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La vie capitaliste est un long fleuve de guerres protéiformes tranquilles (I)
Accumulation insatiable de profits
Publié dans La Nouvelle République le 08 - 01 - 2024

Le capitalisme a transformé la vie en champ de bataille où chaque individu est devenu un soldat en guerre permanente contre tous les autres humains également métamorphosés en soldats individuels du capital.
Si autrefois le champ symbolisait pour nos aïeux un havre de paix de l'existence et d'approvisionnement de nourriture, le capitalisme a transformé le champ d'existence en guerres permanentes détruisant la nourriture relationnelle humaine. L'homme contemporain, rassasié matériellement, a faim d'humanité, dévorée par le capital qui se nourrit uniquement de la production anarchique de marchandises, de l'extraction effrénée de la plus-value, de l'accumulation insatiable de profits. Loin des champs des réelles guerres permanentes répandues dans tous les continents, on croit vivre en temps de paix au sein d'une communauté humaine pacifiée. En vérité, sous le capitalisme, c'est le règne de la guerre protéiforme permanente, interétatique et interindividuelle : au sein des entreprises (lieu de bataille entre patrons et travailleurs autour de la plus-value), entre entreprises (guerre économique pour les marchés), au sein des pays (guerre de classes entre bourgeois et prolétaires), entre pays (guerre militaire), au sein de la famille (conflits conjugaux et intergénérationnels), entre familles (batailles patrimoniales), au sein de l'individu (rendu dépressif par le système capitaliste pathogène), entre individus (quotidiennement sous tensions et en conflits). Un auteur chinois a dit : « Comme un long fleuve la vie n'est magnifique qu'en offrant de multiples méandres ». Le capitalisme a transformé ce sage aphorisme en belliqueuse sentence : « Comme un long fleuve la vie n'est jouissive qu'en offrant de torrentielles guerres chroniques ». Le capitalisme a adopté la doctrine de Sun Tzu, un général chinois du 6e siècle avant notre ère, auteur de « L'art de la guerre ». Doctrine selon laquelle il n'existerait pas de distinction entre les périodes de paix et de guerre. Aussi la guerre est permanente. Notamment la guerre de classe. Et l'acmé n'est pas la lutte armée, mais le fait de soumettre l'ennemi (d'assujettir et de dominer une classe sociale) sans combattre. En lui livrant une guerre psychologique d'attrition visant à lui ôter toute forme de résistance.
Pour sa part, un artiste italien fasciste, pour qui la guerre est une œuvre d'art totale, a écrit : « La guerre, seule hygiène du monde ». Dans la société capitaliste excrémentielle, les hommes, pour se soulager de leur merdique vie, se font dorénavant la guerre comme ils font naturellement leur besoin.
Quant au philosophe allemand, Hegel, produit du capitalisme naissant, il a écrit le plus sagement du monde, sans éprouver le moindre scrupule moral, en guise d'axiome à destination de la nouvelle classe dominante, la bourgeoisie : « La guerre préserve la santé morale des peuples ». Une chose est sûre, elle préserve surtout la santé corporelle et financière des bourgeois, puisqu'ils vivent la guerre en spectateurs, depuis leurs palais et maisons cossus. Dans le cas de Hegel, elle constitua assurément son adrénaline réflexive. Cet immoral et belliqueux postulat hégélien est devenu la conduite de gouvernance de tous les Etats capitalistes occidentaux qui ont contraint leurs respectifs peuples à s'entretuer sur les champs de guerre à de multiples reprises au cours des deux siècles écoulés, notamment lors de 1914-1918 et 1939-1945, où presque 100 millions de personnes ont été décimées. Ou à livrer des guerres de conquête coloniale à des dizaines de peuples africains, maghrébins et asiatiques.
