Les perspectives des réserves de pétrole et de gaz et du prix de cession du marché du gaz restent incertaines. La majorité des contrats à moyen et à long terme arriveront entre 2012 et 2015 à expiration, ce qui ne vas pas sans avoir des conséquences sur les recettes de Sonatrach, donc sur le devenir de l'économie algérienne où tout est irrigué par les hydrocarbures. Cette situation doit être replacée à la fois au sein de la nouvelle configuration de la stratégie énergétique mondiale et du nouveau défi écologique avec un changement du modèle de consommation énergétique qui se dessine entre 2015 et 2020, dont les énergies renouvelables, la généralisation de ces nouvelles technologies pouvant les rendre rentables par rapport aux énergies fossiles. 1) Lors de la conférence internationale tenue à Berlin le 21 mai 2010 sous le thème «Dialogue énergétique : Russie-UE, aspect gazier», le président de GDF Suez, Jean-François Cirelli, l'Allemand E.ON Ruhrgas et le président de l'Union européenne de l'industrie du gaz naturel (Eurogas), Domenico Dispenza, ont estimé que les accords à long terme sur la livraison de gaz à l 'Europe doivent pouvoir subir des modifications compte tenu de la conjoncture économique et de la demande à Gazprom de baisser le prix du gaz prévu par leur contrat à long terme ou de changer certaines clauses dans les contrats. Or, Gazprom, qui indexait jusque-là ses prix sur ceux du pétrole, a accepté de vendre une partie du gaz aux prix spot (à court terme) qui sont d'environ 25 % inférieurs aux prix des contrats à long terme, l'écart pouvant être plus important si le cours du pétrole est élevé et si celui du gaz sur le marché spot reste au niveau de 4 dollars le MBTU. Selon l'influent quotidien économique espagnol l'Expansión du 24 mai 2010, l'Espagne demanderait à l'Algérie une révision à la baisse du prix du gaz et, paradoxe, c'est l'Algérie qui demandait dans un récent passé un relèvement des prix de cession du gaz à l'Espagne et à Gaz de France, remettant en cause le prix de cession du gazoduc Medgaz, exploité par un consortium composé des groupes espagnols Endesa (12 %), Iberdola (20 %) et Cepsa (20 %), du français GDF Suez (12 %) et de Sonatrach (36 %). Cela peut, par ricochet, se répercuter également sur le prix du gazoduc Galsi (Europe via Italie), puisque le projet Nigal devant relier le Nigeria à l'Europe via l'Algérie, d'une capacité de 20 à 30 milliards de mètres cubes par an destinés en majorité au marché européen dans ces conditions ne sera plus rentable. Selon l'étude de faisabilité confiée à la société britannique Penspen/IPA, ce projet, pour se matérialiser coûtera plus de 13 milliards de dollars contre une prévision au départ de 7 milliards de dollars, sans compter la résolution de certains conflits frontaliers. Ce projet devrait permettre à l'Algérie de concurrencer Gazprom et la Norvège pour passer à l'horizon 2015 de 10 % actuellement à 15 % pour l'approvisionnement de l'Europe. Les contrats de l'Algérie avec la Turquie, pays émergent à fortes potentialités, annoncés pour 2012 sont encore plus problématiques — quel prix de cession ?∞— car, dans la pratique des affaires, il n'y a pas de sentiments, la Turquie ayant favorisé récemment l'accès des terminaux venant de la Russie, traversant son territoire et ayant une stratégie agressive vers les pays pétroliers et gaziers du Moyen-Orient. Le groupe Sonatrach a annoncé qu'il négociait actuellement des contrats de livraison à long terme de GNL avec quelques pays asiatiques. Or, pour le cas Asie, il s'agit de prendre en compte la concurrence des pays d'Afrique et surtout de l'Iran qui, avec les tensions géo-politiques, a besoin de financement (plus de 15 % des réserves mondiales de gaz conventionnel contre 35 % pour la Russie) et surtout pour le GNL du Qatar (10 % des réserves mondiales) avec des complexes d'une capacité presque du double à ceux de l'Algérie (importantes économies d' échelle) et sa proximité géographique avec l'Asie (réduction du coût de transport), d'où sa réticence à la réunion à Oran du 19/21 avril 2010 avec la Russie de refuser de réduire l'offre, l'Algérie devant contourner toute la corniche africaine pour arriver à l'Asie. 2) Pour le gaz, dont le marché est segmenté, ce qui rend d'ailleurs impossible une OPEP du gaz à l'image de celle du pétrole, nous savons qu'en moyenne, le prix de cession dans les contrats à moyen et à long terme (non le marché spot), tenant compte, bien entendu, des fluctuations du dollar, monnaie de référence, est d'environ 1/10e du prix du pétrole, encore qu'existent des différences de prix mais avec un écart faible, fonction des zones géographiques et des modalités de contrats. L'expérience historique a montré que la formule d'indexation du gaz sur celui du pétrole pose problème car n'ayant pas eu toujours eu une proportionnalité entre le prix du marché du pétrole et celui du gaz et cela est vrai depuis 2009/2010 avec le développement du marché spot par le gaz non conventionnel. Cela est important pour l'Algérie puisque le gaz (GN et GNL) représente environ un tiers de la valeur en devises de ses exportations et beaucoup plus à l'avenir puisque pour le pétrole ayant moins de 1 % des réserves mondiales allant, à moins d'un miracle, vers l'épuisement dans moins de 18 ans. Si l'Algérie est mieux dotée en gaz, ce dernier représente actuellement selon les statistiques internationales 3% des réserves mondiales (4.500 milliards de mètres cubes gazeux, estimation de la revue BP pour 2006/2007). Dans ce cadre, l'Algérie a programmé d'importants investissements tant à travers les canalisations (Medgaz et Galsi) que la construction de deux GNL (Skikda et Arzew), les exportations devant tourner autour de 60 % de GN et 40 % de GNL horizon 2014/2015, et pour ces investissements, au départ, il était prévu que Sonatrach approvisionne la cote Est des Etats-Unis d'Amérique.