Dans l'entretien accordé à la Chaîne 3 de la radio algérienne dont il était, hier matin, l'invité de la rédaction, le professeur Chem Eddine Chitour, professeur de thermodynamique à l'école polytechnique d'Alger, a commencé par dire que selon toute vraisemblance, la réunion ministérielle des pays membres de l'Opep, qui s'est tenue mercredi à Vienne, parviendra à diminuer la production pétrolière mise sur le marché énergétique, autour d'un million de barils/jour. Il explique qu'il y a une épreuve de force entre l'Iran, l'Arabie saoudite et la Russie mais l'OPEP arrivera, selon lui, à ce plafond de 32,5 MBJ. Cela permettra à l'Algérie de gagner quelques dollars, 50-55 dollars, mais jusqu'à quand ?», s'interroge-t-il. Il fait remarquer que les accords sont fragiles et dans quelques mois, prévient-il, il se peut qu'on revienne à la case de départ. Il estime que la question à poser est de savoir s'il faut passer son temps à se tenir le ventre, et ne pas attaquer de front les vrais problèmes du pays. Pour lui, l'Algérie peut et doit trouver les moyens de rebondir et de sortir de la malédiction de la rente. Il appelle à faire un état des lieux sur le potentiel en ressources énergétiques fossiles et ce qu'il y a en potentiel hors énergies fossiles, et ce que nous faisons en ce moment. Ensuite, explique-t-il, tracer un modèle énergétique opérer un changement de paradigme, c'est avoir une nouvelle façon de voir l'avenir, et la question fondamentale, avance-t-il, est de savoir comment agir pour réaliser, d'ici à 2030, une transition énergétique impliquant tout le monde. L'Etat, appuie-t-il, ne peut plus et ne doit plus décider tout seul. Si l'on veut que les décisions soient appliquées sur le terrain, il est important que les citoyens en soient partie prenante. Il avoue ne pas connaître le modèle énergétique 2030 dont on parle. Il évoque le document préparé du temps de Chakib Khelil, qui mentionnait 22 000 mégawattts. Il estime qu'il faut revoir et valider avec les chiffres du réel et avec un mode opératoire. Il constate que la part des énergies renouvelables est insignifiante. Il cite l'exemple de Cuba où Fidel Castro a fait une révolution énergétique. Le Pr Chitour appelle à faire une campagne d'explication pour former l'éco-citoyen de demain. Cela n'est pas fait, dit-il. Il faut, estime-t-il, se poser la question de savoir comment aller vers cette transition, sachant que le plus grand gisement de l'Algérie repose en premier lieu sur les économies d'énergie. Il fait observer à titre d'exemple que l'économie de 20% des 50 millions de tonnes consommés sous forme de carburant et d'électricité, annuellement en Algérie, ce sont 10 millions de tonnes, cela permettrait, assure-t-il, de gagner cinq fois plus que ce que nous essayons d'obtenir en marchandant à l'OPEP. Il fait également remarquer que l'essence importée à 1 dollar est revendu à 0,2 dollar, c'est l'Etat qui paie la différence, c'est normal, ajoute-t-il, qu'il y ait du gaspillage. Il rappelle à ce propos la part du gasoil dans la consommation de carburant, alors que les autres pays l'interdisent. Pour le professeur Chitour, le déficit financier de l'Algérie, qu'il chiffre à 20 milliards de dollars, est le résultat de la politique de subventions, dont il affirme que 80% profitent aux classes aisées. Le pays est entré dans la crise et, prévient-il, se trouve dans une année charnière, avec ce qui reste comme réserves de change, il nous faut, insiste-t-il, prendre des décisions courageuses, savoir ce que nous devons faire et par quels moyens nous pouvons y arriver, en protégeant les couches sociales à faible pouvoir d'achat. Pour le programme des énergies renouvelables, il souhaite que l'Algérie s'arrime aux locomotives que sont la Chine et l'Allemagne dans ce domaine. Quelle est la part des énergies renouvelables ? Il fait observer que l'Algérie a 250 sources géothermiques qui ne sont pas valorisées.