Sous le capitalisme, comme en temps de guerre où les soldats partent combattre la fleur au fusil, heureux d'être équipés de la technologie de mort, au mépris de leur vie et, surtout, de celle des autres belligérants, pareillement chair à canon joyeuse, les individus de la société moderne sont dressés, à leur insu de plein gré, à vivre en guerre permanente. Avant tout, ils sont ravis d'être de la chair à exploiter. Pour preuve : ils consentent à sacrifier un demi-siècle de leur vie dans le travail aliénant. Certes ils ne partent pas au bagne industriel, administratif ou tertiaire pour besogner la fleur au fusil, mais allégrement et benoîtement avec l'antidépresseur et l'anxiolytique dans les veines, ces béquilles du bonheur chimique, pour lubrifier les rouages ankylosés de leur machine existentielle détraquée par l'aliénation professionnelle. Comme en temps de guerre où tout le monde communie dans la fibre patriotique, sans avoir conscience d'être l'objet de manipulation politique par leurs gouvernants, ces individus vivent leur exploitation et leur oppression dans la ferveur et la liesse, au grand plaisir et bénéfice du capital.
« La guerre est la souffrance des humbles, mais le divertissement des puissants ». De même, le travail salarié est l'aliénation des prolétaires, mais l'enrichissement des capitalistes. Par le travail salarié le prolétaire livre la guerre à son corps et à sa psyché, graduellement détruits à force d'exploitation forcenée de ces deux fondements constitutifs de son être aliéné au capital.
Si, en temps de guerre, la norme c'est la guerre, où la promesse c'est la victoire, le moyen la chair humaine, en temps de répit d'économie « pacifiée », la règle c'est la guerre économique, la promesse c'est les gains (la plus-value pour le capital, la consommation, l'acquisition des biens pour le soldat-salarié) ; le moyen, c'est tout un chacun (chair à exploiter). La corrélation entre les deux moments de vie similaires se niche dans le conditionnement culturel et pédagogique ayant balisé le chemin vers la guerre, la normalisation de la mentalité belliciste opérée par l'Education et les médias. Dans les deux contextes, la vie est un champ de bataille, un terrain de conflits permanents. Tous les matins, chaque soldat-salarié se lève pour partir (faire) à la guerre économique. Comme en temps de guerre où les routes pullulent de soldats prêts à livrer bataille, en temps d'économie « pacifiée », les soldats-salariés envahissent quotidiennement les routes avec leurs voitures (ou dans les bus) pour aller prendre position dans l'entreprise afin de mener la bataille de la production effrénée et des parts de marché convoités, au grand contentement de la majesté le Capital, qui tire profit, au double sens du terme, du travail salarié et aliéné. i, en temps de guerre, le soldat est l'outil et le moyen de la violence déchaînée, en temps d'économie « pacifiée », les travailleurs sont l'instrument et le moyen du capitalisme débridé. Sans ces soldats salariés interchangeables aliénés, ni la guerre ni le capitalisme n'existeraient. Comme l'écrit Etienne de la Boétie : « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genou » (à trimer pour eux et à faire leurs guerres). On nous assène qu'il faut gagner sa vie à la sueur de son front. Cette maxime péremptoire consonne comme un obus avec cette recommandation militaire : il faut être fier de perdre sa vie sur le front. Dans les deux circonstances, on gagne ses galons une fois seulement avoir sacrifié sa vie sur les fronts respectivement de la sueur laborieuse exsudée par l'exploitation, et du suaire oblatif vomi par les guerres : la tombe de l'inconnu pour le soldat, la retraite tombale pour le salarié.
C'est avec les prolétaires que les riches se font poliment la guerre. Mais c'est avec les guerres quotidiennes que les riches défont politiquement les prolétaires. Les tensions et conflits permanents entre individus, attisés et entretenus par le système capitaliste par essence belligène, desservent les intérêts du prolétariat, désarment leur puissance de riposte, épuisent leurs ressources de combativité collective, dissolvent leur vigueur intellectuelle et ardeur réflexive.
