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Situation socioéconomique, politique et perspectives de l'Algérie 2020/2030
Publié dans La Nouvelle République le 10 - 10 - 2019

L'Algérie traverse une crise politique sans précédent depuis l'indépendance politique avec les risques d'aller vers une cessation de paiement fin 2021 début 2022 avec des incidence à la fois très graves sur le plan économique, social, politique et des impacts géostratégiques au niveau de la région africaine et méditerranéenne. Le système politique héritée depuis l'indépendance, 1963/2019 tissant des liens dialectiques entre la rente et les logiques de pouvoir, trouve ses limites naturelles, incapable de résoudre les nouveaux problèmes auxquels est confronté le pays, les replâtrages accentuant la crise.
Les études internationales montrent que l'Algérie avec ces dépenses en référence aux pays de la région Mena qui ont des résultats supérieurs avec trois fois moins de dépenses : corruption, surfacturation ou mauvaise gestion des projets.
- Sixièmement, déraper le dinar pour ne pas dire dévaluation (inflation importée) pour augmenter à la fois la taxe hydrocarbures (reconversion du dollar en dinar dévalué passant par exemple de 118 dinars un dollar à 125) et la fiscalité ordinaire (par exemple 138 dinars un euro à 150, la taxe s'appliquant au dinar au port), ce qui constitue un impôt indirect supporté par le consommateur ou l'entreprise pour les entrants importés, réduisant son profit net ou le répercutant sur le consommateur.
- Septièmement, augmenter la TVA sur les produits, solution de facilité, l'impôt indirect étant injuste par définition, l'impôt direct étant le signe d'une plus grande citoyenneté. Enfin huitièmement recours ultime, puiser dans les réserves de change.
1.3- Cette situation socio-économique renvoie aux indicateurs globaux et dans ce cadre, il est intéressant de se référer au classement annuel du The Global Competitiveness Report, du World Economic Forum (WEF), qui concerne les contraintes du milieu des affaires et l'efficacité économique dans le monde, établi sur la base d'une centaine d'indicateurs quantitatifs émanant des Etats membres et des organisations internationales (Banque mondiale, FMI, UIT, CCI, Unesco…) ainsi que d'enquêtes qualitatives réalisées par le WEF lui-même. Pour rendre possible l'agrégation de données hétérogènes, tous les résultats sont convertis sur une échelle de notes de 1 à 7. Ces 110 notes sont ensuite regroupées en 12 catégories appelées «piliers», eux-mêmes répartis entre grands «sous-indices».
Dans son rapport de 2018, l'étude du WEF, réalisée auprès de 14 000 chefs d'entreprise de 137 pays fournit un classement mondial des pays les plus compétitifs. Pour établir le classement de compétitivité de l'Algérie, le Forum s'est basé sur 114 indicateurs regroupés dans les 12 catégories suivantes : l'Algérie est classée 88e, loin derrière le Maroc (49e position) et la Tunisie (80e position). Quant au niveau de corruption, (85e place), l'Algérie est très mal classée, la corruption étant le deuxième plus grand écueil qui se dresse sur le chemin des investisseurs. Pour la performance du secteur public, le pays arrive au 81e rang et en matière de sécurité il se trouve à la 54e place. L'indice de l'ouverture de l'économie algérienne à l'investissement privé, le classement est la 128e place, l'économie étant jugée trop peu diversifiée et l'initiative privée est l'une des moins compétitives du monde arabe.
Concernant les infrastructures, malgré d'importantes dépenses, l'Algérie est classée à la 93e place. Brièvement, nous avons le classement suivant : institutions : 88e rang ; infrastructures : 93e rang ; environnement macroéconomique : 71e rang ; santé/éducation : 71e rang ; enseignement supérieur et formation : 92e rang ; marchandises et efficacité du marché : 129e rang ; efficacité du marché du travail : 133e rang ; développement du marché financier : 125e rang ; état de préparation technologique : 98e rang ; taille du marché : 36e rang ; sophistication des affaires : 122e rang ; innovation : 104e rang. S'agissant des mesures incitatives à l'investissement, le pays se situe à la 98e position sur les 137 pays évalués, ce qui est une performance qui se situe dans la moyenne. Selon Bloomberg, l'Algérie, pour remonter son déficit budgétaire au titre de l'exercice 2019, «aurait besoin d'un baril de pétrole à 116,40 dollars, contre 95/100 dollars en 2017/2018», soulignant que «la production algérienne est restée relativement stable à environ 1 million de barils par jour.
