Parlons, un peu, de cette «fameuse» stratégie «EFC». A bien voir les choses, ce n'est qu'une autre stratégie «import-import» mais, cette fois-ci, excellemment bien déguisée (car…,qui peut dire non à la science, et au savoir !). Cette stratégie ne préconise-t-elle pas, en premier lieu, je cite «d'investir massivement dans les technologies de l'information et de la communication», d'autant plus que «l'Algérie a, certainement, les moyens pour investir dans des efforts EFC de grande ampleur, grâce à son pactole pétrolier» ?!... Les experts de la question ne précisent-ils pas, également, que «dans ce type d'économie ce sont les secteurs de haute technologie, et des services, qui sont les principales sources de création d'emplois.» Et…comme nous ne produisons pas cette «haute technologie», bien entendu nous y mettrons notre «pactole pétrolier» pour nous la procurer. En réalité, nous n'avons aucune envie d'aller plus loin dans l'analyse de cette pompeuse «EFC». Pourquoi ? Parce que nous ne voulons pas perdre notre temps, ni brouiller les priorités de notre peuple et de nos gouvernants, en discutant ces «montages» de théoriciens en quête d'aventure, de renommée et de distinction (car…il faut peut être le noter, cette fameuse «EFC» est, d'abord, fortement préconisée par les experts de la Banque Mondiale). Nous sommes, réellement, désolés de dire cela mais…que tous ceux qui veulent booster leurs carrières le fassent loin des intérêts de notre peuple, et de notre pays ; qu'ils jouent avec l'avenir de leurs nations, au lieu de la nôtre (ou, peut-être, l'avenir des leurs est trop précieux pour cela ?!…). Nous aurions, probablement, été bien plus indulgents avec ces experts d'organismes internationaux si notre peuple n'était pas à un moment critique de son histoire ! Car une chose est claire : nous sommes au bord du gouffre ! Soit nous nous en sortons, soit nous sommes perdus ! Que proposent nos décideurs pour le prochain quinquennat ? En réalité, rien n'est encore bien clair sauf, peut-être, cette déclaration de notre actuel président, que nous avons trouvé plutôt judicieuse : «Le volontarisme de l'Etat est nécessaire et devra être clairement affiché, dans cette étape, où il s'agit, pour nous, de reconstituer et développer nos capacités industrielles et technologiques pour aller vers la diversification de l'économie, et l'intégration positive au marché international». Et nous disons, alors, à notre président - ainsi qu'à notre premier ministre - que nous attendons, justement, les programmes qui sont censés réaliser ces précieuses ambitions (…nous les attendons, vraiment, ces programmes ; impatiemment même ! Car, tout l'avenir de notre peuple en dépendra ! Et l'actuelle présidentielle dans notre pays n'aura de «réel» sens que si, «au moins», les grandes lignes de ces programmes sont présentées au peuple, et à ses élites ! Le bilan étant fait, notre élite gouvernante peut passer, maintenant, au plan d'action qu'elle propose à son pays pour ce prochain quinquennat ! Bien sûr, nous parlons d'un véritable plan d'action, pour «préparer» l'après-pétrole, et la remise sur pieds de la nation ; et non d'un plan d'action pour «bâtir plus de logements» et «compléter quelques autoroutes» - même si les efforts dans ces domaines sont vraiment louables !...). Quand nous aurons, enfin, les grandes lignes de ces «précieux» programmes, il nous sera, alors, aisé de dire à nos deux hauts responsables, ainsi qu'à notre peuple, si les ambitions ci-dessus indiquées sont réalisables par ces programmes, ou pas (car…il vaut, absolument, mieux le savoir maintenant, plutôt qu'après avoir dépensé 150 milliards de dollars, et après avoir perdu cinq précieuses années – c'est-à-dire, soit le quart d'une période de décollage économique, soit…le quart d'une période de descente aux enfers !). Désinformation et leçons de décollage économique Durant notre travail de prospection sur l'émergence économique sud-coréenne, plus nous élargissions notre recherche, plus nous nous rendions, clairement, compte que 98% de l'abondante documentation sur le sujet – et des avis de professionnels qui en étaient rattachés – étaient, en réalité, de la pure désinformation !! Pourquoi une telle désinformation ? Parce que, sur ce point précis, on se retrouve au beau milieu d'une question dont les enjeux poussent les conflits d'intérêt entre les nations influentes à leur paroxysme !! Cette désinformation consiste à communiquer de fausses idées, et de fausses leçons, non seulement pour masquer les vraies raisons, et égarer le prospecteur, mais aussi pour gagner de juteux marchés. Cette tactique entraîne les pays non développés à négliger des secteurs entiers qui sont, réellement, décisifs dans le lancement de leur développement. Ceci fait, les pays désinformateurs s'assurent, encore plus, la suprématie technologique et la prédominance économique. Jusqu'à ce jour, ce genre de désinformation, reçu sans méfiance, a conduit, immanquablement, à une élimination «en douceur» de tous ces pays attardés, qui risquent de devenir d'éventuels futurs concurrents s'ils adoptaient d'authentiques stratégies de développement (…juste en les lançant sur de fausses pistes !). Cette pratique est, malheureusement, bien plus répandue qu'on ne le croit, et elle est une partie intégrante de la féroce guerre économique mondiale que connaît le monde, actuellement. Toutefois, à côté de ces 98% de désinformation, il existe un 2% d'intégrité et d'honnêteté scientifique, que nous avons eu le bonheur de déceler, par exemple, dans les articles de Dani Rodrik, ce professeur d'économie politique internationale à la