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Aussi petite qu'est la souris, elle n'est pas l'esclave de l'éléphant (III)
Publié dans La Nouvelle République le 21 - 09 - 2015

A Cherchell, le Douar de Sidi Semiane se trouvait à mi-chemin des montagnes du Zaccar et de la mer. Il faisait partie de la Wilaya IV de la Zone II. Il est relié d'une route venant de Cherchell au Zaccar Miliana, jusqu'à la vallée du Chlef. Après la bataille de Sidi Mohand Aklouche, dans la circonscription de Cherchell, où le commando de L'ALN sortit victorieux de ce grand accrochage contre l'armée française et particulièrement contre le 29eTM bataillon de tirailleurs algériens installé à Fontaine du Génie (Hadjrat Ennos), le commando ALN restait toujours dans la région à la recherche d'autres batailles.
Dès le lever du jour, les sentinelles d'Azrou Taghate virent au sol le fourmillement des soldats, et dans le ciel, comme un essaim d'abeilles, le déploiement des hélicoptères desquels sautaient des soldats qui prenaient en vitesse la position de tir. Les guetteurs de l'ALN et les vigiles du FLN comprirent qu'il s'agissait là, d'une opération de grande envergure, car jamais ils n'avaient vu autant de soldats à la fois! Ils donnèrent l'alerte. Les artilleurs terminaient d'installer les canons dont ils avaient écarté les bêches, qui ressemblaient à deux jambes écartées, et le temps d'enlever les bâches de protection des culasses graissées, et les fûts des canons furent pointés vers le ciel, comme s'ils avertissaient les anges du ciel, si toutefois il y en avait, de ne pas protéger les habitants de cette terre, condamnés, sans appel, à mourir tous, hommes, femmes et enfants. Les batteries d'artillerie en position, les chefs de pièces recevaient les ordres qu'ils transmettaient aux tireurs, qui alors envoyaient les obus au loin labourer la terre. Et seul le bruit des culasses qui s'ouvraient et se refermaient, battait la cadence des obus qui, en sifflant, partaient s'éclater au loin sur les crêtes des maisons et les têtes d'innocents et pauvres montagnards, dont la seule faute était d'être là, en cette Kabylie natale, pour y mourir, victimes de l'armée française. Oui, beaucoup d'êtres humains, jeunes et vieux, allaient mourir. Et les quelques fuyards qui se seraient planqués quelque part dans les montagnes inaccessibles, étaient alors rejoints par l'aviation qui les finissait en les bombardant de fûts de napalm. Le napalm allait pleuvoir sur eux, comme une pluie de grêle métallique, qui en touchant le sol, explosera pour arroser l'entourage, et brûler tout sur quoi elle se déverse au passage. Le napalm, fléau du dieu du mal, allait anéantir tout ce qu'il toucherait et, à jamais, cette nature restera endommagée. Les bombardements continuaient sans cesse sur les endroits réputés être les refuges des fellaghas, ou tout simplement pour nettoyer le terrain avant la progression des troupes terrestres. Plusieurs batteries d'artillerie tiraient à la fois, c'est comme si les canons tiraient par rafales, car les obus tombaient par grappes, explosant à répétitions successives, dont se faisaient l'écho, les cuves des hautes montagnes qui semblaient s'en plaindre en gémissant de douleur. Se peut-il que les montagnes aussi se meurent? Les hélicoptères, tels un monstre ailé, avaient déposé sur les pitons des montagnes la troupe de chasseurs, avec des chiens entraînés à renifler les fellaghas. De ces hauteurs, les soldats pouvaient à leur aise scruter en-dessous d'eux, et informer le poste central d'opérations, dont l'état-major, coordonnait le carnage, en dispatchant les ordres de meurtre et de destruction dans toutes les directions. Puis la troupe, comme une faucille, redescendait vers la plaine en éliminant tout ce qui ressemblait à un fellagha, c'est-à-dire tout habitant de la région, et plus clairement tout être vivant rencontré en ces lieux. Qui parmi les