Le Pr Chems Eddine Chitour a, encore une fois, appelé à la mise en place, en urgence, d'une stratégie énergétique. Cette stratégie, selon lui, doit passer par l'élaboration d'une nouvelle vision devant reposer sur la connaissance et le savoir-faire internes. Or, déplore-t-il, «l'économie de la connaissance en Algérie est aujourd'hui en panne». Pour le professeur Chitour qui animait, hier à Alger, une conférence intitulée «Une transition énergétique pour le développement en Algérie : le rôle du système éducatif», le système éducatif devrait ainsi être partie prenante pour réussir toute politique permettant au pays d'aller vers une transition énergétique qui repose sur le renouvelable. «Le pic pétrolier a été atteint pour l'Algérie qui doit penser à amorcer une stratégie nationale de transition énergétique vers les énergies renouvelables», a insisté le professeur, selon qui, le modèle énergétique actuel de l'Algérie, qui repose sur l'exploitation et l'exportation des énergies fossiles, ne sera plus tenable d'ici quelques années. À partir de 2030, il faut absolument de nouvelles ressources énergétiques et «c'est le renouvelable qui doit remplacer le fossile», dira-t-il. L'Algérie, tient-il à souligner, n'a investi que 0,01% dans les énergies renouvelables, tandis que la consommation énergétique nationale reste dominée, à hauteur de 99,99%, par les énergies fossiles. Toujours critique à l'égard de la politique énergétique en vigueur, le professeur a déploré la «cadence effrénée» de l'exploitation du sous-sol algérien. «Nous produisons actuellement l'équivalent de 50 millions de tonnes/an en pétrole et 85 à 90 milliards de m3/an de gaz. Pourquoi extraire du sous-sol plus que ce qui est nécessaire pour les besoins du pays ? Pour avoir des dollars et les mettre dans des banques américaines ou ailleurs ?», s'est-il interrogé. De l'avis du Pr Chitour, cette politique n'est pas bénéfique pour le pays. «Elle compromet dangereusement la transition énergétique du pays», a-t-il alerté. «La meilleure banque de l'Algérie est son sous-sol, car, explique-t-il, le prix du pétrole ne fera que croître. Un baril à 100$ aujourd'hui va coûter 200$ dans 10 ans.» Pour ce qui est de l'exploitation du gaz de schiste -sujet à polémique- le professeur Chitour pense que cette option doit être bannie, du moins à moyen terme. Il a précisé toutefois qu'elle ne peut être économiquement et technologiquement viable qu'après 2030. D'où la nécessité de s'y préparer dès maintenant en développant un savoir-faire et une technologie propres à l'Algérie pour pouvoir exploiter le gaz de schiste sans compromettre l'environnement et les nappes phréatiques. Ainsi, aux yeux du Pr Chitour, la transition énergétique doit reposer sur le développement des énergies renouvelables mais aussi sur l'économie d'énergie. Et pour rationaliser la consommation de l'énergie, il est indispensable, selon lui, d'aller progressivement vers la «vérité» des prix de l'énergie, et opter pour des subventions ciblées. Car pour lui, aujourd'hui, les subventions profitent à 80% aux classes aisées. B. A.