Après vingt jours de prodigalité dictée par les exigences de la table trop bien garnie du F'tour, voilà que les dix derniers jours arrivent, annonciateurs d'une facture encore plus salée lorsqu'elle n'est pas -Aïd oblige- trop ‘sucrée'. Outre les ingrédients indispensables à la préparation des mets typiques du Ramadhan, les pères de familles auront cette fois à gérer, en effet, les provisions coûteuses pour la confection des friandises de l'Aïd, avant de se tourner sans tarder vers les onéreux nécessaires de la rentrée scolaire. C'est que le calendrier a voulu cette année que la fête de l'Aïd coïncide avec la rentrée scolaire et sociale. Et que la course aux achats commence ! Une virée à travers les rues d'Alger permet de constater l'engouement impressionnant des citoyens pour l'achat de tout ce qui se vend, là où il se vend, et même ce qui ne devrait pas se vendre, au grand bonheur des vraiset faux commerçants. La boisson appelée communément ‘Cherbet', un mélange douteux vendu dans des sachets en plastique ordinaire et exposé dans la rue sous le soleil du mois d'août, tout comme la galette (El Metlou'a) étalée à même les trottoirs, continuent d'enregistrer d'étonnants succès auprès de jeûneurs sous influence. «C'est ma famille qui me prépare les galettes pour les vendre. Je commence l'après-midi et à 18h, le stock est déjà épuisé», dira Mohamed, tout juste 13 ans, en remettant de l'ordre dans sa marchandise exposée par terre, à peine enveloppée dans un bout de tissu. La conversion de beaucoup de commerces dans la vente des ‘Metlou'a', ‘Kalb louz', tartelettes aux fruits, boissons et autres aliments, souvent sans respect des normes minimales d'hygiène et de qualité, est devenue la règle pendant le Ramadhan, malgré les efforts des pouvoirs publics pour juguler ce phénomène et les nombreux cas d'intoxication alimentaires signalées. ‘Ramadhan, mois de piété et de modération en tout, est devenu synonyme de boulimie et donc d'excès dans la dépense. Tout se fait dans l'excès : on achète, parfois, juste pour faire comme les autres et des revendeurs en tous genres en profitent pour se remplir les poches', dira, amer, un septuagénaire, après avoir péniblement accompli de petites courses au marché du coin. Difficile de satisfaire plusieurs besoins à la fois Rencontrée dans un magasin spécialisé dans la vente d'affaires pour enfants, Nacera, mère de deux filles, croit avoir trouvé, pour sa part, le bon moyen de se convaincre et de se consoler : «Heureusement, dit-elle, que la rentrée scolaire coïncide cette fois avec les fêtes de l'Aïd, nous n'aurons ainsi à acheter qu'une seule tenue par enfant, pour les deux occasions !».