indigènes ne ressemblaient pas à un fellagha ? Qui ? Qui allait sortir d'entre les mâchoires de cet étau? Qui ? Qui pouvait leur échapper ? Qui ? Djoudi Attoumi, officier au PC d'Amirouche rapporte : «L'aspirant Si Smail Azzoug, chef de la compagnie de la région IV, reçut le chef de la patrouille qui l'informa de la situation. Aussitôt, il se rendit chez le colonel Si Amirouche qui se trouvait dans son PC à proximité de ses hommes, pour bénéficier de leur protection. Le colonel rejoignit la compagnie avec son chef d'unité. Si Smail lui donna un bref aperçu de la situation et lui indiqua surtout les points de progression des soldats français. L'heure était grave. Amirouche n'était pas sans appréhension. C'était un moment important que de préparer une attaque contre l'ennemi ou de s'attendre à être attaqué. Il connaissait bien le chef de compagnie, les chefs de sections et même la plupart des hommes. Il savait qu'il avait des «lions» à ses côtés et qu'il n'avait aucune crainte. Par contre, l'ennemi appréhendait beaucoup le massif de l'Akfadou. C'était là qu'il avancerait dans l'inconnu, où, à chaque pas, les soldats risquaient de se trouver nez à nez avec les nôtres, embusqués derrière les arbres ou dans les buissons. Ceci était aussi valable pour nous, car il nous arrivait souvent de nous retrouver «face à face» avec des soldats; c'est-à-dire que la forêt était toujours pleine de surprises, surtout de mauvaises surprises. Il était toujours difficile pour l'ennemi de fouler l'Akfadou sans subir de pertes. Habitué à la jungle et aux rizières indochinoises, il finit par adopter une stratégie d'approche. Mais le plus dur pour les soldats, c'était de traverser une clairière ou de longer les pistes forestières qui traversent l'Akfadou de part en part. Et c'est précisément là que nos unités avaient l'habitude de les attendre. La borne 11 qui constituait le point de ralliement pour toute la troupe, était devenue un cimetière pour eux, sans parler de Thala Guizem (la fontaine du lion), de Aguelmime Aberkane (lac noir) ou alors la maison forestière à proximité d'Adekar et celle d'Imaghdacène. C'est précisément à ces endroits que d'habitude les soldats recevaient les coups. Pour avoir une idée nette sur la progression de l'ennemi, les vigiles étaient en permanence postés sur l'Azrou Taghat (rocher de la chèvre), c'est le point culminant de l'Akfadou, d'où l'on domine la vallée de la Soummam à l'est, la vallée du Sébaou à l'ouest et tout le piémont, à savoir: Ikhedjane, Aït Amansour et Adekar, jusqu'à la mer. C'est dire que cette crête mérite bien son surnom de «miroir de l'Akfadou», il était impossible à l'ennemi d'engager une opération de ratissage ou de progresser sans se faire repérer à partir de ce rocher. Au milieu de ses hommes, Amirouche sans plus tarder, élabora avec le chef de compagnie, un plan d'attaque: il était exclu d'affronter cette armada par un « contre-ratissage » ; non seulement, il s'agirait d'une attaque aléatoire, mais d'un plan fou ! Il convenait d'affronter les soldats soit à leur arrivée, pour les décourager dans leur progression, soit à la fin de l'opération au moment de monter dans les camions, pour les atteindre directement dans leur moral. Finalement, ils décidèrent tous les deux, avec l'assentiment des chefs de section, de tendre une embuscade au niveau de la borne 11, ce qui se ferait en l'espace de quelques minutes. L'installation des sections se fit sans problème, puisque tous les combattants étaient habitués à l'endroit, car ils avaient eu l'occasion, à maintes reprises, de se poster là, pour attendre l'ennemi. L'attente fut assez longue; il y a toujours quelque part, une peur, une appréhension de l'inconnu. La partie n'était pas gagnée d'avance, mais il fallait attendre de pied ferme. Il n'était pas question de bouger et encore moins de communiquer avec le voisin. Lorsque le jour fut complètement levé; déjà