Les piqûres de scorpions prennent une ampleur dramatique en Algérie. Spécifique aux wilayas des Hauts Plateaux et du Sud, l'envenimation scorpionique ne cesse, d'une année à une autre notamment durant l'été, de causer des décès au sein de la population de ces régions. Il faut savoir que 5 millions de morsures de serpents, piqûres de scorpions ou d'insectes sont enregistrées chaque année dans le monde, provoquant la mort de 100 000 personnes, dont 40 000 en rapport avec une piqûre de scorpion. En Afrique, sur environ 1 million de personnes piquées par des scorpions chaque année, quelque 20 000 personnes succombent à ces envenimations. Pour ce qui est de l'Algérie, on dénombre en moyenne 25 000 à 50 000 piqûres par an et un peu moins d'une centaine de décès par an. Les enfants d'âge scolaire payent le plus lourd tribut à l'envenimation scorpionique, ils représentent 50% de la totalité des décès. Ainsi, les envenimations par piqûres de scorpions sont de plus en plus fréquentes en Algérie et représentent aujourd'hui un véritable danger pour la santé publique. Au cours d'un séminaire national sur ce phénomène tenu mercredi et jeudi derniers à Boussaada, les médecins et experts en la matière ont confirmé ce constat amer. Pour sa part, le directeur de la prévention au ministère de la Santé, M. Wahdi Mohamed, a signalé que 2008 avait été marquée à l'échelle nationale par 74 décès par envenimation scorpionique, parmi lesquels neuf dans la seule région de Boussaada sur les 15 enregistrés dans toute la wilaya de M'sila. A ce propos, il a attribué l'ampleur du phénomène à M'sila à «l'absence» d'un programme de prévention associant les intervenants locaux dont le secteur de la construction et de l'urbanisme et orienté vers la préservation de la propreté de l'environnement, la lutte contre les constructions illicites, l'enlèvement des déblais et le désherbage des aires mitoyennes aux habitations. Reconnaissant qu'il s'agit bel et bien d'une véritable menace pour la santé publique, le représentant du ministère de la Santé a relevé que l'envenimement scorpionique nécessite l'association des médias et du mouvement associatif pour contenir ce fléau qui a causé l'année dernière 50 000 piqûres réparties sur la moitié des wilayas du pays et même dans certaines villes côtières. Même si le nombre des décès a été ramené de 150 à 74 par an au cours de ces dernières années, des efforts supplémentaires doivent être fournis, surtout lorsqu'on sait, a-t-il dit, que «70% des piqûres ont été signalées en 2008 à l'intérieur des maisons et 30% à l'extérieur, alors que ces proportions étaient auparavant inversées». Cela s'explique par l'absence de prévention dans les maisons, a-t-il relevé, estimant qu'une telle situation sape les efforts d'amélioration urbaine tels l'éclairage public et l'aménagement des routes, qui, «aussi simples qu'ils paraissent, ont permis de réduire notablement le nombre de piqûres à Aïn Sefra et El Bayadh». D'autres intervenants ont rappelé que l'Algérie dispose depuis deux décennies d'un plan de lutte contre l'envenimation scorpionique, notant que certaines wilayas ont obtenu des résultats sensibles, citant Laghouat qui affiche zéro décès depuis cinq années consécutives. Concernant la formation des réanimateurs et la fourniture du sérum antiscorpionique dans les unités sanitaires, le ministère de la Santé se montre rassurant et précise que tous les moyens sont disponibles. Néanmoins, de nombreux médecins montent au créneau pour indiquer que la campagne de sensibilisation des populations ne devrait pas être limitée à la seule saison de l'été où les enfants sont en vacances mais étalée tout au long de l'année avec l'implication des enseignants sur les moyens de prévention et les soins d'urgence en cas de piqûre en insistant sur la rapidité d'évacuation des personnes piquées vers les structures de soins qui doivent disposer de tout ce qui est nécessaire à la prise en charge d'une envenimation scorpionique. D'autres encore soulignent qu'un plus grand effort doit être déployé pour réduire la prolifération des scorpions en particulier dans les sept wilayas du Sud, Ouargla, Djelfa, El Bayadh, Biskra, Naama, El Oued et M'sila, car ces dernières constituent une réelle zone rouge. A. S.