Sous le capitalisme, l'ancien esprit de combativité a été détourné de ses fins. Comme l'écrit Guy Debord : « maintenant l'homme cesse de pouvoir ressembler aux combats de son père ou de son grand-père, il doit être étroitement accordé à l'image prosternée du présent éternel de la soumission à l'argent ». Victimes de cet esprit oblatif (militaire) inhérent à toute société de classe, dominée par la mentalité grégaire, les soldats salariés perdent leur vie à la gagner sur le front du travail aliénant et destructeur. Pourquoi acceptons-nous de nous lever chaque matin pour partir joyeusement à la guerre capitaliste ? Car elle est devenue la norme et la culture communes. Par la puissante force de l'endoctrinement idéologique, l'individu ne conçoit pas une autre réalité, un autre mode d'existence solidaire et pacifique, fondé sur la satisfaction des besoins humains et non le profit. Sous le capitalisme, la Barbarie, par le conditionnement des esprits, a pris le visage d'humanité : aussi tout le monde croit que la barbarie capitaliste est la normalité. Comme si la maladie, qui aurait remplacé la santé sous l'effet d'une contamination causée par un système pathogène contrôlé par une puissance méphistophélique, devenait la norme de la vie. La Barbarie capitaliste s'est affublée du visage d'humanité, car le capitalisme a réussi le tour de force à la transformer en normalité.
À suivre…
Khider Mesloub
Tout un chacun appréhende la réalité uniquement par le prisme du capital logé et incrusté dans son cerveau, si on peut appeler cette chose cerveau, malléable à souhait et aliénable à vil prix, pour qui la promesse d'une maison, d'une voiture ou d'un smartphone justifie toutes les compromissions, trahisons, dépravations morales. Même si, la maison, la voiture et le smartphone ne lui appartiendront réellement jamais, mais à la banque (qui nous vend notre existence à crédit).
À l'instar de l'entreprise où il trime comme un esclave du matin au soir, le produit ne lui appartiendra jamais. Au contraire, à la moindre fâcheuse conjoncture financière ou fluctuation économique l'entreprise le congédie comme un kleenex usagé.
Pourtant, il arbore toujours de la fierté d'aliéner sa vie à une entreprise qui lui vend l'espoir d'avoir la possibilité de s'endetter pour acheter sa vie à crédit pour le grand profit des banquiers. Pauvre prolo ! Il se croit libre. En réalité il est pressuré et par son patron, et par ses banquiers, et par ses créanciers.
À la guerre comme à l'usine. Acheter son existence à crédit est le summum de l'aliénation. Tu crois posséder des biens, mais en réalité tu es possédé par les biens. Tu es doublement esclave de la marchandise. Tu la produis sans te l'approprier (elle demeure propriété du capitaliste détenteur des moyens de production). Tu l'achètes ensuite à crédit (elle demeure potentiellement la propriété du banquier en cas de défaillance de paiement).
L'avenir incertain et chaotique est la seule perspective existentielle offerte dans le monde capitaliste. Dans cet univers impitoyable de l'économie libérale anarchique, les promesses n'honorent jamais l'avenir de leur présence. L'avenir se languit toujours de l'absence des promesses au banquet de l'existence qui rate constamment son rendez-vous avec le bonheur, valeur inconnue dans le monde capitaliste. Car le capitalisme ne reconnaît qu'une seule valeur, la valeur marchande, un seul bonheur frelaté, la solvabilité.
L'insécurité est le mode d'existence du capitalisme. Le capitaliste vit constamment avec la peur de la mévente, l'absence de réalisation de la plus-value. Le travailleur vit avec la hantise de la rupture de son contrat d'esclavage-salarié, nommé par euphémisme chômage. Ces épées de Damoclès suspendues au-dessus de la tête de tous les individus aiguisent leur tempérament agressif en le rendant encore plus tranchant, plus sanglant. La société devient à leurs yeux, emplis de hargne et de haine, une arène de combat, où tous les coups (bas) sont permis.