deux avions d'observation pointaient leur nez pour balayer les contours du massif. Nous comprenions toujours dans pareil cas, que les zones balayées étaient envahies par les soldats, afin de surveiller leur progression et déceler tout mouvement suspect ; c'est ce que l'on appelle dans le jargon militaire, la reconnaissance aérienne. Amirouche se trouvait dans le groupe, légèrement en retrait par rapport aux autres. Ses compagnons n'acceptaient pas qu'il soit en première ligne, pour éviter de l'exposer inutilement aux balles ennemies. En tant que chef, il n'avait jamais montré d'appréhension, et encore moins de peur face aux soldats; nous ne pouvions du moins pas le déceler, son visage étant de glace. Il avait un grand sens de l'esprit de sacrifice. Mais ses hommes trouvaient toujours un motif pour le mettre en retrait, l'éloigner du danger. Le chef d'unité était seul capable de le convaincre de s'éloigner des premières lignes, de le mettre loin du danger. Une chose était sûre, c'est qu'Amirouche était toujours respectueux des décisions du chef de l'unité où il se trouvait ou de celles du responsable local où il était de passage. D'ailleurs à cet effet, vers le début de décembre 1958, au moment où il se dirigeait avec ses collègues de la wilaya 4 vers Ouled Aksar, dans le Nord-Constantinois, ils se retrou- vèrent dans un refuge à Oued Marsa, près d'Aokas. Le colonel Si M'hamed Bougara posa la question à Si Amirouche pour savoir quel était le plan de repli, en cas de ratissage; Amirouche lui posera alors la question de savoir quel était son responsable? Si M'hamed lui répondit que c'était lui, en faisant allusion à Amirouche. A ce moment- là, ce dernier lui signifia que son chef était le commandant de l'unité locale et qu'ils devaient tous se plier à ses ordres, malgré leur grade de colonel. Dans le froid de l'Akfadou, quelques coups de feu se firent entendre çà et là ; c'était un signe que l'ennemi était là et qu'il progressait pour atteindre le cœur du massif. Il ne s'agissait point d'accrochage, mais de «détachés» surpris par l'avancée de l'ennemi. A part ces petites escarmouches, le silence de l'Akfadou était pesant et même inquiétant. Plus le silence se prolongeait, plus les appréhensions envahissaient les hommes. Dans une bataille, un accrochage ou une embuscade, l'attente était toujours pénible, au point où on était pressé d'en finir; parfois, elle engrangeait même la peur, mais jamais la panique. Toujours est-il que les premiers coups de feu constituaient une délivrance, même si l'on n'ignorait pas que la mort rôdait et qu'elle pouvait emporter son lot, d'un moment à l'autre. Ce n'est que vers midi que les voix commençaient à se rapprocher. Les soldats ne se faisaient pas discrets; dans leurs progressions, ils s'appelaient entre eux, probablement pour signaler leur présence ou pour évacuer leur peur. Vers 13 heures, ils se trouvèrent enfin dans l'angle de tir de nos hommes. Les soldats furent reçus par un déluge de feu. Le tireur de F.M,
Salah Bouguelid avait, à lui seul, fauché un groupe de soldats. Plusieurs d'entre eux furent tués, dont le lieutenant Michel Blanc de la 9èmc division d'infanterie, alors basée dans l'Ouarsenis; 7 armes furent récupérées. C'était la débandade au sein des soldats. Un poste émetteur fut récupéré et son porteur, un prisonnier civil du village de Boumellal, libéré. Le colonel Amirouche était présent dans l'action, avec un fusil mitrailleur entre les mains. Il tirait debout; les combattants étaient ravis de voir leur colonel dans l'action, mais ils avaient surtout peur pour lui. C'est pour cela qu'ils faisaient tout pour l'en éloigner. En fin de journée, ce fut le repli, avec un groupe d'officiers et une section d'escorte, vers Zekri, près de Béni Ksila. La compagnie de région prit, le soir venu, la direction deTifra où les djounoud se mirent à capter des messages à travers le poste