Il y a deux mois, on ne donnait pas cher du Vieux Continent; mais il apparaît aujourd'hui qu'elle a eu un bon deuxième trimestre et que la croissance américaine s'essouffle. Après la crise grecque et ses développements, l'affaire paraissait entendue : ce que l'Europe savait le mieux produire, c'était des déficits publics et des dettes. Pour le reste, ce n'était guère brillant : tandis que l'activité repartait vivement aux Etats-Unis et plus encore dans les pays émergents d'Asie ou au Brésil, l'Europe était durablement condamnée à une croissance molle. Pour les investisseurs industriels ou financiers, le seul mot d'ordre à suivre était très clair : tout sauf l'Europe. La monnaie européenne se négociait face au dollar à des cours encore supérieurs à ceux qui avaient été enregistrés au moment de sa création en 1999 et pourtant il n'était question que de crise de l'euro, comme s'il était évident que la situation ne pouvait que se dégrader davantage. Il fallait être vraiment benêt pour ne pas voir que la zone euro était condamnée à l'éclatement ou à l'enlisement! L'Europe va mieux Et puis, progressivement, ce sentiment a évolué. Il serait exagéré de parler d'un retournement complet de l'opinion sur l'Europe, mais le sentiment général est aujourd'hui nettement moins négatif qu'il ne l'était il y a un ou deux mois. Les raisons de ce changement sont à rechercher du côté de l'Europe elle-même, qui a pris les mesures adéquates et qui a enregistré des performances économiques relativement satisfaisantes. Elles sont aussi à rechercher outre-Atlantique, où l'activité recommence à perdre de son dynamisme. La crise grecque avait révélé toute la complexité de la zone euro : non seulement la monnaie européenne n'est pas celle d'un pays, comme c'est généralement le cas, mais d'un groupe de pays et, qui plus est, d'un groupe de pays sans réelle autonomie. Il existe bien un Eurogroupe, mais les seize pays qui en sont membres ne peuvent prendre seuls les décisions les plus importantes : tout ce qui concerne les institutions européennes et leur fonctionnement doit être discuté et décidé à vingt-sept, au niveau de l'Union. C'est, donc, au niveau de l'Union qu'a été décidée en mai la création du Fonds de stabilisation qui pourrait venir au secours d'un Etat en difficulté. C'est un fait : les procédures permettant une action collective en cas de crise sont très lourdes à mettre en œuvre. Là où la fébrilité des marchés exigerait une réponse dans un délai de quelques heures ou de quelques jours, l'Europe ne peut répondre qu'en quelques mois… Mais, en l'occurrence, elle a fait ce qu'il fallait. Des signaux positifs Ainsi l'Europe n'a pas éclaté, elle s'est dotée d'instruments lui permettant d'intervenir efficacement au cas où se produirait une autre crise de type grec et la Banque centrale européenne a montré qu'elle était capable de prendre des mesures non conventionnelles s'il le fallait. La zone euro sort de la crise mieux organisée et, en fin de compte, plus forte qu'elle ne l'était. On peut en trouver de multiples confirmations dans l'actualité récente. Alors que certains misaient sur son éclatement, c'est exactement le contraire qui se produit : les événements n'ont pas dissuadé l'Estonie de poursuivre le processus d'entrée dans la zone euro; le 1er janvier 2011, elle sera le dix-septième pays à adopter la devise européenne.