Dans le même temps, la Chine, ignorant les pressions de ses principaux partenaires commerciaux concernant la faiblesse du yuan, a réaffirmé que la stabilité était dans l'intérêt de tout le monde. Ces déclarations soulignent l'incapacité des grandes puissances économiques à mettre fin aux tensions sur les changes, malgré les appels lancés lors du sommet du G20 à Pittsburgh, en septembre dernier, en vue de parvenir à une solution. Pour effacer ces déséquilibres, particulièrement criants au vu de l'excédent de la balance courante de la Chine et du déficit de celle des Etats-Unis, il faut un dollar plus faible et un raffermissement du yuan, jugent nombre d'économistes. «Il y a eu un consensus général depuis le début de la crise pour dire qu'il faut agir, mais aucun progrès n'a été enregistré en terme de politique de changes», estime Neil Mellor, spécialiste des changes pour Bank of New York Mellon à Londres. Le nouveau ministre japonais des Finances, Naoto Kan, a déclaré jeudi qu'il travaillerait en collaboration avec la Banque du Japon pour amener le yen à un niveau approprié compte tenu de l'importance de la devise japonaise pour ce pays exportateur, deuxième économie mondiale. Un yen faible est favorable aux exportations japonaises. Selon Naoto Kan, beaucoup d'entreprises jugent approprié un dollar à 95 yens. Mais dirigeants et économistes craignent que ce type de politique ne débouche sur des dévaluations compétitives susceptibles à leurs yeux de saper la reprise économique. La Chine pour un yuan «stable» Après les propos du ministre nippon, le dollar a atteint un plus haut de quatre mois face au yen à 93,27 yens, la devise japonaise cédant près de 1 % selon les données Reuters. Dans le même temps, le billet vert progressait de 0,6 % par rapport à un panier de devises, et de 0,56 % face à l'euro. La France s'est dite préoccupée par les déséquilibres sur le marché des changes, dont elle fera une priorité lorsqu'elle prendra la présidence tournant du G8 et du G20 en 2011. Nicolas Sarkozy a déclaré, jeudi, que le désordre monétaire était devenu «nacceptable», au lendemain d'une allocution à Cholet (Maine-et-Loire) où le Président français avait qualifié de «problème considérable» la disparité entre le dollar et l'euro. Au micro de la chaîne américaine CNBC, la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a enchéri en estimant que le G20 devait se saisir de la question des changes afin que l'euro cesse de faire les frais de la dépréciation du dollar et du yuan en corollaire. «En 2010 et plus encore en 2011, il faudra s'attaquer à ces problèmes car l'euro ne peut se retrouver à être seul à souffrir d'une situation dont profitent le dollar et le yuan», a ajouté la ministre, qui s'exprimait en anglais. La parité euro-dollar a repassé brièvement à l'automne dernier la barre des 1,50 dollar, se rapprochant du pic de 1,6040 touché en juillet 2008. Elle se traitait, jeudi, à 1,4318 vers 16h50 GMT. Lors de la création de l'euro début 1999, elle se situait juste au-dessus de 1,18. Bien que Paris et Tokyo s'en prennent à la faiblesse du dollar, beaucoup de spécialistes jugent que le principal problème est le niveau du yuan, qui est de fait adossé à la devise américaine. Mais le ministre chinois du Commerce, Chen Deming, a exclu toute dévaluation ou réévaluation jeudi, jugeant qu'un mouvement serait nuisible à l'économie mondiale à l'heure où la reprise s'annonce. «La devise chinoise, le yuan, doit assurément conserver sa stabilité. C'est bon pour le monde également», a-t-il déclaré lors d'une visite à Ankara, en Turquie.