Pour rappel, une campagne médiatique sans précédent avait été menée durant son hospitalisation dans les milieux artistiques à travers la radio locale, la presse écrite, le réseau social Facebook, Youtube et autres, afin de sensibiliser l'opinion publique et les autorités locales sur l'extrême précarité dont vivait sa petite famille. Une véritable campagne de solidarité s'en est suivie à travers le pays mais pas seulement, puisque en France, et à Paris plus précisément, des amis et artistes à l'image de Djamel Allam, Jallal de Jil El Ghiwane, Atri N'assouf, Samira Brahmia, Akli D., Karim El Ghafla, Cheb Yazid… n'ont pas hésité un instant de donner le meilleur exemple en répondant à l'appel lancé par l'artiste Samira Brahmia en montant un gala de très haute facture, jeudi dernier, au sous-sol du bar-restaurant Le Frunch K-wa situé dans le 20e arrondissement de Paris. Il convient de signaler que ce concert avait été prévu avant même la disparition de feu Djillali pour venir en aide à sa femme et ses quatre enfants. Chaque artiste a pris place pour partager le plateau et évoquer le défunt de son vivant. Jallal du groupe Jil El Ghiwane avait appelé l'assistance à une minute de silence suivi de la récitation de la sourate El Fatiha dans un décor émouvant. Djamel Allam et cheb Yazid sont venus avec des CD issus de leur dernier album pour les vendre avec dédicaces… Il faut dire que la salle ne pouvait pas contenir tout ce beau monde venu rendre hommage à l'un des grands de la chanson raï, le vrai s'il vous plaît ! En effet, et en deux heures seulement et demie de concert, soit de 16h à 18h30, l'infatigable animatrice Ourida arrive pour annoncer la bonne nouvelle : «On a récolté, tenez-vous bien à l'heure où je vous parle, 2 450 euros !» et ce, sous les youyous et les applaudissements de l'assistance, avant de laisser le micro à Djamel Allam qui avait, entre autres, repris sa chanson El Hachemi de son dernier album en hommage à feu Guerouabi, pour le remplacer par Djillali à l'occasion. Nous apprenons par la suite en faisant les comptes par le biais des organisateurs que ce chiffre avait été largement dépassé et que Samira Brahmia en personne allait l'envoyer à l'épouse de Dillali samedi (hier, NDLR). En somme, ce fut un concert à la mesure de Djillali Ammarna, et tous les artistes et amis présents se sont donnés à fond pour cette grande réussite. On apprend, également, qu'il y aura un autre concert toujours en hommage au défunt mais dans une grande salle et avec plus de chanteuses et chanteurs, et on parle d'ores et déjà du Cabaret Sauvage mais la date n'a pas encore été encore retenue. Impressions Djamel Allam (artiste) : «Moi, je dirais que c'est une obligation d'être là, quand on est disponible bien sûr, et il y a plein d'artistes qui ne sont pas là aujourd'hui parce qu'ils ont autre chose à faire de plus urgent, peut-être. Ils ne sont pas disponibles, mais déjà ceux qui sont venus c'est déjà pas mal ; ce qui est dommage c'est qu'on aurait organisé ça de son vivant il y'a plus d'une quinzaine de jours… Djillali, j'ai eu la chance de le connaître durant le festival de la jeunesse à Riadh El Feth à Alger, et j'avais vu sur scène cette espèce Mike Jagger, cette espèce d'énergie qu'il donnait aux gens et je me rappellerai toujours cette image de lui. Il est parti tôt et peut-être aussi qu'on l'a abandonné quelque part. De toutes façons, les artistes en Algérie, c'est vraiment aléatoire et ces artistes se cachent pour mourir parce qu'ils ont leur dignité (Andhoum Ennif). Ce qui me désole le plus c'est qu'il laisse derrière lui une famille nombreuse et sans ressources… Je n'ai pas envie de mourir comme ça moi. Bon, voilà, je suis là parce que le devoir m'a appelé et puis quand tu vois tous ces jeunes présents aujourd'hui peut-être, il ne l'ont pas connu, et ils sont là parce que c'est leur algérianité qui parle. C'est leur envie de donner, l'envie de partager aussi bien dans la joie que dans la peine. C'est vraiment quelque chose qui me bouleverse, parce que plus le temps passe plus les gens partent ou on les voit partir. On a tous notre tour comme tout le monde… Attention !, ce qu'on a fait aujourd'hui ce n'est pas de l'aumône, c'est notre devoir, et il faut qu'on soit des lumières, des flambeaux, des guetteurs comme disait Rachid Mimouni pour le bonheur de notre peuple sans aucune cupidité. Qu'on nous laisse vivre et qu'on donne un statut quand même aux artistes…» Samira Brahmia (artiste et organisatrice de l'évènement) : «Vous savez ,il s'agit d'une action spontanée. Je ne le connais pas personnellement, je l'ai connu à travers la télé et c'est Mimoune El Gaâda de radio Annaba qui m'a envoyé un message sur Face book montrant le SOS lancé par sa femme et ses enfants… Djillali était un grand artiste qui dégageait une énergie incroyable sur scène. J'ai trouvé inadmissible d'avoir quatre gosses en Algérie et mourir comme ça pratiquement dans l'anonymat alors qu'il s'agissait d'un mec qui a tout fait pour faire connaître la culture algérienne dans le monde. Cette situation m'a vraiment bouleversée et je me suis dis peut-être que moi aussi je vais un jour me retrouver dans cette situation-là… Je pense que le début de cette action-là c'est aussi une recherche sage et réfléchie. Quant au statut de l'artiste en Algérie, comment on peut aider, comment on peut avancer… C'est à nous aussi de bouger, de faire ce qu'il faut pour que cela marche et pour qu'on fasse évoluer la situation des artistes en Algérie… Djillali n'est pas le seul à mourir dans l'anonymat le plus total et dans la misère… On mène une action pacifiste, on voudrait comprendre quelles sont les lois préconisées par le gouvernement vis-à-vis de l'artiste, et comment on peut œuvrer pour faire avancer les choses et pour faire respecter ses lois. Il y aura d'autres évènements dans ce sens et j'invite tous les artistes de tous arts confondus à participer à cette réflexion et à se serrer les coudes afin qu'il y ait un réel respect de l'artiste et de ses œuvres…»