Aujourd'hui, 17 octobre, soixante ans sont passés depuis 1961, à Paris, capitale française, une des pires violations des droits de l'Homme dans l'histoire contemporaine, qualifiée de crime contre l'humanité par nombre d'historiens et de juristes, a été commise contre des émigrés algériens, hommes, femmes et enfants, sortis manifester pacifiquement pour protester contre une mesure discriminatoire qui leur imposait un couvre-feu, à eux seuls. Organisée par la Fédération de France du Front de libération nationale (FLN), la manifestation pacifique des Algériens a été réprimée dans le sang par la police française dirigée par le sinistre et criminel préfet de police de Paris, Maurice Papon, qui avait été aussi préfet de Constantine de 1951 à 1953. Dans la nuit du 17 octobre 1961 et durant les jours qui suivirent, la répression fut d'une extrême violence : manifestants arrêtés, torturés, entassés dans les bus parisiens réquisitionnés, et enfermés dans les commissariats et dans les stades, sans alimentation, ni couverture ; des Algériens furent tués par balles, assassinés dans la cour de la préfecture de police de Paris, jetés dans la Seine. Ce massacre, non encore reconnu officiellement par l'Etat français en tant que crime d'Etat, est considéré par nombre d'historiens comme la répression d'Etat la plus violente qu'ait jamais provoquée une manifestation de rue en Europe dans l'histoire contemporaine. L'historien et politologue français, Olivier Le Cour Grandmaison, a qualifié ces massacres de «crime d'Etat contre l'humanité», commis en vertu d'un «plan concerté» à l'encontre de civils qui furent «torturés et sommairement exécutés». Il a rappelé que «des contemporains, comme l'historien Pierre Vidal-Naquet et Paul Thibaud, dans le numéro de Vérité-Liberté de novembre 1961, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, entre autres, de la revue Les Temps modernes, avaient déjà une connaissance précise de ce qu'il s'était passé au mois d'octobre 1961 en général et lors de la soirée du 17 octobre en particulier» et «n'hésitaient pas, contrairement à certains aujourd'hui, à qualifier les faits de ''massacres'' perpétrés dans le cadre d'une ''terreur d'Etat'' mise en œuvre en Algérie et à Paris». Il a rappelé que la regrettée Nicole Dreyfus, avocate des militants du FLN, estimait «qu'il s'agissait, conformément à l'article 212-1 du Code pénal, d'un crime contre l'humanité exécuté en vertu d'un plan concerté à l'encontre de civils qui furent torturés, exécutés sommairement, noyés et parfois soumis à la disparition forcée». Pour Olivier Le Cour Grandmaison ces massacres, doivent être enfin qualifiés de façon précise par le président de la République française, et l'Etat, responsable et coupable, nommé comme tel, ajoutant que «cela vaut aussi pour le préfet de police, Maurice Papon, et ses supérieurs hiérarchiques, le ministre de l'Intérieur, Roger Frey, et le Premier ministre, Michel Debré». Une association française (association républicaine des anciens combattants, des combattants pour l'amitié, la solidarité, la mémoire, l'antifascisme et la paix, ARAC) a déjà exigé que les massacres d'Algériens du 17 octobre 1961 à Paris soient reconnus comme crimes de guerre par l'Etat français. Elle a également exigé le libre accès à l'ensemble des archives relatives à ces massacres. Le 17 octobre 1961, les Algériens n'ont pas été massacrés uniquement sur une simple décision du préfet de police Maurice Papon, mais certainement après le feu vert de la plus haute autorité de l'époque, soulignent les historiens algériens. Maurice Papon, fut un exécutant des ordres de la hiérarchie, outre sa haine profonde contre les Algériens. Ils notent qu'en mai 1945, Charles de Gaulle était le président du Gouvernement français provisoire et le premier décideur de la mise en marche de la machine des massacres et des tortures à Sétif, Guelma et Kherrata, et ils rappellent que ce fut également Charles de Gaulle, devenu président élu de la République française, qui ordonna le recours à la violence le 17 octobre 1961. Le crime contre l'humanité a été la caractéristique du colonialisme français. Bref rappel : les «enfumades» perpétrées par les généraux sanguinaires (Saint Arnaud, Pélissier, Cavaignac…) ; la répression des manifestations du 8 mai 1945 ; les lynchages commis par les racistes spécialistes des «ratonnades» ; les tortures et exécutions sommaires de patriotes algériens dont les corps ne seront jamais retrouvés…