La méfiance et la défiance leur servent de bouclier dans leurs frontales relations. Les échanges entre individus atomisés et lobotomisés (car l'expression courante millénaire « relations humaines » est inappropriée pour qualifier le mode de communication usuel au sein du capitalisme) sont marqués par des rapports mercantiles. L'intérêt encadre leurs relations. La cupidité anime leurs intentions. Le profit guide leurs attentes. Comme sur un marché où dominent uniquement les échanges marchands, dans la société les relations sont également régies par des rapports marchands. On se juge. On se jauge. On évalue nos valeurs pécuniaires respectives pour décider si la relation est profitable et rentable.
La suspicion commande toutes les relations. L'innocente fraternité, la gratuité sentimentale, la pureté amicale sont suspectes aux yeux de la majorité d'individus façonnés par la mentalité cupide. Pour eux, tout échange suinte le parfum d'une transaction lucrative, sent l'odeur monétaire.
Y compris les relations conjugales sont désormais polluées par les rapports marchands, gangrenées par les rapports de force. Entre l'homme et la femme la guerre est déclarée. La femme veut sa revanche. L'émancipation de la femme s'apparente à un travestissement sexuel.
La belle escroquerie féministe que de célébrer l'engeance des Tchatcher ou Merkel, de glorifier la nomination d'une femme ministre, officier de l'armée ou de la police, directrice d'une entreprise. On découvre de quoi elles sont capables, une fois hissées au sommet du pouvoir, ces femmes ambitieuses. D'aucuns diraient vicieuses.
Elles exercent leurs fonctions avec la même perversité sadique que les hommes, le même esprit de domination, les mêmes méthodes humiliantes et dégradantes à l'égard des subalternes, du peuple pour ce qui est des femmes ministres, préfètes, officier de police. À l'instar de Margaret Thatcher, la dame de fer qui a transformé son pays en enfer.
Au sein du capitalisme, la femme n'a pas accouché d'une nouvelle femme originale pétrie d'humanité et de sentimentalité féminine, mais elle s'est muée en homme. Au lieu de conserver ses légendaires affects pacifiques féminins, sa psyché angélique, elle a endossé l'horrible armature psychologique prédatrice et guerrière masculine.
Bien loin d'entraîner l'homme brut sur son affectueux et inoffensif terrain féminin, elle a occupé le territoire belliqueux mâle pour s'approprier ses funestes caractéristiques violentes et agressives.
Au lieu de dépasser l'homme par le haut, elle l'a surpassé par la bassesse. Faute de pacifier l'homme par son humanité légendaire féminine, elle s'est déshumanisée par sa corruption masculine.
Depuis que la femme ressemble à l'homme, l'humanité s'est dégradée et a perdu tout espoir de progrès, de rédemption, de révolution. Car la femme était l'avenir de l'homme. L'humanité devait se bâtir sur les douces et affectueuses valeurs millénaires de la femme.
Même le foyer conjugal s'est métamorphosé en champ de guerre. La bataille est quotidienne. Tout est prétexte à conflit. L'amour et la paix ont été délogés du foyer conjugal, devenu un champ de ruines familiales. Un champ de dévastation éducative et de destruction psychologique.
Les conflits intergénérationnels, heurts entre parents et enfants, ont également envahi la famille. La famille, en proie à l'anomie, explose, implose, se recompose, se décompose.
Le couple est devenu de nos jours une simple association entre deux partenaires, plus soucieux de fructifier pécuniairement leurs investissements sentimentaux que d'accroître leurs réciproques passions amoureuses.
La rentabilité relationnelle fonde leur association maritale, fondée sur une relation martiale.
