Les années passent pour les sans domiciles-fixe et les malades mentaux mais sans que la situation de ces pauvres malheureux ne s'améliore. Dans chaque région du pays, des dizaines de citoyens issus de cette couche sont livrés à eux-mêmes, à la merci du climat. De temps à autre, des actions de solidarité envers cette frange se font parfois sous les projecteurs des caméras de télévision et des crépitements des appareils photos des journalistes. Des colis alimentaires sont distribués et quelques hommes, femmes et parfois enfants n'ayant pas de domicile sont mis provisoirement à l'abri. Ceci ne sera que de courte durée avant que les SDF et les malades mentaux ne retrouvent la rue. Dans un passé récent, un malade mental a agressé mortellement dans la rue une jeune fille et blessé grièvement une autre dans une wilaya de l'est du pays. La réaction des autorités locales a été immédiate : le wali a ordonné de «ramasser» tous les malades mentaux «errant» dans la ville. Aidés par les gardes-communaux, les éléments de la Protection civile a embarqué plus d'une trentaine vers l'hôpital de la ville où ils furent tous internés. Une bagarre générale a éclaté dans un «cabanon», chose qui a contraint le directeur de l'hôpital d'interpeller le wali. Sur instruction du premier chef de l'exécutif, le directeur de l'hôpital a pris attache avec son collègue de l'hôpital psychiatrique, situé dans une autre wilaya, pour une éventuelle admission de ces malades. «Je ne vois pas de problème pour prendre en charge ces malades mais en raison de leur nombre, la réalisation d'un autre asile est fortement recommandé.» Pour les SDF, la situation est la même. Répondant à l'appel de citoyens, les éléments de la Sûreté nationale et ceux de la Protection civile interviennent mais ne savent pas quoi faire. Pour des raisons humanitaires, la personne prise en charge est mise à l'abri durant la nuit dans un hôpital avant qu'elle ne soit invitée à repartir à la levée du jour. En l'absence des associations caritatives, le gouvernement est appelé à prendre en charge cette couche de la population. Dans l'attente que des logements sociaux leurs soient attribués, les familles SDF devaient être hébergées dans des centres sociaux. La création des hébergements d'urgence devraient également être créées. Nous n'apprenons rien à personne en disant que la Constitution algérienne garantit le droit au logement et le travail pour les citoyens et l'Etat a prévu des budgets pour les couches nécessiteuses. Malheureusement, rien n'a été fait pour l'instant au profit de cette catégorie de personnes qui continuent de souffrir. Des responsables de la société civile avec qui nous nous sommes entretenus s'interrogent sur le rôle des élus (APW, députés, sénateurs) et surtout des directeurs de l'action sociale. Si les représentants du peuple ne bougent pas pour défendre les droits des citoyens, pour quelle raison et pour quel rôle ont-ils été élus alors ? Nos interlocuteurs s'insurgent également sur les activités des directions de l'action sociale ouvertes dans les 48 wilayas. «Si les services de la DAS ont été créées uniquement pour distribuer le couffin du Ramadhan, ce n'est pas la peine», a indiqué M. Mourad. La situation de cette frange demeure désastreuse et la fin de leurs problèmes risque encore de perdurer.