Adrar en compte 294. Chaque ksar a son propre marabout et son propre mausolée appelle «Rawda», généralement dressé à l'effigie de ce personnage charismatique et spirituel. La «Rawda a la forme d'un minaret et est généralement arrosée de chaux. Cette fête «la ziarra» revêt un caractère tout à fait «particulier et connaît une attraction et une affluence que ni le vent de sable, ni la chaleur, ni le Ramadan ne repoussent ou n'annulent. Elle se déroule chaque année le 1er mai. La «ziarra» se déroule sur deux jours. La première journée appelée «El Mize» annonce le début de la fête où les convives ne sont pas nombreux. La deuxième journée connaît l'affluence de centaines d'invités qui arrivent de toutes parts et dans la journée, on assiste à un véritable ballet de couscous où les gens font ripaille. Assis à même le sol, formant des groupes de 8 ou 10 personnes, les convives s'installent. Il n'y a pas de table, une toile cirée est étalée. Dans un ordre immuable, lait, dattes, melfouf défilent. Puis, arrive le couscous garni de viande et de légumes (lentilles ou pois chiches…) recouvert d'un plat métallique. Sitôt, le couvercle soulevé, quelqu'un se saisit de la viande et commence une répartition équitable par petites boulettes que des mains habiles s'empressent de faire disparaître au fond gosier. Salade, fruits et limonade clôturent le repas. Puis vint le moment tant attendu, celui de siroter les trois verres de thé fort qui vous râpent la langue. Cependant, la «ziarra» de «Sidi Reggani» demeure sans aucun doute la plus prestigieuse et la plus connue dont la réputation dépasse largement les frontières. En effet, chaque année, le 1er mai exactement a lieu cette grande fête qui attire outre les habitués de la wilaya qui se déplacent en grande nombre, mais aussi beaucoup d'étrangers venus du Mali et du Niger et de nationaux d'Alger, Tlemcen, Constantine et Oran. Cette fête se déroule à Reggane distante de 140 km du chef-lieu. Dans la journée, les gens continuent à affluer en taxis, en bus, en camions, à pied ou à dos de dromadaire ou d'âne. Tous les moyens sont bons pour converger vers ce lieu mythique, dont le secret est jalousement gardé. Le nombre de visiteurs, de curieux augmente chaque année et les services de police et de gendarmerie ont fort à faire afin d'assurer la sécurité de toute ce monde. Il faut rappeler que la chaleur n'épargne personne et chacun se réfugie chez des amis ou des proches pour se désaltérer et se remplir la panse. Pour ceux qui viennent de loin et qui ne connaissent personne, les maisons de Reggane leur sont grandes ouvertes et les citadins, connus pour leur hospitalité légendaire, les attirent en leur offrant le gîte et le couvert dans une ambiance fraternelle. Peu avant 18 heures, les gens se dirigent vers la sortie de la ville, vers la route qui mène à Bordj Baji Mokhtar, vers l'endroit séculaire pour le rassemblement. Des véhicules s'étendent à perte de vue. Des femmes, des enfants, des hommes âgés et jeunes remplissent cet immense vide et telle une marée humaine, cette terre se substitue à la palette du peintre. Véritable fresque humaine qui continue à grossir à vue d'œil : on se croirait à La Mecque au fil des minutes qui s'égrènent. Pourquoi tant de monde ? Qu'est-ce qui les attire ? Ils attendent tous la grande Fatiha qui sera célébrée une fois la prière de El Maghreb accomplie. Les rayons solaires déclinent à l'horizon, le crépuscule enveloppe cette masse à l'annonce de la prière. Un silence abyssal règne. Sitôt la prière terminée, c'est la Fatha. Chacun se soumet en psalmodiant versets coraniques, chacun se recueille. Tous invoquent le pardon d'Allah et la bénédiction du seigneur dans une foi inébranlable. Sitôt la fatha exécutée, les gens se dispersent. Heureusement, le service d'ordre veille et ordonne leur départ par vagues successives. La fête n'est pas encore terminée puisque le couscous est là et il faut le déguster et Reggane et les ksour avoisinants se sont tous préparés pour offrir à leurs hôtes un bon repas. Beaucoup attendent le début de la soirée pour assister et se démener à l'écoute de «tbel» et de karkabou. Cette joie et cet enthousiasme qui se lisent sur les visages rassurent et dans un élan de solidarité générale, chacun est heureux, oubliant pour un instant les soucis et les tracasseries de la vie quotidienne pour se laisser bercer et emporter ce rythme qui déferle inlassablement.