La liberté de la presse aura-t-elle encore plus de coudées franches durant le 3e quinquennat du président Bouteflika ? La réponse à cette question peut paraître en elle-même saugrenue, tellement les deux parties n'ont pas raté la moindre occasion pour se tirer à boulets rouges. Certes, il y a eu de l'excès, beaucoup d'excès. Est-ce les temps de nouveaux amours entre un Président qui veut maintenir le cap des réformes (même des mentalités ?) et une presse dont au moins une partie a toujours montré, parfois gauchement, au chef de l'Etat qu'elle ne le suivait pas dans ses choix ? Lors de la cérémonie de prestation de serment, M. Bouteflika a clairement signifié qu'il veut associer la presse dans son programme de lutte notamment contre la corruption et les fléaux sociaux, particulièrement «le favoritisme et les passe-droits». Le «bénamisme» version intello, quoi ! Pour lui, la presse a un rôle à jouer dans la lutte contre ces phénomènes qui gangrènent autant la société algérienne que l'administration dans toute sa splendeur. En fait, c'est peut-être l'une des rares fois que le président Bouteflika appelle la presse à faire front commun (avec l'administration et les services de sécurité) contre les fléaux sociaux. Est-ce une nouvelle stratégie d'ouverture plus grande vers les médias que compte mettre en place le Président élu le 9 avril dernier pour un troisième quinquennat ? Il est fort probable, par contre, qu'il compte ouvrir, sinon libérer encore plus le champ médiatique, et surtout donner à la presse sa véritable noblesse, celle d'être libre de toute dépendance, quelle qu'en soit la nature. Sans qu'il y ait un violent retour de bâton pour les égarés ? Le fera-t-il ? Ne le fera-t-il pas ? Il y a sûrement, dans ce jeu à double tranchant, une prise de conscience que, en définitive, rien de concret ne pourra se faire dans ce pays sans une presse libre mais responsable de ses actes. «La liberté de la presse sera pleinement respectée, l'Etat restant déterminé à agir pour faciliter davantage encore l'exercice et le développement de la profession», a-t-il dit lors de la cérémonie d'investiture. Le président Bouteflika sait que sans une presse libre, il n'y aura aucune garantie, ni crédibilité de ses réformes, ni reflet positif des capitales étrangères sur la bonne gouvernance dans un pays en lutte contre ses vieux démons, dont «la hogra et le népotisme» ne sont pas les moindres maux. Le nihilisme et la vantardise politiques en Algérie ayant fait assez de mal jusqu'ici, il est grand temps d'ouvrir grandes les portes de la liberté de la presse et d'opinion. Une promesse faite à un moment crucial pour le président Bouteflika, sa prestation de serment, mais à quelques encablures de la célébration de la Journée nationale de la liberté de la presse. Tiendra-t-il parole pour qu'il n'y ait plus de journalistes devant les tribunaux ?