Avec l'arrivée de Trump à la Maison Blanche, relevons toutefois quelques nouvelles récentes et importantes, évidemment passées sous silence dans la bonne vieille presse. Selon un journal libanais (donc non confirmé), le Donald aurait qualifié Assad d' «homme courageux combattant le terrorisme» lors d'une conversation avec le président égyptien Sissi. Si c'est vrai, les Saoudiens doivent en perdre leur djellaba... Plus sérieusement, c'est un exemple éclairant de la complexification de la refonte des relations internationales à laquelle nous commençons à assister : Trump «aime» Assad, Trump aime Israël (discussions sur le déménagement de l'ambassade US à Jérusalem), Assad et Israël se détestent. Vous avez dit nœud gordien ? La délicieuse Tulsi, elle, ne se met pas martel en tête. A la stupéfaction de la volaille médiatique états-unienne, elle vient de passer quatre jours en Syrie et a osé rencontrer «le monstre». A son retour, pas repentante pour un sou, elle a doublé la mise sur la nécessité de voter le Stop Arming Terrorist Act avec cet argument de simple bon sens : «Beaucoup de Syriens m'ont demandé pourquoi Washington et ses alliés soutiennent les groupes terroristes alors que c'est Al Qaïda qui a attaqué les Etats-Unis le 11 septembre, pas la Syrie. Je ne pouvais rien leur répondre... » La nouvelle administration débat d'ailleurs de la possibilité de placer les Frères musulmans sur la liste des organisations terroristes. Si tel est le cas, c'en est fini de la rébellion modérément modérée dont l'un des piliers est Ahrar al-Cham, groupe frériste syrien (l'autre étant, comme chacun sait, Al Qaïda). Quant au Qatar, il a du souci à se faire... Sans surprise, le nouveau conseiller à la Sécurité nationale, le général Michael Flynn, pousse en ce sens. Plus étonnant, le sénateur Ted Cruz, pourtant généralement dans le camp néo-con, a déposé un projet de loi semblable (où l'on voit que la grande recomposition touche également le spectre politique américain). Evidemment, le Deep State (état profond) s'oppose à cette décision qui saboterait l'instrumentalisation du fondamentalisme sunnite ayant fait les grandes heures du système impérial US. L'Etat profond, justement. Il n'a pas dit son dernier mot... Des sénateurs préparent un autre projet de loi, visant celui-là à empêcher Trump de lever les sanctions contre la Russie ! Sera-t-on surpris de trouver parmi ces bonnes âmes les habituels suspects, McCainistan en tête ? Revenons un instant au Moyen-Orient où Erdogan, éternel électron libre et spécialiste d'entre les spécialistes des retournements de veste, semble prendre une nouvelle direction en remplaçant lentement mais sûrement l'islamisme par... l'erdoganisme. Somme toute, la chose est très logique si l'on considère que les évolutions extérieures se traduisent invariablement sur la scène intérieure. Les bisbilles avec les Saoudiens - qui étaient même vraisemblablement au courant du putsch de juillet sans en avertir Erdogan -, le raccommodement avec Israël (juin) et le lâchage partiel de la rébellion syrienne au profit de la réconciliation avec Moscou, ont jeté les soutiens islamistes du sultan dans un grand trouble. L'assassinat de l'ambassadeur russe à Ankara en décembre est d'ailleurs symptomatique de cette incompréhension grandissante face à ces recompositions interne et externe. (Suite et fin)