Le gain financier structure leur vie de couple. Chacun est sommé de fortifier le compte bancaire conjugal au moyen de revenus mirobolants pour assouvir leurs addictions consuméristes. L'émulation financière est le carburant du couple, et non pas la ferveur sentimentale. La réussite sociale maritale prime le bonheur sentimental conjugal. Le manque d'argent impacte davantage le couple que l'absence de sentiments. Le tarissement des revenus de l'un provoque le dessèchement érotique de l'autre. À croire que sa libido ne s'alimente qu'au moyen de l'énergie pécuniaire fournie par son partenaire aux bourses financières turgescentes de fertilités consommatrices. L'argent est le stimulant des étreintes sensuelles, l'adjuvant lubrique indispensable à la copulation charnelle. La défaillance professionnelle de l'un des conjoints entraîne souvent le licenciement conjugal. L'association maritale est rompue. Le partenaire chômeur subit ainsi une double peine : licencié par « son » entreprise (à laquelle il s'est dévoué passionnément), puis répudié par sa conjointe (qui le désavoue). Quand ils daignent concevoir un enfant ou, au pire, deux (pas plus : pour ne pas perturber leur vie consumériste), ce n'est pas pour les élever et les éduquer à plein temps, c'est pour les confier, à peine expulsés du ventre, à des nounous ou des crèches en vue de se charger de cette ingrate et dégradante tâche (sic), à des écrans de télévision ou de smartphone, ces troisièmes parents de substitution.
Surtout, en fidèles serviteurs du capital qui ne désertent jamais de leur combat pour la bataille des parts du marché, pour retourner s'occuper de leur patron, choyer affectueusement son entreprise, fructifier passionnément ses profits. Durant ce temps-là, livrés à l'idéologie dominante capitalistique-libertaire-libertine, leurs progénitures évolueront désormais dans une société où l'indistinction (l'extinction planifiée ?) sexuelle est valorisée dans l'enceinte des établissements scolaires comme sur les écrans de télévision, en vertu des nouvelles représentations normatives indifférenciées sexuelles schizophréniques décrétant que la femme (la fille), au nom de la théorie du genre, doit s'apparenter à l'homme (le garçon), tandis que l'homme (le garçon) doit ressembler à la femme (la fille).
L'école, pareillement, n'est plus un lieu d'apprentissage scolaire, mais d'affrontements, d'émulation guerrière. De même, la rue n'est plus cette école de socialisation collective entre pairs moralement enrichie aux contacts des adultes, mais un champ de dévastation relationnelle.
L'enfant, autrefois enfant de toute la famille élargie et de tous les habitants du quartier, est devenu la propriété exclusive d'une famille nucléaire condamnée à vivre en vas-clos dans un logement bétonné, pourvu de toutes les commodités et biens matériels modernes, mais dénué de l'essentiel : d'humanité.
Le capitalisme offre tous les biens matériels aux personnes solvables, mais jamais il pourrait procurer des rapports authentiquement humains. Car la bourgeoisie a noyé les relations sociales « dans les eaux glacées du calcul égoïste ».
De même qu'en temps de guerre, la culture et la sémantique rétrécissent leur champ de créativité et d'activité, devenant de simples instruments d'embrigadement idéologique belliqueux, de même en temps d'économie capitaliste « pacifiée », la culture et la sémantique empruntent le discours managérial du capital. Dans le premier contexte de guerre réelle les maîtres mots polémologiques sont : défense de la patrie, ennemis, combattre, abattre, tuer, massacrer, conquérir, etc. Dans le contexte de guerre économique « pacifique », la rhétorique est : compétitivité, rentabilité, concurrence, part de marché, profit, performance, etc. Dans les deux modes d'existence, l'objectif est constamment de combattre contre l'adversaire, se battre pour remporter la victoire de la guerre (militaire ou économique), gagner du terrain, des parts de marché, d'écraser le concurrent, l'ennemi, d'écrouler mortellement le maximum de soldats, d'écouler le maximum de ses produits, de faire couler beaucoup de sang, d'amasser beaucoup de profits, etc. En résumé : la soif de sang dans la guerre militaire ; l'appétence de profit dans la guerre économique.
Le capitalisme est un système vampirique : il suce le sang de l'humanité et la sève de la Terre. Excepté qu'à la différence du Vampire, le capitalisme opère jour et nuit, sans répit, sans dépit.
Rien ne demeure de l'humanité de l'homme quand la société est organisée autour de la guerre économique permanente, la guerre de tous contre tous, exacerbée par l'individualisme forcené érigé en norme par le capitalisme, dès lors que la société est soumise à l'aliénation, aux déprédations, aux dépravations, dégradations relationnelles et destructions psychologiques et écologiques.
