La maternité est le rêve de chaque fille depuis son enfance en jouant avec ses poupées jusqu'à ce quelle devienne jeune fille et rêve de ses bébés avec son partenaire. Cependant, la maternité peut tourner au cauchemar lorsque la mère assume, seule, la charge et la responsabilité d'élever un enfant illégitime, en dehors de l'institution du mariage, et dans ce cas, elle porte le nom de «mère célibataire». Et souvent elle se trouve, ainsi que son enfant méprisés par son entourage, sans parler des problèmes de l'éducation et de la prise en charge. Divers causes et un seul résultat : maman célibataire Asma, 25 ans, berce son fils. Voilà deux mois qu'il est né, dans la douleur. Asma a dit : «Ça a été très difficile pour moi, je ne me suis pas mariée, je suis toute seule. Ma famille est conservatrice, il y a des règles, tu comprends ? Surtout pour nous les filles ! Quand je suis tombée enceinte pour eux, c'était un très gros problème, ils ne pouvaient pas comprendre. Pour eux c'est honteux, tu dois nécessairement te marie... Et si tu leur avais dit que j'étais enceinte ? Ils auraient pu me tuer...». Son histoire, Asma la raconte en ravalant ses larmes. Elle est loin d'être une exception. Comme elle, chaque année, des centaines de milliers d'Algérienne tombent enceintes alors qu'elles ne sont pas mariées. Un interdit absolu dans l'Islam, qui force la plupart de ces femmes à se cacher ou à vivre exclues. Comme raconte cette autre jeune mère tombée enceinte à 22 ans, Fatima est l'une parmi celles qui ont préféré garder leur bébé. Elle dit qu'elle «est tombée enceinte de son voisin qui l'avait forcée à avoir des relations sexuelles, et quand sa famille a découvert la relation, son père a déposé une plainte contre lui, mais le voisin s'est enfui, et c'est la chose qui l'avait obligée de quitter la maison familiale». Hayet raconte que «ma famille a voulu me marier avec un homme âgé et riche, et la mon petit copain m'a convaincue de tomber enceinte de lui afin de mettre ma famille face à cette réalité, pour qu'elle annule ce maudit mariage». «Une fois, j'ai eu un foetus dans mon ventre, mon petit copain s'est enfui... J'étais dans un état psychologique difficile, jusqu'à ce que j'ai appris, par hasard, par un de ses proches, qu'il a émigré vers l'Europe», ajoute-elle. Toutefois, elle a dit «avec ma famille intolérante, j'ai dû quitter la maison et travailler pour élever et assurer l'alimentation de mon enfant, soulignant qu'elle dormait, parfois, dans la rue». L'histoire d'Ahlem (23 ans) est un peu différente, elle a été violée quand elle avait dix-huit ans. «Un jeune homme est venu demander ma main sans ramener ses parents avec lui, mais mon père a refusé. Là le jeune a insisté pour me voir. Une fois que j'ai accepté, il m'a violée dans sa voiture», dit-elle. Une société aussi intolérante Dans ce contexte, la présidente du Centre d'information et de documentation sur les femmes et les enfants, Nadia Aït Zaï, a confirmé que «les mères célibataires est un phénomène qui s'est répandu dans la société algérienne». De son côté, l'avocate Fatma-Zohra Benbraham, a indiqué que «les enfants sont les premières victimes en particulier parce qu'ils ne grandissent pas dans une ambiance de famille». La psychologue, Hakima Kh., a indiqué, par ailleurs, que «ce sont des situations dramatiques, elles ne savent plus à qui s'adresser... Les familles les excluent, le père biologique disparaît... Nous sommes toujours confrontés à cette réalité et nous avons toujours du mal à travailler réellement l'insertion sociale de la maman auprès de la société, de la famille et d'un employeur». Maaskri Nouria, avocate près la cour d'Alger, n'a pas hésité à évoquer l'absence de lois qui protège la mère célibataire ou qui lui accorde un quelconque droit. «Aucune loi n'évoque le statut de la mère célibataire, ni le code de la famille, encore moins la Constitution. Cela est dû, entre autre, à la honte qu'engendre le tabou, ainsi que l'application de la Chariâa qui ne donne aucun droit aux enfants nés sous X, ni aux mères célibataires. «Les mères célibataires continuent à être stigmatisées par la société, leurs enfants nés sous X n'ont aucun droit et parfois, même ils n'ont pas de noms et ceci à cause de l'injustice qui apparaît déjà clairement dans le code de la famille, qui institutionnalise une sous-citoyenneté des femmes. Asma revient et nous dit, «c'est vrai que parfois, nous commettons des erreurs dans des moments de faiblesse ou par amour, sans calculer et sans penser aux problèmes que nous aurons plus tard, malheureusement nous finissons toujours par regretter».