émetteur devenu un objet de curiosité et même d'amusement. En le manipulant, les djounoud ignoraient qu'ils seraient certainement détectés et même localisés ! Cette maladresse leur coûtera très cher, dès le lendemain. Il y a de ces batailles que l'on n'évoque qu'avec douleur; celle de Tifra a provoqué une saignée au sein de la troisième compagnie du bataillon de choc que commandait l'aspirant Ahcène Issighi dit «Ajemati». Un combat vraiment inégal qui engagea au cours de cette opération «Brumaire», des milliers de soldats, aidés par l'aviation et plusieurs batteries d'artillerie installées tout autour, face à quelques trois cents combattants de l'ALN. Deux jours après l'embuscade de l'Akfadou, le gros de la troupe en opération convergea sur le secteur de Tifra. Cette opération de grande envergure nous poussa à envisager trois hypothèses: Première hypothèse : Le poste émetteur. Le poste émetteur, lors de ses manipulations a été repéré au moyen de la goniométrie: ce qui laissait penser aux militaires qu'Amirouche se trouvait dans les parages, et qu'il tentait de capter des messages français. Deuxième hypothèse : La visite de deux goumiers déguisés. Deux goumiers étaient venus la veille du poste d'Iznaguène (Semaoune) jusqu'au village Izoughlamène, déguisés en Moudjahidine. Ils avaient demandé à un villageois où étaient installés les combattants de l'ALN; innocemment, il leur donna des renseignements précis. D'autres qu'ils étaient quatre et qu'ils avaient même passé la nuit au village Flih, se faisant passer pour des moussebline en fuite. C'est ainsi qu'ils repartirent à leur poste, après avoir récolté des informations importantes, ils devaient même se douter de la présence d'Amirouche. Troisième hypothèse : Ralliement d'un moussebel. Un moussebel du douar se serait rallié à l'ennemi quelques jours auparavant. Il aurait communiqué des renseignements utiles à l'ennemi. Le déroulement de l'opération: A minuit, la sentinelle de la compagnie de la région IV ou «324» selon le code français, signala l'arrivée de plusieurs camions au niveau des «trois chemins», sur la RN12 (El Kseur- Adekar -Bougie). Les feux étaient tantôt éteints, tantôt allumés. Les responsables des deux compagnies n'étaient pas inquiets, au point où ils ne se sentaient presque pas concernés; c'était de la pure folie. Chaque unité campait sur ses positions: elles étaient distantes de 1500 mètres à vol d'oiseau. Leurs chefs étaient rassurés par leur capacité de frappe; ils avaient sous-estime les forces ennemies et surestimé les leurs. C'était là, leur principale erreur ! À 8 heures, la compagnie de région, installée à Tizi Titra, prit position sur la route, située en contrebas du village, en prévision des camions qui devaient arriver du poste d'Adekar ou d'El-Kseur. Les djounoud étaient décidés à réaliser un joli coup de main. Vers 9 heures, coup de théâtre! Alors que les djounoud avaient leurs armes braquées vers la route, voilà qu'on leur tirait dessus par derrière. Les soldats en provenance d'Adekar, les avaient pris à revers. C'était un piège digne d'un grand stratège; heureusement que les camions n'étaient pas encore arrivés, sinon, ils seraient pris en tenailles. Ce fut la déroute. Les éléments de la compagnie de région se retirèrent sans n'avoir subi aucune perte; ils prirent la direction de la forêt. Malheureusement, ce ne fut pas le cas pour leurs camarades de la compagnie du Bataillon stationnée à Titra. Un déluge de feu s'abattit sur eux; devant la riposte, l'ennemi se retira pour laisser place à l'aviation et l'artillerie qui, bombardant tour à tour les deux villages, ainsi que les crêtes supposées occupées par les nôtres. Les chars firent leur apparition à l'entrée de Tizi Tifra. L'un d'entre eux s'était aventuré jusqu'au cimetière du village. À partir de sa position, il faucha tout un groupe de pièces de la compagnie du bataillon. Les premières