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Les limites du consentement (II)
Prostitution
Publié dans La Nouvelle République le 22 - 12 - 2008

Un discours courant, visant à légitimer la prostitution, tend à considérer celle-ci comme un droit à la liberté de ses actes et un exemple de la pluralité des conceptions du bien. Mais, peut-on analyser la prostitution comme un simple consentement à un contrat établi, comme c'est souvent le cas dans les sociétés libérales, et faire abstraction des rapports de domination symbolique sur lesquels elle se base ? De plus, n'est-il pas dangereux de fermer les yeux sur la dimension affective et spontanée de la sexualité, la rendant si impropre à un « contrat» ?
La notion de consentement est souvent invoquée lorsque l'on aborde le phénomène de la prostitution et que l'on cherche à le défendre. La prostitution serait un phénomène socialement acceptable dans la mesure où, dit-on, les personnes s'y adonnant seraient consentantes. L'on pourrait donc, ainsi, faire une distinction très nette entre la prostitution dite forcée et la prostitution dite libre. Dans la prostitution dite forcée, la personne ne consentirait pas aux rapports sexuels qu'on lui demande, car elle serait sous l'influence d'individus cherchant à la tromper, la menacer et l'exploiter. La prostitution serait dite forcée, également, dans les cas impliquant des mineurs : on juge, alors, que le consentement n'est pas valide en raison de l'âge de l'individu. À l'inverse, dans la prostitution dite libre, les rapports sexuels rémunérés se feraient « entre adultes consentants », la personne prostituée s'exécuterait, alors, de son plein gré et considérerait ce qu'elle fait comme un travail.
Ces deux conceptions de la prostitution sont commodes pour le philosoph,e ou le citoyen, qui cherche à départager les relations sexuelles, non problématiques, des relations sexuelles exploitantes, en se basant sur la rationalité et la notion de contrat. En effet, la question devient alors : la personne a-t-elle accepté les termes du « contrat sexuel » ou non ? Ou alors : est-elle dans une situation qui la force à accepter un rapport sexuel ou non ? Si ces deux questions peuvent sembler, au départ, simples, nous croyons pourtant qu'une analyse philosophique de la notion de consentement, des conditions politiques dans lesquelles il s'obtient, et de la validité d'un contrat dans le domaine de la sexualité, peuvent remettre, sérieusement, en question la distinction simple que l'on peut faire entre une prostitution libre et une prostitution forcée.
La défense d'une prostitution libre s'appuie couramment, précisons-le, sur deux postulats, qui s'avèrent contradictoires. D'une part, il y a le postulat selon lequel l'acceptation de la prostitution serait dans le continuum de la libération sexuelle, comme une suite, logique, de l'acceptation de l'homosexualité et de la sexualité sans attaches sentimentales.Ce postulat aurait, donc, trait à la morale et au sens que l'on donne à son comportement. D'autre part, il y a le postulat que la sexualité dans la prostitution serait comme un travail « mécanique », pas plus différent, finalement, que le travail à l'usine, et qu'il n'aurait pas d'impact sur la vie intime de la personne dont c'est le « métier ». Ce postulat n'aurait, donc, aucun lien avec la morale, il serait amoral, et renverrait, davantage, au droit d'exercer un travail qu'à des valeurs de liberté. Ces deux postulats, parfois défendus par les mêmes personnes, sont évidemment contradictoires. En effet, ou bien la prostitution aurait un impact sur notre vie morale, et sur notre niveau de liberté sexuelle (impact qui serait positif selon plusieurs défenseurs de la prostitution), ou bien elle n'en aurait pas et serait à traiter au même titre que n'importe quel travail mécanique comportant des risques. La critique de la légitimation et de la banalisation de la prostitution, comme il se fait au sein du courant abolitionniste, que nous soutenons ici, suscite une réponse de la part des défenseurs de la prostitution selon ces deux postulats contradictoires. En effet, si l'on affirme que la prostitution a un impact sur notre niveau de moralité et notre niveau de liberté sexuelle (impact qui serait négatif, selon nous), les défenseurs de la prostitution s'empressent, alors, de répondre que la prostitution n'a pas tant d'impact et qu'elle serait un travail « mécanique », sans conséquences réelles sur les personnes qui la pratiquent. Pourtant, ces mêmes défenseurs n'hésitent pas à traiter les défenseurs du mouvement pour l'abolition de la prostitution de puritains brimant la liberté sexuelle et les diverses formes de sexualités existantes.