Au vu des importantes dépenses la croissance tirée essentiellement par la dépense publique a été faible de 1,4% en 2018, contre 1,3% en 2017, selon le rapport de l'Office national des statistiques (ONS) et en valeur courante, le PIB est passé de 18 575,8 milliards de dinars en 2017 à 20259 milliards de dinars. En 2018, le déflateur du PIB a connu une hausse de 7,6% contre 4,7% en 2017 et par tête d'habitant, le Produit intérieur brut a atteint 4 080,7 dollars en 2018 contre 4 011,2 dollars en 2017.
Selon le rapport de la banque mondiale, dossier consacré aux perspectives économiques mondiales la croissance en Algérie devrait être de 1,7 % en 2020, l'assainissement des finances publiques pesant sur l'activité non pétrolière, alors que l'édition de janvier 2019 du rapport prévoyait une croissance de 1,8% en 2020 et 2021, cette projection ayant été abaissée de -0,1 point pour 2020 et de -0,4 points pour l'année 2021. Ce qui forcément entrainera un accroissement du taux de chômage souvent gonflé par les officiels incluant les emplois rentes et les emplois temporaires non productifs. La situation politique actuelle avec l'emprisonnement des oligarchies accentue ce taux à la hausse avec une baisse du taux de croissance alors que la population active est estimée à environ 12,463 millions fin 2018 pour une population totale au 01 janvier 2019 de plus de 43 millions d'habitants.
Le chômage touche près de 29/30% des jeunes et données importantes, les diplômés de l'enseignement supérieur, taux qui avait atteint, selon l'ONS, 17,6% au mois d'avril 2017 et en septembre 2018, 27,9%. Le taux d'emploi est fonction du taux de croissance des entreprises productives et des structures des taux de productivité, ne créant pas d'emplois par décrets ou en gonflant les emplois dans l' administration, les différents organismes d'emplois qui devraient être regroupés pour plus de cohérence, ayant eu un résultat mitigé.
2- La corruption, cancer de la rente a un impact négatif sur la société et le climat des affaires
2.1- Selon le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, qui surveille les télé-virements de fonds de plus de 10 000 $ en provenance de l'étranger, «Le Devoir» les chiffres des transferts effectués depuis l'Algérie uniquement vers le Canada entre janvier et juillet 2019, ont été plus de 78,6 millions dollars. Selon le quotidien québécois, Selon les analystes, du fait de a crise politique en Algérie, c'est de l'argent des «dirigeants, de compagnies ou de particuliers qui, craignant la chute de la devise nationale qui «cherchent à protéger la valeur de leurs avoirs dans une monnaie plus forte et plus stable» Qu'en est-il des transferts vers d'autres pays démontrant que la crise actuelle porte un coup fatal à l'économie et que les règles économiques sont insensibles aux slogans politiques.
Selon la majorité des experts internationaux, la majorité des institutions administratives et économiques sont concernés par ce cancer de la corruption. L'on sait que les auteurs de l'IPC considèrent qu'une note inférieure à 3 signifie l'existence d'un «haut niveau de corruption, entre 3 et 4 un niveau de corruption élevé, et que des affaires saines à même d'induire un développement durable ne peuvent avoir lieu, cette corruption favorisant surtout les activités spéculatives. La sphère informelle produit des dysfonctionnements du système, ne pouvant pas la limiter par des décrets et lois mais par des mécanismes de régulation transparents, existant des alliances entre le pouvoir bureaucratique et cette sphère contrôlant plus de 40% de la masse monétaire en circulation, alliances qui favorisent cette corruption qui tend à se socialiser. Selon le classement de Transparency International de 2003 à 2018, l'Algérie connait une corruption élevée où en 2018, elle a eu la note 3,5 et 105ème place sur 168 pays.
