J'ai lu avec attention le projet de loi de finances 2020 et analysé l'intervention de M. le ministre des Finances lors de sa présentation devant l'Assemblée populaire nationale (APN) le 06 novembre 2019. Il est important de signaler qu'une loi de finances ne fait que retracer les dépenses et les recettes annuelles de l'Etat, ne pouvant remplacer la planification stratégique qui fait cruellement défaut à l'Algérie : que sera l'Algérie horizon 2020/2030 tenant compte tant des mutations internes que mondiale toujours en perpétuel mouvement n'existant pas de situation statique. Je m'appesantirai dans cette brève contribution l'absence de vision stratégique de l'avenir de l'économie algérienne horizon 2030 et le manque de cohérence du PLF 2020, qui demande des éclaircissements pour l'opinion publique car engageant la sécurité nationale, devant pour être bien interprétée s'insérer, en dynamique, dans le cadre macro-économique et social. S'offrent plusieurs solutions dont je recense six: a-l'endettement extérieur ciblé pour les segments à valeur ajoutée tout en assouplissant la règle des 49/51% mais devant distinguer les segments stratégiques des segments non stratégiques historiquement datés ; -b-l'augmentation de la fiscalité ordinaire, mais risquant d'amplifier la sphère informelle qui contrôle selon les dernières données de la banque d'Algérie, environ de 33% de la masse monétaire en circulation, 35/40% de la population occupée servant de tampon social, et plus de 50% des activités hors hydrocarbures, amplifiée par la crise politique actuelle ; -c- l'augmentation de la production hydrocarbures pour augmenter la fiscalité pétrolière en baisse ; -d- la lutte contre la corruption et les surfacturations ; -d- puiser dans les réserves de change, la relance de l'appareil productif mais dont l'effet n'est pas immédiat , sous réserve d'une autre politique économique ; –e- le PLF2020 prévoit le dérapage du dinar , comme un des levier pour ne recourir au financement non conventionnel avec un taux de change de 123 dinars pour un dollar pour 2020, 128 DA/dollar pour 2021 et 133 DA/dollar pour 2022. Cela signifie accroire artificiellement la fiscalité pétrolière calculée en dollars et les importations d'équipements , de biens intermédiaires aux entreprises et de biens finaux destinés à la consommation des ménages fonction du cours euro/dollar, accélérant le processus inflationniste, la taxe à la douane s'appliquant à un dinar dévalué, qui jouera comme un impôt indirect. (pour toutes ces questions - Interviews du Pr Abderrahmane Mebtoul Expert international, directeur d'études Ministère Energie/Sonatrach 1974/1979-1990/1995-2000/2007-2013/2015, données à la radio française Beu Fm -Paris le 01/11/2019- à la télévision française arabophone France 24 Paris 03/11/2019- à Radio Algérie Internationale – Alger- le 04/11/2019. A la radio chaîne Trois- Alger-- et Radio France Internationale Paris le 05/11/2019 sur le bilan de l'économie algérienne, ses perspectives et le projet de loi des hydrocarbures). L'ensemble de ces données monétaires et financières doivent pour être bien interprétées s'insérer dans le cadre macro-économique et macro-social et toujours en dynamique. En effet, l'Algérie a besoin d ‘une vision stratégique qui fait cruellement défaut où selon les rapports internationaux, le pays risque de connaitre une profonde crise économique avec des répercussions sociales, voire politiques. Comme en témoigne le taux de croissance lié au climat des affaires où l'Algérie selon le dernier rapport de la banque mondiale 2019 est classée 157ème sur 190 pays, renvoyant à la mauvaise gouvernance, bureaucratie, corruption, système financier et système socio-éducatif non adapté , étant classée parmi les derniers pour l'innovation. Selon le FMI, le taux de croissance serait de 2,9% en 2019, 2,4% en 2020 et moins de 1% entre 2021/2024 en cas de paralysie de l'appareil productif dont la relance est fonction de profondes réformes structurelles, La banque mondiale étant plus pessimiste dans son rapport du 9 octobre 2019 avec 1,3% en 2019 et 1,5% pour 2020,( la PLF 2020 prévoyant 1,8%,). Le FMI prévoit un déficit budgétaire de 12,1 % du PIB alors que le PLF 2020 prévoit un déficit du budget de -1.533,4 milliards de dinars (12,99 milliards de dollars) (environ -7% du PIB) et un déficit du Trésor de -2.435,6 milliards de dinars – 20,6 milliards de dollars (-11,4% du PIB). donc de vives tensions budgétaires. Comment dès lors créer entre 350.000/400.000 empois par an qui s'ajoutent au taux de chômage actuel nécessitant un taux de croissance de 8/9% par an sur 5/10 ans pour éviter de vives tensions sociales? Cela a un impact négatif sur le taux de chômage avec une population de 43 millions d'habitants au 01 janvier 2019, une population active d'environ 12,5 millions où selon le FMI ,en raison du ralentissement du taux de croissance, dominée par l'impact de la dépense publique via la rente Sonatrach, en 2018, 11,7% de taux chômage, en 2019, 12,5%, en 2020 plus de 13,5% en 2021, ce taux ne tenant pas compte des emplois rente notamment dans l'administration plus de deux millions de fonctionnaires environ 2.279.555 postes plus de 2900 milliards de dinars ont été alloués à la masse salariale, qui a connu une hausse de 1430 milliards de dinars, par rapport à 2019. Comme le PLF2020 annonce que les transferts sociaux se sont élevés à 1798,3 mds de DA, soit 8,4% du PIB, du fait de la lourde pression de la CNR (Caisse nationale des retraites) sur le trésor un déficit structurel de 700 milliards de dinars que le Trésor continuera de soutenir, selon le ministre des finances , d'ici dix ans en attendant la réforme de ce système des retraites qui ser ale grand défi des années à venir avec le vieillissement de la population, moyenne d'âge des deux sexes selon le rapport de l'ONU, 2018, à environ 78 ans de durée de vie. En conclusion, nous avons un gouvernement transitoire, devant en principe gérer les affaires courantes, prenant des décisions incohérentes qui engagent l'avenir du pays, naviguant à vue, à vue. Le futur président de la république, et son gouvernement qui auront la légitimité populaire devront revoir le modèle de consommation énergétique, par exemple pour l'avant projet de loi sur les hydrocarbures, l'insérer dans le cadre d'une loi organique de la transition énergétique et de revoir la future politique économique dans le cadre d'une la planification stratégique liant efficacité économique et la cohésion sociale et surtout de résoudre la crise politique, grâce au dialogue productif, sans laquelle aucun investisseur sérieux ne viendra. C'est la résultante de l'imbrication du politique et de l'Economique en Algérie, ni économie étatisée, ni véritable économie de marché concurrentielle, étant toujours dans cette interminable transition depuis des décennies, produit de rapports de forces politiques et sociaux qui se neutralisent. Cela rend difficile une véritable régulation et une bonne gouvernance centrale et locale comme facteur d'adaptation aux nouvelles mutations mondiales, fondée sur le savoir, les nouvelles technologies et l'intelligence artificielle, vivant encore de l'utopie de l'ère matérielle des années 1970/1980, du fait du blocage culturel, bloquant ainsi l'approfondissement des réformes structurelles, condition sine qua non du développement durable de l'Algérie. Or l'Algérie acteur stratégique de la stabilité de l'espace méditerranéen et africain, recèle d'importantes potentialités, surtout humaines, pour surmonter la crise multidimensionnelle à laquelle elle est confrontée, pour peu que les intérêts suprêmes du pays l'emportent sur les intérêts étroits d'une minorité rentière. (Suite et fin) Dr Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international