L'absence de contrôleurs des prix au niveau des marchés est également pour quelque chose. Rien ne semble pouvoir arrêter l'envolée des prix des fruits et légumes. Même les mesures prises dernièrement, par le gouvernement à travers la politique de régularisation, et de plafonnement des prix, et les nombreuses aides apportées aux agriculteurs n'ont pu, un tant soit peu, apaiser les tensions qui pèsent sur le consommateur algérien. Ainsi, les légumes qui constituaient, principalement, le menu des petites bourses boudent à présent les marmites. Histoire de prendre le pouls des «souks» de l'Algérois et partager, par la même occasion, le stress quotidien infligé aux petites bourses, La NR a visité pour vous deux marchés des fruits et légumes situés dans deux quartiers différents de la capitale. Notre première station fut le marché couvert des fruits et légumes de Belouizdad, connu sous le nom de «marché T'nach». Malgré son emplacement en plein cœur d'un quartier populaire, les commerçants ne semblent pas prendre ce détail en ligne de compte pour fixer les prix des fruits et légumes. En effet, le kilogramme de pomme de terre est proposé entre 30 et 35 DA, le chou-fleur est vendu à 100 DA, la tomate est cédée entre 100 et 120 DA. Quant aux aubergines, elles sont également proposées à 100 DA. La salade est cédée, quant à elle, à 80 DA. Le prix des viandes ne fait pas abstraction à la règle. Le kilogramme de poulet est proposé à 270 DA, la viande de mouton à 850 DA. Quant au veau, il est cédé à 950 DA. Rien que ça ! Les fruits sont devenus un luxe pour les familles. Les poires sont proposées à 220 DA, les oranges sont cédées à partir de 150 DA, les bananes varient entre 100 et 150 DA et les pommes sont proposées à partir de 140 DA. Nous nous sommes rendus ensuite au marché communal de la cité Sellier à Hydra. A notre grande surprise, nous nous sommes aperçus que les prix proposés dans ce marché sont nettement moins chers que les prix proposés dans le souk du quartier populaire de Belcourt. A Hydra, le kilogramme de pomme de terre est proposé entre 25 et 30 DA, le chou-fleur est vendu à 70 DA, la tomate est cédée entre 60 et 80 DA. La salade, quant à elle, coûte 60 DA. Même le prix du poulet est nettement plus inférieur. Le kilogramme est proposé à 200 DA, bien que les détaillants des deux marchés s'approvisionnent chez les mêmes grossistes. La différence est nette. C'est la preuve irréfutable que les commerçants fixent les prix selon leur humeur. Ami Omar, retraité et habitué du marché, renvoie les causes de ce «carnage» à «l'absence totale de contrôle des prix. Chaque personne fixe sa propre marge bénéficiaire selon son propre barème et ce, en commençant par l'agriculteur», a-t-il déploré. «Je ne vous cache pas que chaque matin, en sortant de la maison pour faire le marché, je suis en proie à un terrible stress. Je ne sais pas de quoi sera fait mon lendemain», a-t-il ajouté. Pour son compagnon, Ami Tahar, un autre retraité, cette situation est devenue insupportable. «Chaque jour, vers 11h30, des femmes, des enfants et des vieillards viennent faire les poubelles pour ramasser les légumes pourris, jetés quelques instants auparavant par les commerçants. Comment rester insensible à ce genre de situation ?» L'absence de contrôleurs des prix n'est pas l'unique raison à cette envolée. L'urbanisation anarchique qu'a connue le pays durant la décennie noire est également responsable de cette situation. Beaucoup de terres agricoles, sous l'œil impavide des autorités, se sont transformées en villas anarchiquement construites. En attendant de trouver une solution tangible à cette situation qui devient au fil du temps intenable, les petites bourses, afin de survivre, continuent leur combat quotidien contre la cruauté et l'ingratitude de la vie, et ce, au détriment des règles de base de la dignité humaine.