Vingt personnes ont péri et 21 autres ont été blessées samedi lors d'un accident à bord d'un sous-marin russe à propulsion nucléaire dans l'océan Pacifique, annonce la marine russe. L'accident, survenu alors que le submersible effectuait des exercices de routine dans le Pacifique, est le plus grave qui soit survenu à bord d'un sous-marin russe depuis que le Koursk, lui aussi à propulsion nucléaire, a sombré en 2000 en mer de Barents, causant la mort de ses 118 membres d'équipage. Selon les procureurs qui enquêtent sur l'accident de samedi, les victimes ont sans doute péri en respirant un gaz toxique, le fréon, qui sert à éteindre les flammes et qu'a dégagé l'activation involontaire du dispositif anti-incendie. On ignore pourquoi les masques à oxygène disponibles dans le sous-marin n'ont pas permis alors de sauver les marins exposés au gaz toxique. «Les premiers résultats de l'enquête montrent que des marins sont morts après avoir inhalé du gaz fréon», a déclaré le parquet. Le sous-marin était en plongée lorsque l'accident s'est produit, a-t-on dit de source navale à l'agence russe RIA. «On peut présumer que les sous-mariniers n'ont pas remarqué la fuite de gaz, et lorsque cela a enfin été le cas, il était trop tard», ajoute-t-on de même source. Selon un spécialiste militaire, il est possible que tous les occupants du sous-marin ne disposaient pas de masque à oxygène. «Il est possible que certains n'ont pas mis leurs masques assez vite, ou bien qu'ils n'en avaient même pas», a expliqué Rouslan Poukhov, directeur du Centre d'analyse des stratégies et de la technologie, à la station de radio Echo de Moscou. Le sous-marin, dont le réacteur nucléaire n'a pas été endommagé, a pu regagner la base navale de Bolchoï Kamen, sur la côte Pacifique de l'Extrême-Orient russe. Les 20 blessés ont été admis dans un hôpital militaire de Vladivostok, Q.G. de la flotte russe du Pacifique. «La zone du réacteur fonctionne normalement» et «les niveaux de radiation à bord sont normaux», a déclaré Igor Digalo, porte-parole de la marine russe. Le président russe Dmitri Medvedev a ordonné au ministère de la Défense de lancer une enquête exhaustive pour déterminer les causes de l'accident, a fait savoir le Kremlin. Une femme, Véra Sanjonova, a indiqué qu'elle se rendait de Vladivostok à Bolchoï Kamen pour avoir des nouvelles de son mari, un technicien civil qui était à bord. «Je n'ai reçu aucune nouvelle(...). Mon mari ne figure ni sur la liste des blessés ni sur celle des morts», a-t-elle dit à Reuters télévision. Dix-sept des victimes étaient des employés de l'entreprise de construction navale Amour Shipbuilding et les autres des sous-mariniers, ont déclaré des procureurs. Le sous-marin effectuait des essais avant son entrée en fonction d'ici la fin de l'année. La marine n'a pas donné le nom du sous-marin à bord duquel s'est produit le drame, mais selon les agences de presse russes, il s'agit du Nerpa, qui est, selon la terminologie de l'Otan, un sous-marin d'attaque de la classe Akoula. Modernisé au cours des dernières années, le Nerpa a appareillé le mois dernier pour mener des exercices en haute mer, selon les médias locaux. La construction de ce sous-marin a débuté en 1991 mais a été ensuite retardée en raison de la crise économique des années 1990. La marine russe a été touchée par de nombreux accidents meurtriers, malgré une importante hausse des crédits. La flotte soviétique est toujours en service, le Kremlin souhaitant l'utiliser pour donner l'image d'une armée très forte. Mais le drame de samedi vient illustrer l'écart qui persiste entre les ambitions du pouvoir russe et le potentiel militaire réel du pays. Le prédécesseur de Medvedev au Kremlin, Vladimir Poutine, actuel Premier ministre, avait été très critiqué pour la lenteur de sa réaction lors du naufrage du Koursk, quelques mois après son arrivée au pouvoir. En août 2005, sept marins russes ont pu être sauvés avec l'aide d'une équipe britannique après être restés coincés pendant trois jours dans un sous-marin AS-28, à 180 mètres de profondeur, dans le Pacifique.