Les morsures de scorpions constituent les principales causes d'empoisonnement d'origine animale. Les attaques sont particulièrement fréquentes pendant l'été avec un pic aux mois de juillet et août. Pour l'année écoulée, 2008, 4 652 piqûres de scorpions ont été enregistrées entraînant le décès de 74 personnes, a-t-on appris auprès du directeur central de la prévention du ministère de la Santé, le Dr Mohamed Ouahdi, en marge de la journée d'étude médicale qui s'est tenue à Bousaâda, le mercredi passé. Malgré la mise en place de la stratégie nationale de lutte contre les piqûres et les envenimations scorpioniques, le combat contre ce fléau est vraisemblablement loin d'être gagné. En effet, la majorité des piqûres de scorpions est répertoriée dans les campagnes et en montagne, dans les Hauts Plateaux et particulièrement dans le sud du pays mais également dans la cour des maisons quand ce n'est pas dans les chambres à coucher, surtout en période de canicule où ces bestioles ont besoin de fraîcheur à l'ombre des foyers. Ces insectes vieux de 450 millions d'années qui ont préservé les mêmes facultés physiques depuis le premier jour où il sont apparus sur terre, affectionnent les lieux sauvages ou peu habités. Quoique très résistants à la chaleur, autant qu'au froid, au jeûne et aux radiations, et supportant difficilement la captivité, ils préfèrent s'abriter le jour dans des lieux humides et sombres, sous les rochers des bords de côtes, dans les crevasses en altitude, sous les pierres dans le désert, ou encore dans les débarras des fermes et autres habitations de campagne. En somme, partout où ils se sentent à l'abri d'éventuels prédateurs. Il sont capables de survivre dans des conditions de vie très rudes. On pourrait même aller jusqu'à dire qu'il s'agit d'un animal parfait. En plus de pouvoir supporter des conditions climatiques extrêmes et de ne pas manger pendant des années, cette bestiole demande un apport moindre en oxygène. Si l'homme pouvait posséder les mêmes caractéristiques, il pourrait vivre des centaines d'années. Plus de la moitié des piqûres surviennent durant la saison chaude, particulièrement aux mois de juillet et août, et le plus souvent avant 9h et après 18h, les scorpions vivant et chassant essentiellement la nuit. Ils se servent pour cela de leur aiguillon, avec lequel ils injectent du venin paralysant leur petite proie (mouches, araignées, criquets, cigales, sauterelles, etc.) qu'ils capturent toujours vivante. Les scorpions mesurent entre 1,2 cm et 25 cm et vivent de deux à huit ans. Contrairement à ce que veut la croyance populaire, ces arachnides ne s'attaquent aux hommes (généralement aux mains ou aux pieds) que lorsqu'ils se sentent eux-mêmes menacés. En outre, même si tous les scorpions sont dotés de glandes à venin, sur les 1 500 espèces répertoriées de par le monde, réparties en 9 familles, seules 25 sont considérées comme dangereuses voire fatales pour l'homme. Nos régions d'Algérie comptent malheureusement quelques-unes parmi ces espèces redoutables, dont l'Androctonus mauritanicus et australis, le Buthus occitanus (jaune) ou encore le Leiurus quinquestriatus. La gravité de l'intoxication est aussi en fonction de la taille du scorpion, le danger est moindre si celle-ci est inférieure à 2 cm , de la localisation de la piqûre : l'intoxication est plus grave quand le venin passe directement dans le sang. De plus, à l'instar des enfants de moins de 15 ans, les personnes de plus de 70 ans sont plus sensibles aux piqûres. Selon les spécialistes, après la piqûre, le venin se diffuse rapidement dans le corps et se fixe au niveau des tissus. Douleur, rougeur et engourdissement au niveau de la piqûre sont suivis, en cas d'envenimation sérieuse, de manifestations généralisées : frissons, sueurs, nausées, vomissements, diarrhées, ballonnement abdominal, hypertension artérielle, priapisme (érection prolongée). Au troisième stade, la vie de la victime est carrément mise en danger avec la défaillance des fonctions vitales : neurologique, respiratoire et cardiovasculaire. A ce niveau, sans traitement, la mort survient dans les 6 à 15 premières heures dans environ 20% des cas chez l'adulte et jusqu'à 35% des cas chez l'enfant. En cas de piqûre de scorpion, et comme le recommandent les secouristes, il ne faut jamais toucher la plaie sans avoir un appareil adéquat. Il ne faut pas non plus poser un garrot ou chauffée la zone qui a été mordue. Dans tous les cas, il est important de calmer la victime, ce qui empêchera le venin de se propager dans tout le corps et son entourage. Enfin, il est important de savoir à quel type de scorpions on a affaire. En Algérie, les plus redoutables sont l'Androctonus mauritanicus qui est de couleur noire et le Butus occitanus de couleur jaune possédant un dos noir ou marron. Ensuite, désinfecter la plaie, administrer du paracétamol contre la douleur et d'autres médicaments symptomatiques puis appeler le centre antipoison le plus proche afin de s'informer sur la démarche à suivre. Un bon nombre de victimes de piqûres de scorpions arrivent malheureusement trop tard pour être secourues. Les proches de la victime se débrouillent alors avec les moyens du bord, chacun y allant de son remède-miracle millénaire, sans se douter un seul instant du danger qu'il fait courir au blessé : le garrot avec le risque de gangrène et donc d'amputation du membre piqué, l'incision et scarification avec le risque de diffusion du venin et d'infection ou encore la succion avec le risque d'envenimation de celui qui la pratique. Ce sont généralement les traitements traditionnels les plus connus dans nos régions. La faute est à l'ignorance, clameront certains. Mais surtout à une répartition inégalitaire des structures et des effectifs hospitaliers, la plupart des douars du pays étant situés à des dizaines de kilomètres au moins du dispensaire sommaire le plus proche, et l'écrasante majorité des centres de prise en charge des intoxiqués se trouvant uniquement dans les grandes villes. Que faire alors ? Difficile à dire, mais il est bien nécessaire de faire quelque chose pour sauver des vies. Entre autres questions qui effleurent l'esprit c'est la suivante : pourquoi ne pas organiser une campagne de nettoyage des régions les plus touchées pour mettre les scorpions hors d'état de nuire ? Le fléau est si répandu qu'il suscite des journées d'études, des conciliabules entre professionnels de la santé à M'Sila et des régions les plus touchées du pays. La prévoyance, la formation des infirmiers, l'information, l'équipement des petits centres de soins sont autant de recommandations faites chaque année. On ne sait si elles sont suivies d'effets ou pas, mais le fait est que le fléau continue à faire des victimes de manière apparemment constante. N'oublions pas qu'un seul enfant qui meurt de nos jours, avec tous les moyens dont nous disposons, d'une morsure de scorpion, de serpent ou de tout autre bestiole, est une victime de trop.