Le Conseil des ministres a examiné le programme économique du Gouvernement le 30 août 2021, où la problématique a été le retour à la croissance afin d'atténuer les tensions sociales. La raison est le dépérissement du tissu productif où plus de 85% des entrants des entreprises privées et publiques proviennent de l'extérieur, ainsi qu'une grande partie de la consommation des ménages, la dévaluation du dinar induit un processus inflationniste qui se répercute également sur le pouvoir d'achat. Ainsi, la cotation du dinar est passée de 4,94 dinars un dollar en 1970 à 132 dinars un dollar en mars 2021 et à le cours d'achat officiel le 30 aout 2021 est de 135,2751 dinars un dollar et 159,5840 dinars un euro, le ministère des Finances projetant dans le PLF2021, une amplification de sa dévaluation, pour 2022, 149,32 DA pour 1 USD et pour 2023, 156,72 dinars pour 1 USD. La banque d'Algérie procède au dérapage du dinar par rapport au dollar et à l'euro, ce qui permet d'augmenter artificiellement la fiscalité hydrocarbures (reconversion des exportations hydrocarbures en dinars) et la fiscalité ordinaire (via les importations tant en dollars qu'en euros convertis en dinar dévalué), cette dernière accentuant l'inflation des produits importés, montant accentué par la taxe à la douane s'appliquant à la valeur dinar, étant supportée en fin de parcours par le consommateur comme un impôt indirect, l'entreprise ne pouvant supporter de telles mesures que si elle améliore sa productivité. 2.-Une nouvelle gouvernance et de profondes réformes doivent être menées pour relancer l'économie L'Algérie ne peut revenir à elle-même que si les faux privilèges sont bannis et les critères de compétences, de loyauté et d'innovation sont réinstaurés comme passerelles de la réussite et de la promotion sociale. Les réformes à venir doivent tenir devra tenir compte d'une révision de l'actuelle politique socio-économique, au niveau international notamment de la demande de révision par l'Algérie de certaines clauses de l'accord d'Association avec l'Europe, notre principal partenaire, dans le cadre d'un partenariat gagnant–gagnant – d'autres zones de libre-échange, notamment avec l'Afrique dont les échanges sont dérisoires à moins de 2 milliards de dollars, ne devant pas nous faire miroiter des utopies, supposant des entreprises compétitives (coût/qualité). Tout projet de société étant porté forcément par des forces politiques, sociales et économiques, les réformes étant fonction des rapports de force au niveau de la société et non au sein de laboratoires de bureaucrates déconnectés de la société. C'est pourquoi, il faut insister sur l'effort d'une information de vérité, accessible à toute la population, pour montrer l'opérationnalité de l'action gouvernementale au profit des générations présentes et futur Le défi 2021-2030 pour l'Algérie est la refondation de l'Etat, passant à un nouveau mode de gouvernance dont le fondement est la liberté au sens large pour une société participative et citoyenne, impliquant une réelle décentralisation autour de grands pôles régionaux. Les responsables algériens s'adapteront-ils à ce nouveau monde dynamique en perpétuel mouvement, dont il n'existe pas de modèle statique, ou vivront-ils toujours sur des schémas dépassés des années 1970-2000, conduisant le pays à l'impasse ? L'action gouvernementale doit définir clairement les objectifs stratégiques : comment se pose le problème ; quelles sont les contraintes externes (engagements internationaux de l'Algérie) ; quels sont les contraintes socio-économiques, financières et techniques internes ; quels sont les choix techniquement possibles et les ensembles de choix cohérents, et quelles sont les conséquences probables de ces choix ; quelles méthodes de travail choisir qui permettent de déterminer les paramètres (moyen et long terme) et les variables (court terme) dont dépend un système complexe... Après avoir décomposé la difficulté en éléments simples, il convient de se poser des questions et apporter des réponses opérationnelles, loin des théories abstraites, réalisations physiques et plan de financement sur chacun des éléments : Quoi ? Qui ? Où ? Quand ? Comment ? Combien ? Pourquoi ? Comment faire ? L'on devra distinguer dans la hiérarchisation les projets capitalistiques dont le seuil de rentabilité, si le projet est lancé en 2021, ne sera réalisable qu'à horizon 2028-2030, des projets moyennement capitalistiques, avec un seuil de rentabilité au bout de cinq années et des projets faiblement capitalistiques (PMI/PME) au bout de 2/3 années, mais devant tenir compte des nouvelles mutations mondiales qui seront dominées par ce que Jacques Attali nomme les «industries de la vie» : la santé, l'alimentation, l'écologie, l'hygiène, l'éducation, la recherche, l'innovation, la sécurité, le commerce, l'information, la culture ; et bien d'autres, ces segments étant capables d'augmenter leur productivité, et donc d'améliorer sans cesse leur capacité de satisfaire la demande sociale nouvelle, fonction de nouveaux comportements. Pour cet auteur, c'est donc en mettant tous les efforts sur les travailleurs et les industries de la vie qu'on sauvera les nations, les civilisations, et l'économie. Dans ce cadre, la structure de l'action en faveur des réformes est globalement formée de cinq segments qui fondent le processus opérationnel de mise en œuvre : l'administration qui constitue la cheville ouvrière par son importance stratégique ; la société civile/syndicats ; les citoyens dans leur diversité ; les partis politiques et les opérateurs publics et privés. C'est une entreprise d'envergure consistant principalement à réorganiser : Premièrement, le champ des partis politiques qui ont de moins en moins d'audience auprès de la société ainsi que la réforme des institutions centrales et locales impliquant la débureaucratisation, la numérisation étant une des solutions, et une réelle décentralisation autour de grands pôles économiques régionaux ; Deuxièmement, le système d'information avec la numérisation qui en ce XXIe siècle n'est plus le quatrième pouvoir mais le cœur du pouvoir même ; Troisièmement, réorganiser le mouvement syndical et associatif ainsi que la promotion de la femme, signe de la vitalité de toute société ; Quatrièmement, réformer la justice par l'application et l'adaptation du Droit, tant par rapport aux mutations internes que du droit international ; Cinquièmement, adapter le système éducatif, centre d'élaboration et de diffusion de la culture et de l'idéologie de la résistance au changement et à la modernisation du pays où la déperdition du primaire au secondaire et la baisse du niveau devient alarmant . Sixièmement, réformer le foncier agricole et industriel, du secteur de l'énergie avec le primat à l'efficacité énergétique et un nouveau modèle de consommation, dont un nouveau management stratégique de Sonatrach, lieu de production de la rente, pour plus transparence dans sa gestion ; Septièmement, réformer le système financier, un préalable essentiel à la relance de l'investissement public, privé national et étranger, les banques publiques et privées étant au cœur d'importants enjeux de pouvoir entre les partisans de l'ouverture et ceux de préservation des intérêts de la rente. En conclusion, pour réussir les réformes, l'Algérie a besoin de nouvelles intermédiations politiques, sociales, culturelles et économiques, loin des aléas de la rente. Afin d'éviter un affrontement direct entre forces de sécurité et citoyens en cas de malaise social, un regard critique et juste doit être posé sur sa situation, sur ce qui a déjà été accompli de 1963 à 2021, et de ce qu'il s'agit d'accomplir entre 2021-2030 au profit exclusif d'une patrie qui a besoin de se retrouver et de réunir tous ses enfants autour d'une même ambition, la sécurité nationale et le développement économique et social du pays. (Suite et fin) Abderrahmane Mebtoul Professeur des Universités