Harvard University. Nous trouvons d'une grande utilité de reproduire, ici, quelques extraits de ses articles, que nous considérons «extrêmement précieux» pour tout pays encore sous-développé 2: «Les partisans de la mondialisation économique développent des conceptions utopiques sur la prospérité, dont les pays en développement bénéficieront, s'ils ouvrent leurs frontières au commerce et aux capitaux. Ces promesses, illusoires, détournent l'attention et les ressources des pays pauvres des réformes internes, qui sont réellement nécessaires pour favoriser la croissance économique.» «Des pays, comme la Corée du Sud et Taiwan, n'ont que peu souffert des contraintes internationales, et n'ont payé qu'une faible part des coûts actuels de l'intégration, durant les années 60 et 70, lorsqu'ils ont connu leur croissance formatrice. À cette époque, les règles commerciales globales étaient peu nombreuses, et les économies n'étaient pratiquement soumises à aucune des pressions actuelles, pour ouvrir leurs frontières financières. Ces pays ont, donc, pu conjuguer leur orientation extérieure avec des politiques non orthodoxes : niveaux élevés des barrières tarifaires et non tarifaires, propriété publique de larges segments de la banque et de l'industrie, subventions aux exportations, exigences quant au contenu national des produits, violations des règles de brevet et de copyright, restrictions aux flux de capitaux (y compris sur l'investissement direct étranger). De telles politiques sont, aujourd'hui, interdites par les règles commerciales actuelles, ou bien font l'objet de critiques virulentes de la part d'organisations comme le FMI et la Banque mondiale. » «La Chine a, également, adopté une stratégie très peu orthodoxe, en violant quasiment toutes les règles d'or, à commencer par celle de la propriété privée. L'Inde, qui a enregistré une croissance économique très soutenue, au début des années 1980, reste une des économies les mieux protégées au monde. Dans tous ces pays, la libéralisation du commerce s'est effectuée graduellement, selon un processus s'étendant sur des décennies, et non pas sur quelques années. Les gouvernements n'ont, véritablement, libéralisé les importations qu'une fois achevée la transition vers un taux élevé de croissance.» «Ces stratégies de croissance comportent, généralement, des innovations peu orthodoxes, qui s'éloignent des «Tables de la Loi» de l'intégration à l'économie mondiale. Les entreprises publiques, durant la restauration Meiji au Japon, les entreprises de quartier et de village, en Chine, les zones franches de l'Ile Maurice, les incitations fiscales, en faveur d'investissements prioritaires, à Taiwan, les subventions aux exportations en Corée du Sud, la protection des industries naissantes au Brésil, durant les années 60 et 70 : ce ne sont que quelques-unes, des innovations qui ont permis d'enclencher le cycle de l'investissement et de la croissance, dans le passé. Aucune d'elles n'est sortie de la boîte à outils des économistes de Washington.» Et le professeur Dani Rodrik conclut, enfin : «Il n'existe, tout simplement, aucune alternative à un plan économique conçu en fonction des nécessités internes. Les responsables politiques qui cherchent des réponses du côté de Washington, et des marchés financiers, se condamnent à reproduire, mécaniquement, les principes en vogue, avant la désillusion finale.» Insistons donc, auprès de nos compatriotes, sur un point important : l'avenir de notre pays ne sera pas ce que prédisent les grands experts internationaux de tous bords (qui n'ont, jamais, été à l'origine d'un quelconque décollage économique mais qui excellent, toujours, en nous expliquant pourquoi nous ne pouvons pas reproduire l'expérience de tel ou tel pays émergent…). S'ils considèrent que nous n'avons pas les «ressorts» nécessaires pour réaliser de tels exploits, ils sont libres de penser ce qui les arrange. Mais, qu'ils ne s'attendent pas à ce que nous adoptions cette même piètre opinion de nous-même ! Ainsi, et en dépit de tout ce que ces grands experts pensent, et prédisent, notre avenir sera ce que nous déciderons qu'il soit ! Pour finir, enfin, cette partie nous dirons ceci : notre lecteur a dû, certainement, remarquer que pour réaliser son décollage économique la Corée du Sud n'a pas «importé» des hommes d'une autre planète, ni d'un autre continent. Ce sont ces mêmes Sud-Coréens qui, durant des décennies, ont essuyé échec sur échec, qui vont, magistralement, mener leur pays au sommet de la puissance économique. Comment ces mêmes hommes sont-ils passés, d'une succession de lamentables échecs à un spectaculaire succès mondial ? Eh bien, simplement, parce qu'à un moment donné, ils ont décidé de reprendre confiance en eux et de suivre leur bon sens, et la voie de la sagesse et du courage. Ces hommes ont osé reprendre en main leur destin, et ils l'ont courageusement libéré d'une longue hypothèque ! Que fut le résultat ? Ces ex-perdants vont, alors, forger, et avec un cran admirable, un nouveau et rayonnant destin pour leur descendance et leur nation… On dit que «les grandes âmes sont capables des plus grandes vertus» ; or, à travers les siècles, et tout au long de notre histoire, nous n'avons jamais manqué de grandes âmes. Oserions-nous alors rêver qu'un revirement, semblable à celui des Sud-Coréens, puisse, un jour, se produire chez nos hommes et qu'ils décident, enfin, d'illuminer, par leurs actions justes et vigoureuses, notre pâle présent et notre avenir si incertain ? (Suite et fin) Dr Dokhane Nahed Maître de conférence, enseignante à l'Université de Boumerdès e-mail : [email protected]