Dominée par le débat autour des turpitudes d'une certaine classe politique, lorsque la France se regarde et fonde l'espoir d'un scrutin réussi. Le compte à rebours de l'élection présidentielle française est désormais lancé. Profitant du long week-end de pâques et pour séduire davantage d'électeurs et convaincre le tiers d'indécis, les candidats ont multiplié les meetings et les sorties médiatiques. D'un autre côté, les instituts de sondages, eux, restent perplexes face au brouillard qui rend aléatoire toute prédiction des deux finalistes. D'ordinaire, à moins d'une semaine de l'échéance, les intentions de vote auraient dû se cristalliser et les sondages donner des indications plus ou moins éclairantes sur le duo de tête assuré d'accéder au second tour. Cette fois, les prévisions sont entourées d'un flou total. Du coup, ni les études d'opinion encore moins ceux qui les commentent ne risquent de se tromper puisqu'incapables d'émettre un quelconque pari sur ce que devrait être l'expression des suffrages au soir du premier tour. A l'instant même, prévisionnistes et analystes sont d'avis et accordent du crédit au principe d'une élection à quatre favoris qui se jouerait dans un mouchoir de poche, au regard du tassement de Marine Le Pen et de Emmanuel Macron, mais aussi du léger mieux dont bénéficie François Fillon et de la dynamique soudaine en faveur de Jean-Luc Mélenchon. Celui qui, imprévisiblement, est venu troubler le confort sondagier dans lequel le trio de tête s'est installé depuis des semaines. S'en est fini donc de cet épisode de la campagne dans lequel Marine Le Pen jouait le rôle principale. L'on l'entend de moins en moins. Tout porte à croire que les redondances dans ses discours, exclusivement tournés vers le rejet de l'autre et jetant l'anathème sur l'immigration, ont fini par lasser. Celles-ci démontrent la vacuité de son programme et ont montré par ailleurs, et selon ses détracteurs, les limites d'une candidate sans stature de femme d'Etat, en tout cas, insistent les anti-fascistes, sans réelle capacité à incarner la France de demain. Chez les fans, l'ambiance est morose, la tendance est à la désillusion. Cette analyse confuse des sentiments de l'opinion qui fait planer le doute et perdurer le suspense a conduit à l'abandon de la certitude que François Fillon allait faire de la figuration. Pendant un temps, l'irruption des affaires dans sa campagne a plombé le candidat de la droite. Mais, après s'être appuyé non pas sur son socle traditionnel, mais sur les plus chauvins d'entre ses partisans, les traditionalistes purs et durs de Sens Commun en l'occurrence, au profit desquels, en retour d'ascenseur, il réserve des portefeuilles ministériels, François Fillon a non seulement réussi la gageure de dissuader son camp de lui substituer un plan B, mais aussi à faire occulter ses déboires judiciaires et installer sinon dans l'esprit de l'opinion tout au moins dans l'aile radicale de son camp que la victoire est encore possible. « J'ai entendu cette foule qui veut en finir avec l'échec, je sens cette force qui va et qui s'accroît, qui monte en puissance et qui n'attend que de stupéfier les prétendus faiseurs d'opinion par sa détermination », aime-t-il à répéter dans ses appels urbi et orbi pour un rassemblement autour de sa candidature. Et ces implorations de chef de paroisse semblent porter leur fruit puisque certains électeurs, originellement de droite, ont tendance à retourner au bercail. Les derniers sondages relèvent, semble-t-il, ce retournement inespéré de la situation. Le cas Emmanuel Macron est inédit dans la V République. Voilà un candidat dont on disait il y a peu que son aventure allait s'arrêter aussi vite qu'elle est apprue se révèle avec le temps un redoutable trouble-élections, en capacité de briguer la magistrature suprême française. Est-on convaincu finalement que Emmanuel Macron a toutes ses chances de l'emporter. Par une campagne qui restera dans les annales, Jean-Luc Mélenchon enfin, a-t-il, en dépit d'une malhonnêteté intellectuelle sans commune mesure dont a fait preuve une certaine presse conservatrice pour décrypter son programme, pu troubler importunément un ordre presque établi pour faire figure de potentiel gagant ? La reponse vient de son dernier meeting de Toulouse. Des dizaines de milliers de partisans sont venus acclamer le tribun. Si l'issue de ce scrutin présidentiel demeure un grand mystère aux yeux de tous, à tout le moins s'offre aux français un large panel de projets, allant du plus extrémiste à la synthèse et pro-européen en passant par l'austère [et écoutez ce que je dis, oubliez ce que j'ai fait ], ou encore celui de l'intelligence collective au service du bien commun dans une France diverse et tolérante.