Ces indicateurs renvoient à l'urgence de lutter contre les transferts illicites de capitaux à travers les surfacturations. Devant différencier acte de gestion pratiques normales de la corruption, afin d'éviter la démobilisation des managers, les services de sécurité et les différents organisâmes de contrôle devant vérifier l'origine de ces montants de transferts illicites de devises, l'objectif stratégique est d'établir la connexion entre ceux qui opèrent dans le commerce extérieur soit légalement ou à travers les surfacturations et les montants provenant essentiellement d'agents possédant des sommes en dinars au niveau local légalement ou illégalement, non connectés aux réseaux internationaux.
Il s'agira par une analyse objective, de quantifier sérieusement ces transferts illicites de devises qui portent atteinte à la sécurité nationale, d'où l'urgence d'une nouvelle régulation de l'économie nationale, de quantifier objectivement l'impact de l'écart d'environ 50% entre le cours du dinar sur le marché parallèle et la cotation officielle du dinar algérien. Les subventions généralisées et sans ciblages permettent le trafic des marchandises aux frontières, avec des connexions avec le terrorisme via la drogue Il ne faut pas se tromper de cibles, devant différencier stratégie et tactiques pour paraphraser le langage des stratèges militaires, existant souvent une confusion entre les sorties de devises résultant des importations de biens et services d'environ 700 milliards de dollars entre 2000/2018 selon les statistiques du gouvernement et le total des dépenses d'environ 1100 milliards de dollars (document officiel du FMI, budget équipement et fonctionnement (constitué en grande partie de salaires).
Il s‘agit de différencier les surfacturations en dinars (pour des projets ne nécessitant pas ou peu de devises) des surfacturations en devises, existant deux sphères d'agents ceux reliés uniquement au marché interne (dinars) et ceux opérant dans le commerce extérieur (devises), ce processus se faisant en complicité avec les étrangers, bien que certains agents économiques opèrent sur ces deux sphères. Prenons l'hypothèse d'un taux de 15% de surfacturation, ce n'est qu'une hypothèse, étant plus facile pour les services où certaines surfacturations peuvent atteindre plus de 20%.
Les sorties de devises de biens et services entre 2000/2018, étant estimées à environ 700 milliards de dollars, cela donnerait un montant total de sorties de devises de 105 milliards de dollars sans compter la période 1970/1999 où bon nombre d'estimations contradictoires ont été données avec des montants faramineux ramenés au pouvoir d'achat 2019. Ces transferts illégaux de devises ne datent pas d'aujourd'hui, devant ramener pour des comparaisons sérieuse, la valeur du dinar qui est cotée en septembre 2019 à 119 dinars un dollar et en 1974 nous avions 5 dinars pour un dollar (fixation administrative), 45 dinars un dollar vers les années 1974/1975.
Ce montant serait plus important si les surfacturations étaient d'environ de 20/25% par rapport aux normes internationales. Malheureusement nous avons assisté à des discours creux populistes de ceux qui devaient donner l'exemple et dont les actions de justice actuelles ont montré qu'ils étaient guidés par leurs propres intérêts et leurs familles et non par les intérêts supérieurs du pays, ayant contribué à la dilapidation de l'Algérie. Des actions urgentes pour récupérer ces biens mal acquis tant au niveau national qu'international sont nécessaires pouvant également jouer comme tampon social. Mais il faut être réaliste. Si les transferts illicites de capitaux sont dans des paradis fiscaux ou en actions ou obligations anonymes, il sera difficile de les récupérer, concernant uniquement des biens ou placements réels tangibles tant en Algérie qu'à l'étranger en cas où l'Algérie a des accords internationaux avec certains pays où les procédures risquent d'être longues.
2.2- Comment lutter contre la corruption ?
Il faut se demander pourquoi le faible impact de la dépense publique entre 2000/2018, plus de 1100 milliards de dollars (part dinars et devises) sur la sphère économique et donc sur la sphère sociale. Les études internationales montrent que l'Algérie avec ces dépenses en référence aux pays de la région Mena qui ont des résultats supérieurs avec trois fois moins de dépenses : corruption, surfacturation ou mauvaise gestion des projets.
(A suivre)
Professeur des universités, Dr Abderrahmane Mebtoul ancien haut magistrat


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