Nous menons non seulement la guerre contre nous-mêmes par notre servitude volontaire, par notre soumission à l'exploitation et l'oppression opérées dans ces abattoirs pathologiques de la vie, ces mouroirs graduels nommés entreprises, mais nous menons également la guerre à notre Mère nourricière Terre.
Aujourd'hui, la terre ne supporte plus la guerre écologique tragique que lui livre le capital. Pour nourrir sa pathologique nécessité de valorisation, le capital affame la terre, la dégrade, la pollue, la dévaste.
Le capitalisme est synonyme de destruction du monde, de dégradation de l'humanité. Le capital saccage l'écosystème, brise des vies humaines, propage la guerre, les virus, décime les cultures. Le capitalisme est un système mortifère. Génocidaire.
Quand nous résoudrons-nous à écouter le cri de la vie, cette vie qui sommeille en nous dans le lit de notre mort existentielle quotidiennement programmée ?
Oui, l'authentique vie humaine se meurt en nous à force d'avoir manqué de souffle spirituelle, d'oxygène relationnelle, d'essence communicationnelle, de révoltes salutaires.
Après des milliers d'années d'évolution de l'humanité dans la misère, sur fond de spiritualité et de la noblesse du cœur, nous vivons aujourd'hui dans une misère humaine et spirituelle au sein d'une abondante richesse matérielle hautement technologique sans cœur.
Aujourd'hui, Dieu est mort, tué par le capital, seul système à être parvenu à le déloger du Ciel. Mais, c'est pour lui donner refuge sur terre, en invitant chaque individu à devenir dieu. Notamment par la folle ambition de l'homme à vouloir (devoir) concentrer et accumuler l'argent, les pouvoirs, le savoir, les technologies. Tous les attributs de la guerre. Chaque homme étant devenu son propre dieu, nous sommes entrés dans l'ère de la guerre des Dieux. En termes modernes, de la guerre interindividuelle, de tous contre tous. Jusqu'au triomphe du dernier dieu vainqueur, le dieu unique (inique), symbolisé par l'argent.
On croit vivre à l'époque de la guerre des religions. Mais c'est plutôt l'époque de la guerre des dieux, ces monades modernes, individus narcissiques du monde capitaliste, vecteur de guerres économiques et militaires.
L'heure est venue de bâtir une nouvelle culture collective débarrassée des catégories marchandes, de la guerre, du pouvoir autoritaire et de la gouvernance répressive. Pour être en phase avec la vie, en symbiose avec notre terre nourricière, pour ressourcer notre humanité, ressouder notre solidarité humaine universelle, rompue par le capital.
Emboîtant le pas des Lumières aux intelligences visionnaires qui ont éclairé l'humanité depuis la nuit des temps, mais demeurés dans l'obscurité faute de clarté des esprits, avant que nous sombrions définitivement dans les ténèbres de l'obscurantisme marchand et le néant de la vie. Souvent, ces lumineux hommes d'antan n'ont éclairé de leur vivant que quelques rares hommes désireux de propager la lumière autour d'eux. Etendons cette lumière à l'humble et souffrante humanité plongée dans l'obscurité intellectuelle et la misère matérielle.
Notre époque éclairée par le savoir nous permet aujourd'hui d'embraser et d'enflammer toutes les intelligences délibérément rejetées dans l'ombre et l'obscurité par le capitalisme moribond, pour survivre sur notre ignorance institutionnellement entretenue, délibérément maintenue.
L'écho des révoltes salvatrices et révolutions émancipatrices des temps anciens ne parvient plus aux oreilles du monde contemporain, rendu sourd par la silencieuse manipulation mentale opérée par le capital et la pédagogique falsification de l'histoire des peuples opprimés.
