L'ex-président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Saïd Sadi, a estimé que la transition démocratique reste la formule la plus crédible et la plus viable. Comparée, dit-il, aux bricolages de structures provisoires qui se profilent, et qui ont été éprouvées avec les résultats que l'on sait dans le passé, ou aux tentations des coups de force dont le pays ne s'est jamais remis. «Des propositions ont été avancées pour une transition démocratique consensuelle. La voie est étroite mais il n'y a pas d'autre issue», a indiqué Said Sadi sur sa page facebook. Réagissant à l'appel de l'application de l'article 102 de la Constitution, lancé mardi, par le général de Corps d'Armée, chef d'état-major de l'ANP, Vice-ministre de la Défense, Ahmed Gaïd Salah, le fondateur du RCD considère que sur le fond, et quelles que soient les raisons qui l'ont inspirées, cette sortie est inopportune car elle risque d'entraîner l'armée dans une spirale qui la mettrait en première ligne face au peuple. «Or, fondamentalement, l'impasse algérienne n'est que la conséquence de la militarisation de la vie politique», écrit-il. Le recours à l'article 102, grave en la forme et en son fond, rappelle Said Sadi, implique le transfert du pouvoir au président du Conseil de la nation jusqu'à l'élection présidentielle, ce qui revient, dit-il, à enfermer la dynamique citoyenne qui a mobilisé des millions d'Algériens pour le changement radical dans des structures et des mécanismes obsolètes et condamnés par des marches historiques qui ont suscité l'admiration du monde. «La révolution citoyenne en cours impose de voir la réalité en face. On ne peut pas sauver le régime et l'Algérie», poursuit-il. Les artifices juridiques et administratifs propres à un régime moribond, observe-t-il, ne sont plus de mise dans un moment de vérité historique qui appelle au courage et à l'innovation pour engager un processus politique nécessairement extérieur aux us et pratiques qui ont conduit à la situation actuelle. Samir Bouakouir, ancien cadre du Front des forces socialistes ( FFS) a, pour sa part, estimé que l'appel de Gaid Salah à la destitution de Bouteflika est une tentative de coup de force contre la révolution démocratique du 22 février. «Dépassés par l'ampleur de la révolte populaire, les chefs militaires, en sacrifiant Bouteflika, espèrent contenir un mouvement populaire d'une ampleur sans précédent pour en réduire la portée historique», écrit-il sur sa page facebook. Pour Samir Bouakouir, la pseudo-solution constitutionnelle, à travers l'application de l'article 102, préconisée par Gaid Salah au nom de l'Armée trahit une volonté de garder la haute main sur les futures échéances. «Comment, en effet, ne pas voir dans cette réaction autoritaire une volonté de l'élite militaro-sécuritaire de maintenir sa position hégémonique et de contrarier l'exigence populaire pour une rupture radicale ?», s'interroge-t-il. Alors que le peuple tendait sa main pour amorcer ensemble une dynamique historique de reconstruction de l'Etat national, poursuit-il, la hiérarchie militaire, nourrie de vieux réflexes putschiste de l'armée des frontières, tourne encore une fois le dos aux aspirations populaires. «Proposer un simple changement de façade civile, par le biais d'un nouveau processus électoral biaisé, alors que les Algériennes et les Algériens réclament l'exercice de leur droit inaliénable à l'autodétermination est un violent affront politique qui n'a d'égal que le profond mépris voué par Bouteflika à son peuple», considère-t-il. Pour cet ancien cadre du plus vieux parti de l'opposition, les chefs militaires, en particulier les officiers intègres, doivent rapidement se raviser et prendre enfin la mesure de la détermination populaire. «Faire aujourd'hui l'impasse sur une transition démocratique et l'élection d'une Assemblée constituante, c'est opter pour le pire et prendre le risque de plonger le pays dans le chaos».