Repères généraux L'année 1956 fut riche en événements nationaux et internationaux, en relation avec la guerre d'Algérie. Le 2 janvier, la victoire du Front Républicain aux élections législatives amenait la formation d'un gouvernement de gauche, dirigé par Guy Mollet. Le 24 janvier, une grève de protestation contre la répression était massivement suivie par les Algériens en métropole. Les tensions FLN-MNA se répercutaient au sein de la gauche anti-coloniale. Le meeting de la salle Wagram, du 27 janvier, au cours duquel plusieurs milliers d'Algériens acclamèrent le secrétaire général du MNA, provoqua la scission du Comité d'action des intellectuels. En février, l'affrontement politique pour le contrôle de la révolution algérienne s'accentuait. Le 12, les Ulémas ralliaient le FLN. Le 14, les militants messalistes créaient l'Union syndicale des travailleurs algériens (Usta). Le 24, les syndicalistes proches du FLN créaient l'Union générale des travailleurs algériens (Ugta). La naissance de ces deux organisations constituait l'aboutissement d'un débat interne, qui avait agité les milieux nationalistes depuis 1945. Le 2 mars, la proclamation de l'indépendance du Maroc galvanisait tous les espoirs. Le 9, une grève générale dirigée contre le vote par le Parlement des pouvoirs spéciaux, mobilisait l'ensemble de l'immigration. 30 000 Algériens défilaient dans Paris. Cette journée d'intense mobilisation fut suivie de nombreuses arrestations. Les événements se précipitèrent : le 12 mars, le Parlement votait les pouvoirs spéciaux. Les 15 et 16, des contacts officieux entre Guy Mollet et Abane Ramdane avaient lieu, par l'intermédiaire de maître Pierre Stibbe. Le 23, Mostepha Ben Boulaïd était tué en manipulant un poste radio piégé. Avec lui, disparaissait un responsable politico-militaire respecté, qui demeurait en contact avec l'état-major messaliste. Le 26, la fédération de France de l'Usta était créée. Le 22 avril, Ferhat Abbas prononçait la dissolution de l'Udma et rejoignait le FLN. A la fin du mois d'avril, la police arrêtait de nombreux cadres de l'Ugta. Le 26, l'Union générale des étudiants musulmans algériens (Ugema) lançait un mot d'ordre de grève illimitée. La police et l'armée ratissaient La Casbah et procédaient à 5 000 arrestations. L'appareil militaire et politique du MNA à Alger était démantelé. Au même moment, la police française arrêtait la journaliste Claude Gérard, auteur d'un reportage sur les maquis messalistes. En juillet, la bataille syndicale venait, à nouveau, au-devant de la scène. Le 16, la Confédération internationale des syndicats libres (Cisl) acceptait d'affilier l'Ugta et refusait l'affiliation de l'Usta. A partir du 20 août 1956 se déroulait, à l'instigation d'Abane Ramdane, le congrès de la Soummam, au cœur de la Kabylie. Les chefs du FLN de l'intérieur élaboraient une plate-forme politique et installaient des instances de direction. Les décisions, qui consacraient la primauté du politique sur le militaire et celle de l'intérieur sur l'extérieur furent contestées par la délégation extérieure du Caire. Début septembre, de nouveaux contacts se déroulèrent entre FLN et gouvernement français par l'intermédiaire de Pierre Commin, responsable socialiste. Le 30, Abane Ramdane, inquiet de la presse militaire très forte exercée sur les maquis, donnait l'ordre à Yacef Saâdi de déclencher les actions terroristes à Alger. Le 22 octobre, l'avion du sultan du Maroc transportant quatre dirigeants du FLN, Ahmed Ben Bella, Mohamed Khider, Hocine Aït Ahmed et Mohamed Boudiaf était détourné et arraisonné par les forces françaises. Début novembre, les forces israélo-franço-britanniques menaient l'expédition de Suez à la suite de la nationalisation du canal par le colonel Nasser. Les Français espéraient porter ainsi un coup décisif à la guérilla algérienne en mettant en difficulté le principal soutien – jusqu'alors – du FLN, le gouvernement égyptien. Un premier semestre dominé dans le nord par la guerre des cafés Les attentats perpétrés au cours des cinq premiers mois de l'année furent principalement localisés dans les régions de Maubeuge et de Lille-Roubaix-Tourcoing. Début janvier, un commando de plusieurs hommes masqués s'en prit violemment à un ouvrier locataire de la cantine de la Société Générale de Carrelages à Feignies, près de Maubeuge. Les agresseurs tirèrent un coup de revolver de semonce et rouèrent de coups leur victime en utilisant des matraques de bois ferrées. Ils lui dérobaient plus de 25 000 francs. Le 16 janvier, une expédition punitive était organisée contre le café, 23 rue des Sarrazins, dans le quartier de Wazemmes à Lille. Le rapport de police décrit une scène très violente. A 19h30, un Algérien entra, se fit servir un verre de bière qu'il lança violemment contre une glace du café. Dix personnes arrivèrent pour tout casser. Le tenancier avait «été victime d'une sanction du MNA parce qu'il n'obéissait pas aux mots d'ordre du parti et qu'il servait notamment à ses clients algériens, de la bière et du vin». Le 22 janvier, vers 21 heures, trois consommateurs entraient dans le café situé 88 rue de Gand à Lille. Les trois hommes s'en prirent violemment au tenancier en le frappant avec une matraque en bois. (Suivra)