Ce n'est pas la baisse du prix du baril qui va contraindre les travailleurs au silence social. Le constat a toujours été que les commerçants anticipent sur ces augmentations salariales et les répercutent sur les prix avant même que les salariés ne voient la couleur de l'argent supplémentaire qu'ils sont censés recevoir. L'UGTA avait raison de faire un zoom sur le pouvoir d'achat, mais le problème est qu'il s'était agi de discours non suivis d'effet. Nous n'arrêtons pas d'aborder le pouvoir d'achat sous l'angle des salaires. Depuis longtemps, les salaires sont également revendiqués sous l'angle social. Que de fois la question est posée par rapport à l'insuffisance de la prise en charge sociale. Longtemps, nous ne comprenions pas si l'UGTA dialoguait ou négociait. Parlait-elle de salaires uniquement, dialoguait-elle seulement, négociait-elle sur la base de nouvelles exigences à satisfaire, parlait-elle de pouvoir d'achat, du social ou des dividendes de la croissance à redistribuer ? A l'époque du régime socialiste (interdit à la révision comme système politico-économique), on occultait le chômage alors et les contraintes budgétaires. Les travailleurs récupéraient par le biais de la redistribution des bénéfices les supposés gains de productivité qu'ils étaient censés produire dans les entreprises. La privatisation de certaines activités (ou l'externalisation de celles-ci) ont affaibli le système de négociation sociale car l'UGTA n'avait pas intégré le secteur privé. La précarisation des emplois a beaucoup stressé les travailleurs et leurs familles. Faudrait-il intégrer dans les négociations salariales la probabilité que les travailleurs stressés tombent plus souvent malades et alourdissent la caisse de la sécurité sociale ? La question ne se pose pas de savoir comment fera le pouvoir pour satisfaire ces revendications, car les revendications sont pressantes et leur éventuelle non-prise en charge dangereuse pour la paix sociale, pour la paix tout court. A quel niveau plutôt de satisfaction parviendraient les négociations, si celles peuvent avoir lieu. On peut dire, aujourd'hui, que les travailleurs savent faire un lien entre les niveaux de salaires et le niveau minimum de pouvoir d'achat qu'ils accepteront. Le pouvoir d'achat est celui autour duquel s'articulent les guerres sociales. Quels sont les facteurs déclenchant l'explosion ? Quant à leurs revendications, les travailleurs considèrent qu'elles sont toujours légitimes, et que le gouvernement a pour mission d'en tenir compte, car sa propre existence est justifiée par sa mission de réunir les conditions pour satisfaire les revendications sociales, qui sont celles de l'emploi, du logement, du pouvoir d'achat, soit des défis pas facilement relevables dans un contexte où des retards se sont accumulés, que le niveau des revendications ne cesse pas de monter, qu'il y a impossibilité à créer des ressources nouvelles. On peut bien considérer que le gouvernement n'a pas réussi à satisfaire les aspirations socioéconomiques des populations, mais on ne peut pas dire qu'il ne veut pas le faire. D'ailleurs, il n'existe au monde aucun gouvernement qui ne voudrait pas satisfaire les besoins socioéconomiques des travailleurs, et même ceux des chômeurs. Ce sont des préoccupations constantes. Aucun doute là-dessus. Peut être faudrait-il reconsidérer les critères de représentativité des syndicats pour qu'un pacte social concerne tous les travailleurs et que s'établisse enfin une paix sociale, un apaisement notable sur le front social et que soit en conséquence durable la période de validité de la mobilisation de tous les efforts en vue de transformer le pacte social en pacte de croissance économique.