victimes commençaient à tomber dans les rangs de l'ALN. Un obus d'artillerie détruisit un autre groupe, dont Salah Khedis, le commissaire politique du secteur. Puis, c'est le bombardement au napalm. C'était l'enfer. Si seulement les soldats s'étaient approchés pour un combat entre fantassins! Quel que soit l'effectif ennemi, il n'y aurait rien à redire. Mais assister, impuissants, à des massacres par des bombardements, provoquait la haine contre cette saloperie d'artillerie qui ne cessait de déverser ses obus. Si elle s'arrêtait, c'était pour laisser la place aux avions et inversement. Ce fut le commencement de la déroute! L'enfer avait atteint son paroxysme. A la fin de la journée, ce fut le repli dans la débâcle; nos combattants, usés et meurtris, avançaient difficilement. Ils n'avaient presque pas vu de militaires et n'avaient presque pas utilisé leurs armes; ils allaient enfin se retirer, du moins pour ceux qui étaient encore en état de marcher. Pour les rescapés de la 3*me compagnie du bataillon, c'était la retraite, à l'image de celle de Waterloo! Où était passée la fierté de nos combattants? Ils ont payé le prix d'une mauvaise stratégie de leurs commandants de compagnies, et surtout de l'absence de coordination entre eux. Lorsqu'arriva le soir, il fallut faire le bilan; on constata qu'il était très lourd, car il y avait eu trop de morts: 86 combattants dont 45 de la compagnie de choc, tous déchiquetés ou brûlés au napalm; des dizaines d'autres ont été blessés; informé de cette hécatombe, Amirouche se rendit personnellement sur le champ de bataille, au bout du troisième jour. N'ayant pas confiance en quelqu'un d'autre pour effectuer une enquête et surtout étant donné la gravité de l'affaire, il procéda lui-même à l'interrogatoire des témoins. Pour la première fois, des djounoud avaient vu Amirouche hors de lui, accablé par la douleur devant le nombre de morts; certains diront même avoir vu ses yeux mouillés de larmes qu'il ne put retenir tellement il était enragé. Il avait constaté que toutes ces pertes auraient pu être évitées, si le responsable de la 3ème compagnie qui, en vrai chef, avait été prudent et prévoyant pour préserver la vie de ses hommes, en faisant preuve d'un minimum de tactique. Il lui suffisait de quitter les lieux, aussitôt que l'ennemi avait été annoncé, à savoir la veille vers minuit; il avait tout son temps pour le faire et s'éloigner du village; ou alors, s'il devait engager le combat, il aurait pu préparer un plan d'attaque, en accord avec le chef de la compagnie de la région IV. Mais le fond de la pensée de ce chef de compagnie défaillant, il le révélera plus tard; il ne voulait pas quitter le village à l'approche des soldats, pour que lui et ses hommes ne passent pas pour des peureux aux yeux de la population. Il pensait ainsi, préserver l'honneur et la dignité de l'ALN. Par cette faute, il apparut ce jour-là, aux yeux d'Amirouche et même pour tout le monde, comme un chef qui avait manqué de prévoyance. Il était déjà connu et même réputé pour son courage, mais pour diriger des combats de cette envergure et faire face à des milliers de soldats, c'était quelque chose qui le dépassait. Amirouche chercha vainement à rencontrer l'officier défaillant qu'il s'était promis de sanctionner. D'aucuns diront alors que s'il était en face de lui, il lui aurait tiré une balle dans la tête, tellement il était hors de lui. Finalement, Amirouche, dégoûté par ce comportement irresponsable, ne chercha même plus à le voir. Il lui communiqua son affectation par mesure disciplinaire en Région II (Bouira). Tel étaient les combats de l'ALN contre l'une des puissances mondiales de l'époque la France coloniale. Et faute de la vaincre militairement nous l'avons vaincu politiquement, en arrachant notre indépendance. (Suite et Fin) *Moudjahed membre ALN. Auteur Ecrivain.


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