roman autobiographique). Les meilleurs écrivains sont ceux qui ont baigné durant leurs meilleures années dans la littérature populaire et la culture des ancêtres. Ceux qui s'en sont bien imprégnés se font remarquer par un style d'écriture particulièrement enrichissant par les expressions populaires, anecdotes, proverbes pouvant apporter un éclairage au contenu. Les textes philosophiques de Voltaire comportent de nombreuses citations improvisées à la mesure des enjeux des situations évoquées. A titre indicatif, on y lit : «plus les hommes seront éclairés, plus ils seront libres», «Seul le temps peut unir ce qu'un instant a séparé». Il existe des proverbes traduits dans beaucoup de langues pour leur valeur littéraire et morale. On emploie souvent y compris dans les journaux le proverbe traduit de l'arabe : «les chiens aboient la caravane passe», comme «les murs ont des oreilles», d'origine espagnole. De l'Italien, on peut citer «plus tu connaîtras les hommes plus tu aimeras les animaux» surtout dans les œuvres romanesques à caractère psychologique. Les grands poètes comme les fabulistes savent user à bon escient, des proverbes maximes, pensées pouvant guider dans le décryptage d'un texte bien élaboré. Quelquefois, une fable en vers ne vaut que par un proverbe bien intégré par le sens, la rime et le rythme à l'ensemble du texte poétique. La Fontaine qui a réécrit sous forme versifiée toutes les fables empruntées à d'autres fabulistes : Esope, Ibn el Mouqafaa, Phèdra, est là dessus, une exception par la qualité de son langage esthétique.