L'Espagne a fêté frénétiquement jusqu'au bout de la nuit, aux cris de «Campeones, Campeones, oé, oé, oé!», la première Coupe du Monde de son histoire. Dans le centre de Madrid, peu avant 4h du matin (2h GMT) des dizaines de milliers de jeunes, filles et garçons, portant presque tous le maillot rouge de la «seleccion» ou torses nus, enrobés dans des drapeaux espagnols sang et or, envahissaient encore les principales artères du centre. «On fait la fiesta, avec Andres Iniesta !», l'auteur du but victorieux, chantaient un groupe de fans de «la Roja» à Puerta del Sol, la place emblématique du centre de Madrid. Dans la rue Montera adjacente, des prostituées tentaient en vain d'alpager des supporteurs tout à leur joie et leur ivresse. «Le football, ce n'est pas seulement un truc de mecs, ça appartient à tout le monde», revendiquait en riant Ester, 42 ans, dans un bar sur fond de variétés andalouses à plein régime. Les rues de la capitale, jonchées de gobelets, canettes et sacs plastiques ressemblaient à une gigantesque poubelle à ciel ouvert. De nombreux policiers surveillaient placidement la liesse. Un hélicoptère de la police balayait du ciel la foule de son puissant projecteur, tandis que résonnaient pétards et sirènes de véhicules du Samu. Les médias espagnols décrivaient des scènes similaires dans toute l'Espagne, à Malaga, Valence, Valladolid. Pas d'incidents notable, sauf à Grenade (sud) où la police a chargé pour disperser des supporteurs agités. Même dans la nationaliste capitale catalane Barcelone, normalement peu encline à supporter «la Roja», 75 000 fans ont vibré devant un écran géant. Des centaines se sont ensuite baignés dans la fontaine de Montjuic. Cette fiesta du siècle était partie pour durer au-delà du petit matin. Les Madrilènes réservent un triomphe tout aussi démesuré aux héros de Johannesburg, arrivés en début d'après-midi. «Je suis heureux et ému (…) J'ai souffert comme rarement. Mais Iniesta a été spectaculaire», a déclaré Zapatero sur la radio Cadena Ser, félicitant en direct le père du joueur. «Tant de générations, depuis que je suis tout petit, ont espéré gagner un Mondial. Et enfin, enfin, c'est arrivé», a ajouté Zapatero. Alors que l'Espagne se débat dans une crise économique majeure marquée par un chômage galopant, il s'est dit convaincu que cette victoire «va nous donner de l'estime de soi, de la confiance» et que le pays va «se lever avec force». Dans le centre de Madrid, des fumigènes rouges ont illuminé le ciel du «Fan Park» au coup de sifflet final, où 250 000 supporteurs ont assisté à la rencontre sur quatre écrans géants, selon une estimation des médias. «Ouaahhhhhh!!!!!», a hurlé la foule sans reprendre son souffle pendant plus de deux minutes quand Iniesta a marqué le but libérateur, à la fin de la prolongation. Des «Viva Espana !» et «Espagnols, Espagnols, nous sommes Espagnols !» ont jailli à l'unisson de millions de foyers, bars et places surchauffés de tout le pays. «On va célébrer ça comme des dingues, toute la nuit, tout lundi, jusqu'à mardi matin», confiait, Miguel Angel, 41 ans, venu spécialement de Bilbao (Pays Basque) pour l'événement à Madrid. Le roi du Maroc voisin, Mohammed VI a adressé ses félicitations à roi Juan Carlos et à Zapatero. Les militaires espagnols en mission à l'extérieur, ont fêté la victoire dans leurs bases d'Afghanistan ou au Liban.