Faute d'une nouvelle œuvre politique collective, d'une nouvelle économie coopérative humaine, d'une nouvelle culture inspirée par la vie et reliée à l'humanité, en lieu et place du capitalisme, la barbarie persistera à creuser ses sillons dans notre univers mental, à enfoncer ses griffes meurtrières dans notre schème comportemental belliqueux nourri d'esprit vindicatif. Et notre déchéance morale sera monumentale, notre dégénérescence psychologique abyssale.
Refusons la vie de champ de bataille façonnée par l'idéal mortifère capitaliste. Renouons avec le champ (chant) de la vie par une dernière bataille salutaire contre ce système destructeur, pour construire notre propre idéal humanitaire. À défaut de transformer le monde capitaliste, le monde capitaliste nous transmettra ses mortifères défauts, autrement dit il nous contaminera davantage encore avec ses virales mœurs belliqueuses létales.
Relions-nous pour le meilleur, puisque le pire nous le vivons présentement.
Nous sommes entrés, dit-on, en pleine époque des crises : économique, politique, sociale, sanitaire, culturelle, existentielle, morale, psychologique, éducative, identitaire, etc. L'histoire nous enseigne que les crises du capital accouchent souvent d'horribles dictatures ou de monstrueuses guerres.
Si nous ne réagissons pas à temps par un sursaut d'émancipation collectif, le capital enfantera la vermine, la famine. La peste brune, la peste noire, la peste verte (dans les pays islamiques). Des guerres locales, communautaires, ethniques, religieuses, familiales, interindividuelles : un génocide planétaire.
Aujourd'hui, le capitalisme (capitalistes et gouvernants) nous livre une véritable guerre sociale et économique par la dégradation de nos conditions d'existence, le démantèlement de nos « acquis sociaux ». Santé, éducation, secteurs publics : autrefois activités d'utilité sociale exercées loin des lois de la rentabilité, sont devenues à la faveur de la crise objets de convoitise pour le capital. De là s'explique la politique de privatisation tous azimuts de ces secteurs. Ces établissements sont désormais gérés selon les lois de la rentabilité du système dominant. Autrement dit, selon la logique de la guerre économique capitaliste. Il ne faut pas s'étonner que tous les secteurs publics deviennent rapidement des cimetières, comme on l'avait constaté avec la crise sanitaire du Covid-19 où les hôpitaux étaient transformés en mouroirs, les maisons de retraite en hospices d'euthanasie. Et tous les services sociaux en champ de ruines.
Sans conteste, si, pour les classes populaires, la crise a le visage hideux de la mise à mort social, pour les puissants, en revanche, elle symbolise la renaissance de leur capital, la garantie d'une longévité financière, comme le prouve notre sinistre époque marquée par la propagation de la paupérisation à l'ensemble de la population mondiale, et l'enrichissement faramineux des financiers. La mort sur le champ de bataille capitaliste pour les premiers. Le chant de la victoire de leur guerre capitaliste pour les seconds.
S'indigner individuellement, c'est bien. Se révolter collectivement, c'est encore mieux. Pour livrer une dernière légitime guerre sociale émancipatrice à ce système capitaliste mortifère, maintenu en survie par l'oligarchie mondialisée, arcboutée à ses privilèges, réduite à gouverner par la terreur, car consciente de sa délégitimation institutionnelle et de son obsolescence historique, tétanisée par la frayeur de son imminente disparition sous l'effet de la multiplication des révoltes sociales actuelles et de l'imminente révolution prolétarienne. Révolution prolétarienne qu'elle conjure par le déclenchement de multiples guerres locales, prémices à la guerre généralisée, mondialisée.
En dépit de ces multiples guerres capitalistes déclenchées aux quatre coins du monde par les bourgeoisies décadentes pour conjurer le spectre de la révolution, lentement mais sûrement, à court terme, des quantitatives révoltes chaotiques surgiront, qui se transformeront inéluctablement en une qualitative Révolution. Qui, en détruisant la société de classe, anéantira définitivement la guerre sociale, la guerre militaire. Les conflits sociétaux et individuels.


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