Jean-Luc Mélenchon : Haro sur le tribun qui parle beaucoup mais bien, subjugue le peuple, et que d'aucuns accusent, s'il est élu, de mener la France à la ruine. Durant un discours de près de deux heures, le candidat de la France insoumise a visé François Fillon, « tellement mauvais qu'avec sa paie il n'arrive pas à faire des économies ». D'un tir trois coups bien ajusté, ciblant le trio de tête dans la multitude des sondages, Emmanuel Macron, à qui il recommande d'être « poli », Marine Le Pen, ou encore François Fillon, il a gagé, « Si vous élisez ces trois-là, vous allez cracher du sang ». En réponse au président de la principale organisation patronale, Pierre Gattaz, pour qui « le vote Mélenchon, c'est la ruine du pays », et au journal conservateur, Le Figaro, qui a titré à (sa) Une de mercredi dernier « Mélenchon : le délirant projet du Chavez français », un brin moqueur, le député européen leur a répliqué et a suggéré à ses militants « de ne pas les huer mais de rigoler parce que c'est tout ce qu'ils méritent ». Lorsqu'il était à peine visible dans le rétroviseur, Jean-Luc Mélenchon a échappé aux attaques. Aussitôt que les sondages l'ont placé dans le quator de tête, dépassant même le candidat de Les Republicains, que tout à coup il est la cible des tirs croisés de l'ensemble des autres candidats en lice, et même de François Hollande. Astreint à la réserve et devait logiquement ne pas s'immiscer dans la campagne, le président est sorti de sa torpeur et a fustigé, quelques heures avant le fameux meeting lillois, l'insoumis le plus connu de France, considérant qu'« il y a un péril face aux simplifications, face aux falsifications, qui fait que l'on regarde le spectacle du tribun plutôt que le contenu de son texte ». Depuis un moment, celui qui, sans être naïf ni dupe, prône la paix dans le monde et plaide pour « un axe de paix entre la France et les pays de la rive sud de la méditerranée », ne fait que grimper dans les intentions de vote. Sa dynamique ascendante inquiète tous les conccurents au sommet de l'affiche. Il grapille quelques voix à droite et, de façon marginale, à l'extrême droite, quelques unes d'autres encore chez Emmanuel Macron, mais dépouille litteralement son rival de gauche, Benoît Hamon, qui devrait battre le reccord du plus modeste score qu'un candidat socialiste ait obtenu aux présidentielles. Maximilien Ilicth Mélenchon ( en référence à Robespierre et Lénine ), comme le surnomme le journal de Serge Dassault, a compris et corrigé les erreurs des campagnes passées. Lui-même l'admet volontiers, il n'est plus « la grande gueule » d'antan. Moins impétueux, il dit s'être assagi et ses envolées coléreuses ont laissé place à une fougue oratoire et une faconde dignes des grands orateurs de la Grèce antique. Ses amis comme ses pires adversaires en conviennent sur la qualité de la campagne du candidat de la France insoumise. Ce dernier a donné, au fur et à mesure de ses meetings et de ses sorties médiatiques, une hauteur à cette campagne inédite qui n'en finit pas par ailleurs de voler au ras des pâquerettes, mais dont il a, lui, poussé les limites sur le plan de l'innovation technologique [ il est en meeting à Lyon, dédoublé en hologramme à Aubervilliers, près de Paris ]. Jean-Luc Mélenchon est partout. Meetings, réseaux sociaux, chaîne Youtube, webradio, Caravanes insoumises, aucun support de communication n'échappe à l'équipe de campagne la plus dynamique de l'histoire des élections présidentielles françaises. Victime du vote utile en faveur de François Hollande, en 2012, cette fois-ci aucun obstacle ne se dresse désormais devant « le tribun rouge peint en vert », comme le qualifient certains éditorialistes de la place parisienne. Avec « L'Avenir en commun », un programme en parfaite adéquation avec la France insoumise et qui répond aux aspirations de cette majorité contestataire et laissée pour compte, que même les économistes, estampillés libéraux, approuvent et le jugent tenir la route, Jean-Luc Mélenchon est une hypothèse avec laquelle il faut désormais compter. Crédité de 18 % d'opinions favorables, il est parti pour être l'énième surprise de cette élection. Dans ses meetings, Jean-Luc Mélenchon s'adresse aux petites gens. Il leur réclame, récurremment, de prendre le pouvoir et, a-t-il insisté dans le bassin minier nordiste, naguère bastion socialiste, « Allez les gens, secouez-vous un bon coup, cette fois-ci ça va le faire.» À l'opposé, aux riches le possible futur président de la République francaise leur dit sans ambages qu'« ils s'en aillent tous ».