Les citoyens birmans de confession musulmane, un million d'habitants, victimes de violences menées par l'armée contre leur communauté, sont dans l'attente d'une adresse à la nation prévue mardi prochain par la dirigeante du pays, Aung San Suu Kyi, qui, a-t-on dit, «parlera de réconciliation nationale et de paix». L'annonce a été faite par M. Zaw Htay, porte-parole de la responsable birmane, au moment où le Conseil de sécurité de l'ONU a réclamé à la Birmanie «des pas immédiats» pour faire cesser une «violence excessive» dans l'ouest du pays contre la minorité musulmane Rohingyas. Critiquée pour ne pas avoir réagi au drame frappant les musulmans birmans, Mme Aung San Suu Kyi, qui vient d'annuler un déplacement pour l'Assemblée générale de l'Onu débutant la semaine prochaine, a déclaré qu'elle «sortirait publiquement prochainement de son silence». Plus de 379 000 Rohingyas se sont réfugiés Bangladesh, pays limitrophe de la Birmanie, depuis fin août pour fuir une campagne de répression de l'armée birmane. L'ONU considère que les Rohingyas établis à Rakhine (Ouest) sont victimes d'une «épuration ethnique». Cette communauté souffrant de la dégradation de leur situation humanitaire continue de fuir l'horreur engendrée par la flambée de violences depuis fin août. Ainsi, les Rohingyas sont contraints de fuir, par milliers, vers les frontières bangladaises, arrivant souvent affamés, mutilés et blessés par balles mais aussi par des mines antipersonnel utilisées par l'armée birmanes, ont rapporté des médias, citant des témoignages de personnes rescapés. Une situation qui n'a pas laissé le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, indifférent. «J'appelle les autorités de Birmanie à suspendre les activités militaires et la violence et à faire respecter la loi», a déclaré M. Guterres. S'agit-il de nettoyage ethnique ? «Quand un tiers de la population Rohingya doit fuir le pays, pensez-vous pouvoir trouver un meilleur mot pour décrire» la situation ?, a-t-il répondu à un journaliste. M. Guterres a, à la même occasion, insisté sur «la nécessité de faciliter l'aide humanitaire dans l'Etat Rakhine (aussi appelé Arakan)». Traités comme des étrangers en Birmanie, un pays à plus de 90% bouddhiste d'Asie du Sud-Est, les Rohingyas sont, a-t-on dénoncé, «victimes de multiples discriminations: travail forcé, extorsion, restrictions à la liberté de mouvement et confiscation des terres». Par ailleurs, dans une lettre ouverte au Conseil de sécurité, une dizaine de prix Nobel ont appelé les Nations unies à «des actions audacieuses et décisives». «Nous vous demandons d'agir immédiatement pour faire cesser les attaques militaires aveugles sur des civils innocents», a indiqué le texte signé entre autres par le Bangladais Muhammad Yunus, la Pakistanaise Malala Yousafzai et le Sud-Africain Desmond Tutu. Pour sa part, le Premier ministre canadien Justin Trudeau, a exprimé ses «profondes préoccupations quant à la situation des musulmans rohingyas» lors d'une conversation téléphonique avec Mme Suu Kyi. Il l'a enjoint à «mettre fin à la violence» et à «assurer la protection des civils». Quant à l'Ong Human rights watch, elle s'est attendue à des «décisions substantielles» qui seraient prises par le Conseil de sécurité, notamment un embargo sur les armes en Birmanie.