À peine débarrassée de la crise, l'Europe ferait-elle déjà moins bien que les Etats-Unis ? La zone euro est sortie de la récession au troisième trimestre avec une croissance de 0,4%, par rapport au trimestre précédent, contre 0,9% pour les Etats-Unis. Pour la zone euro, cela reste une bonne nouvelle. Après cinq trimestres consécutifs dans le rouge, le Vieux Continent renoue avec la croissance. L'Italie (+0,6%) et les Pays-Bas (+0,4%) ont enfin sauté dans le wagon de la reprise, comme la France et l'Allemagne l'avaient fait au deuxième trimestre. "L'Europe se comporte mieux qu'attendu", se félicite le chef économiste du FMI, Olivier Blanchard, pour qui, "il semble que les prochains trimestres seront meilleurs que ce que nous pensions il y a encore quelques mois". La performance pâlit toutefois au regard de ce qu'affichent les Etats-Unis, avec un rythme de croissance plus de deux fois plus fort au troisième trimestre. Il faut voir là l'effet du gigantesque plan de relance de Barack Obama. Mais "les Américains ont aussi une réactivité plus grande et plus forte, et sont largement en avance sur nous en termes de digestion de la crise", souligne Françoise Bernard, économiste à BNP Paribas Fortis. Même s'ils restent très en dessous de leur potentiel, les Etats-Unis devraient afficher une croissance de 2,2% en 2010, contre 0,7% en Europe, d'après les prévisions d'automne de la Commission européenne. Les entreprises américaines profiteront l'an prochain d'un marché de l'emploi plus souple et d'un financement plus aisé que leurs concurrentes européennes. "Nous assistons bien à un rebond dans la zone euro, mais on est encore loin d'un feu d'artifice, et la reprise va rester poisseuse", estime Carsten Brzeski, économiste chez ING. Si l'Allemagne a fait figure de bon élève (+0,7%), portée par les exportations et le bâtiment, la France a affiché une performance décevante (+0,3%). La croissance européenne ne devrait pas retrouver son rythme d'avant la crise avant fin 2011. La faute à la frilosité des banques, qui continuent à restreindre le crédit aux entreprises, et surtout au chômage : avec des taux dépassant les 10% de la population active, la demande intérieure risque de rester exsangue l'an prochain. Parmi les 16 pays de l'eurozone, tous ne seront pas logés à la même enseigne. Les économies à forte tradition exportatrice comme l'Allemagne devraient le plus profiter de la reprise, suivies par la France et la Belgique ; celles qui ne sont toujours pas sorties de la récession, comme la Grèce ou l'Espagne, vont sans doute freiner le rythme, avertissent les analystes. Dans ce contexte, l'année 2010 devrait rester une année sous perfusion. Et ce, alors même qu'il sera extrêmement difficile à la BCE d'augmenter ses taux, en l'absence de danger inflationniste.