Pour le docteur en économie Abderahmane Mebtoul, l'Algérie a toutes les potentialités pour s'en sortir à conditions, insiste-t-il, d'adopter rapidement une stratégie de passage d'une économie de rente à une économie hors-hydrocarbures. Car, explique-t-il, «l'Algérie souffre d'une crise de gouvernance et non d'une crise financière». La situation économique actuelle que traverse le pays n'est pas semblable à celle vécue durant les années 80. Ce constat est celui de Abderahmane Mebtoul, qui était hier l'invité de la rédaction de la Radio Chaîne 3. «Il y a une différence notable entre la situation de 86 et celle d'aujourd'hui. En 86, l'endettement a commencé et on n'avait pas de réserves de change», a-t-il déclaré. Quelles stratégies doit-on opter pour éviter la banqueroute ? L'invité de la Chaine 3 préconise une feuille de route basée sur des réformes structurelles. «Il faut aller vers de profondes réformes structurelles. Plus on diffère les réforme plus on épuise les réserves de changes et cette crise de gouvernance risque de se transformer en crise financière», a-t-il averti. En plus des réformes financières, juridiques et éducatives, M. Mebtoul plaide en faveur de la création d'institutions qui collent à la réalité locale et recommande plus de moralité pour ceux qui dirigent la cité. «On ne peut pas demander des sacrifices, si il n'y a pas un minimum de moralité des dirigeants», a-t-il soutenu. Selon Abdrahmane Mebtoul, l'Algérie n'a pas intérêt à exploiter jusqu'à épuisement ses réserves de change. «Les réserves de change tiennent la valeur de la monnaie. S'ils seront de 10 milliards de dollars, la Banque d'Algérie sera obligée de dévaluer davantage le dinar», explique M. Mebtoul qui recommande un «endettement ciblé» pour le secteur productif qui servira à dynamiser le tissu productif. Revenant sur les transferts sociaux, l'économiste recommande «un système de péréquation professionnelle et régionale». Il faut aller vers un système de subvention ciblé qui profitera aux régions qui en ont réellement besoin et aux catégories défavorisées de la société. Cependant, M. Mebtoul indique que ce système ne peut pas être appliqué pour le moment, vu l'absence d'une cartographie sociale et régionale fiable. Tout en révélant qu'une cellule de réflexion est installée auprès du Premier ministre, il demande à l'ONS (Office national des statistiques d'«établir un modèle qui lie l'accumulation, la répartition et le modèle de consommation par couche sociale». Interrogé sur l'impact des mesures contenues dans le projet de loi de finances 2017, M. Mebtoul a qualifié l'augmentation de taxes de «mal nécessaire» tout en mettant en garde contre l'enclenchement d'un processus inflationniste. «Si vous dévaluez le dinar de 15% à 20%, il aura un impact, en cascade, de 40% sur le consommateur. Ce qui peut engendrer un processus inflationniste».