«C'est beau mais sale», voilà l'humiliant verdict que les étrangers de passage dans la ville d'Oran prononcent avec un air de désolation apitoyée quand il leur est demandé leur opinion sur l'état des lieux de la cité dans laquelle ils ont séjourné. Et ce qu'ils disent n'est pas faux. La deuxième ville d'Algérie offre en effet le lamentable spectacle d'une agglomération où la saleté triomphe le long de ses boulevards et avenues, s'est installée en toute normalité dans tous les coins et recoins sous l'œil indifférent des autorités locales mais de celui aussi de ses habitants. Elle est pourtant belle la capitale oranaise, ce qui rend encore plus affreux le crime collectif qui la dévalorise au regard de ses visiteurs. La belle affaire de décréter qu'»El Bahia» attire les touristes, qu'elle a vocation à être un pôle de rencontres internationales alors qu'elle est devenue hideuse par la lèpre du délabrement qui ronge ses immeubles et habitations et la puanteur qui envahit ses quartiers, provoquée par le non-respect des normes d'hygiène les plus basiques. La responsabilité de la détérioration du cadre de vie dans la capitale oranaise est, il faut le préciser, imputable tout autant aux responsables de sa gestion qu'à l'ensemble de ses habitants. Les premiers parce qu'ils sont sans envergure et occupés à d'autres «urgences» que celle de veiller à la propreté de la cité et à l'entretien de son patrimoine immobilier. Les seconds parce qu'ils sont indifférents à son aspect repoussant dont ils s'accommodent du moment qu'il s'arrête au seuil de leurs domiciles. D'aucuns parmi ses responsables et ses habitants feront grief à la présente réflexion d'être inspirée par la malveillance et le penchant malsain à noircir les faits et les situations. Nous laisserons à nos lecteurs et à l'opinion publique le soin d'en juger en persistant à affirmer que la ville d'Oran est éligible au rebutant trophée de la cité la plus malpropre d'Algérie. Et que l'on ne nous prétexte pas que si elle en est là, c'est qu'elle est victime d'un complot que tissent avec acharnement contre elle tous les pouvoirs et leurs exécutants passés et présents. La vérité est plus simple, prosaïque. C'est la démission et l'incivisme collectifs qui en sont à l'origine. Il n'y a qu'à voir l'état de certaines nouvelles cités de logements qui aussitôt habitées sont devenues de repoussants ensembles aux façades déjà lépreuses comme si l'ont avait affaire à des habitats dégradés par le temps et atteints par la vétusté. Sonatrach et d'autres opérateurs économiques ont fait le pari de redonner à El Bahia son lustre d'antan en investissant dans des projets touristiques et autres valorisants. Cela devient pour eux un pari aléatoire si l'environnement urbain de leurs réalisations reste ce qu'il est, à savoir répulsif.