Il faudrait, pourtant, se brancher : ou bien la prostitution serait un phénomène ayant des impacts sur la vie intime et la citoyenneté, et susciterait des questionnements philosophiques, ou bien elle ne le serait pas et on verrait alors, mal, pourquoi faire tant d'histoires lorsque l'on parle d'abolir un travail qui comporte autant de dangers. N'y a-t-il pas des milliers d'ouvriers perdant leur emploi, chaque année, pour cause de relocalisation des usines ? Ce n'est, pourtant, jamais le droit à ce métier-là que l'on invoque, lorsqu'on s'en inquiète, mais plutôt le droit à l'emploi, de façon générale, pour ces ouvriers. De plus, certains métiers ne peuvent-ils pas être abolis, lorsqu'ils sont considérés comme dangereux ? La prostitution étant, certainement, l'un des « métiers » les plus dangereux au monde, et un des plus stressants - le stress, avant chaque rencontre avec un nouveau client, est constamment évoqué dans les études sur le sujet, sans parler du stress post-traumatique, qui est fréquent -, on voit mal pourquoi il serait surprenant de vouloir l'abolir. Mais, vouloir abolir un travail dangereux, dans des usines ou des mines, ne suscite pas une défense enflammée et émotive, ainsi que des références au droit et à la liberté, comme c'est le cas lorsqu'on parle d'abolir la prostitution.
Il apparaît, d'abord, évident que le postulat portant sur la dimension inoffensive, mécanique et amorale de la prostitution est faux. Même ceux qui défendent cette position ne tardent pas à dévoiler la dimension morale qu'ils attribuent à la prostitution du simple fait qu'elle leur apparaisse comme un symbole de liberté sexuelle. En fait, si le sexe était simplement « mécanique », on verrait alors, mal, pourquoi le client de la prostitution ne serait pas indifférent face au physique, à l'âge, ou à l'apparence de la personne qui lui fait ce « service ». On verrait mal, également, pourquoi il n'opterait pas pour la masturbation. En fait, il apparaît évident que la sexualité est une dimension complexe de l'humanité, qui est liée à une symbolique, à une identité et à une affectivité, et est bien plus qu'une simple activité « mécanique ». Il est clair, pour nous, que la prostitution a davantage trait à des questionnements sur la morale et la liberté qu'à des questions de techniques de travail. Toutefois, ce postulat concernant le droit inaliénable à la liberté sexuelle, que soutiennent des défenseurs de la légitimation de la prostitution, pose selon nous plusieurs problèmes. En effet, de quelle liberté sexuelle parlons-nous lorsqu'il est question de prostitution ? Une « libération » peut-elle être effective si elle affecte, négativement, autant de vies humaines, à travers la répétition de relations sexuelles non désirées ?
Notons que le désir sexuel est, à la fois, fort et fragile : fort, car il s'adapte à des conditions sociales variées, au permis et au défendu d'une société, de même qu'aux espaces de transgressions ; fragile, car il ne se manifeste pas face à tout individu, ni à toute circonstance, il est constamment affecté, soit positivement, soit négativement, par les relations. Il faut, en quelque sorte, en « prendre soin ». Et provoquer des rencontres positives, comme dirait Spinoza.
Cette fragilité du désir sexuel est, au fond, au cœur des préoccupations des défenseurs de la prostitution, comme il l'est d'ailleurs, encore plus, pour les défenseurs de l'abolition de la prostitution, mais pour des raisons différentes. Pour ceux qui défendent la prostitution, il ne faudrait pas empêcher tel sujet d'avoir la sexualité de son choix, même si cette sexualité s'avère non réciproque avec le partenaire concerné, en autant qu'il y ait consentement, et il faudrait adapter le marché économique aux demandes des individus. Mais cet individu, au désir fragile, et pour qui il faudrait aménager les fantasmes, ne s'agit-il pas surtout, pour ces défenseurs de la prostitution, d'un individu mâle et consommateur, d'un « client » ? Parmi les défenseurs de la prostitution, peu semblent tenir compte du fait que la sexualité de la personne prostituée est, également, une chose fragile et que la répétition, quotidienne, de gestes sexuels non désirés, qui sont demandés, voire exigés, par les clients a, nécessairement, un impact sur leur vie morale et sexuelle. Nier cela serait considérer ces gestes comme « mécaniques », et dénués de sens et, nous l'avons vu, c'est un point de vue qui ne se défend pas.
(A suivre)


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