Avec la sécheresse en Europe, la production de blé devrait s'établir à 651 millions de tonnes cette année, selon les estimations de la FAO, l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. C'est 30 millions de tonnes de moins que l'an passé. Toutefois, il n'y a pas de crainte de pénurie, selon les experts, car il y a d'autres sources d'approvisionnement. Les Etats-Unis, 1er exportateur mondial de blé, et l'Union européenne, fourniront les tonnes de blé manquantes. «Des cargaisons partent toutes les semaines des ports américains et européens qui sont d'ailleurs engorgés», explique Benoît Labouille, directeur général d'Offre et demande agricole (ODA), une société de conseil et d'analyse dans le secteur agricole. Diversifier les sources d'approvisionnement La France, premier exportateur européen de blé en Europe, devrait tirer son épingle du jeu. Même si elle a été aussi touchée par la sécheresse début juin (sa production est attendue à 35 millions de tonnes cette saison contre 36 millions l'an dernier), elle devrait profiter des déboires de la Russie pour exporter davantage vers ses clients traditionnels, les pays du Maghreb du Proche-Orient, notamment l'Egypte, premier pays importateur de blé au monde. Nos amis égyptiens sont en train de diversifier leurs sources d'achat, ils ont acheté récemment du blé français et ils reviendront sans doute aux achats », confirme Patrice Auguste, responsable des relations avec les producteurs au sein de l'Association générale des producteurs de blé français (AGPB). Le risque de pénurie en blé est aussi écarté, selon les experts, car les stocks sont très importants cette année, dans les grands pays producteurs, comme les Etats-Unis ou les pays de l'Union européenne. « Les pays importateurs ont aussi pris les devants, en faisant des stocks, pour éviter de nouvelles crises alimentaires comme en 2007-2008», précise Abdolreza Abbassian, économiste à la FAO, l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. Ce dernier se veut rassurant quant à la répétition de nouvelles émeutes de la faim. «Il n'y a que le blé qui est concerné cette fois, pas les autres produits agricoles, et les stocks sont très importants cette saison (…). On est donc bien loin de ce qu'il s'est passé en 2007-2008», assure l'économiste de la FAO. Spéculation Certains experts tempèrent toutefois cet optimisme. La difficulté pour les pays importateurs ne sera pas de se fournir en blé mais de le payer à un prix raisonnable. «Au lieu de négocier la marchandise, comme il y a quelques mois autour des 200 dollars la tonne, cela se négocie plutôt autour des 300 dollars la tonne», explique Gautier Le Molgat, consultant chez Agritel, société de conseil en gestion des risques agricoles. Il y a bien sûr la baisse de l'offre en blé qui fait grimper les prix mais pas seulement. La spéculation a été un facteur aggravant. «Certains opérateurs spéculent sur les produits agricoles, surtout aux Etats-Unis. Il y a aussi des gens qui couvrent des options. Pour se protéger contre la hausse, ils sont obligés d'acheter, c'est un mécanisme d'assurance, et cela amplifie la hausse», reconnaît le directeur général d'ODA Benoît Labouille.