Karim Tabou, le jeune premier secrétaire du FFS, est coutumier du tir à boulets rouges contre le régime et ses hommes. Vendredi, lors de son intervention devant les membres du conseil national de son parti, il n'a pas failli à son habitude en dressant un tableau sombre de la situation qui prévaut dans le pays. Une situation qui, selon lui, est difficile alors que l'Algérie a bénéficié de l'aisance financière et qui va aller en s'aggravant dans les prochains mois du fait que la manne financière du pétrole chute dramatiquement. Ce constat a fait déclarer au premier secrétaire du FFS que «la situation est trop préoccupante pour laisser le pouvoir faire ce qu'il veut» et conduit à interpeller le peuple algérien pour l'inciter «à ne pas rester dans l'expectative et la léthargie». Comme piste à ce qui pourrait aider à cet éveil populaire, le premier secrétaire du FFS a évoqué celle d'un rapprochement des forces démocratiques. Mais à ce rapprochement, Karim Tabou pose deux préalables. Primo, «que le bilan des convergences et des divergences politiques entre les différents acteurs politiques et sociaux doit être dressé pour permettre une clarification des enjeux et des stratégies». Secundo, que «l'alliance entre les forces démocratiques doit être basée sur le principe de l'éthique politique. Donc sur la base d'un contrat de principe». Ce dont le FFS ne veut pas, a précisé son premier secrétaire, c'est «l'addition des sigles» et des ouvertures «bâties sur le mensonge, l'intérêt personnel et la tentation du leadership». A entendre Tabou, le parti d'Aït Ahmed n'est pas opposé au regroupement des forces démocratiques, comme l'en accusent certaines de celles-ci, qui ont tenté sans succès de trouver un terrain d'entente avec lui pour mettre en oeuvre cette stratégie d'opposition au pouvoir. A l'évidence, le FFS continuera à faire «cavalier seul» au sein de l'opposition, car il ne semble pas, du point de vue de son premier responsable, que celle-ci soit peuplée «d'organisations et de personnalités autonomes». Concernant celles auxquelles il accorde ce label, son rapprochement s'est déjà opéré avec elles et a donné lieu à quelques initiatives politiques, dont celle ayant regroupé Abdelhamid Mehri et Mouloud Hamrouche au côté d'Aït Ahmed est toujours en mémoire. Comme à son habitude encore, le premier secrétaire du FFS s'en est pris frontalement à Bouteflika qu'il a accusé d'avoir engagé l'Algérie dans un processus politique «qui la rapproche graduellement des systèmes autoritaires en place chez nos voisins», et cela en faisant valoir que depuis «l'élection de Bouteflika, le pays vit une période de régression politique». Et de considérer que la crise économique étant en train de rattraper notre pays, le régime se fige et se transforme en citadelle et n'hésite pas dans les atteintes au pluralisme et aux libertés. La question reste posée tout de même de savoir si le FFS, si pertinent et lucide dans la procès qu'il fait au régime, l'est dans la recherche d'une stratégie d'opposition à celui-ci, qui rassemblerait le plus largement possible sur une plate-forme qui ne soit pas forcément la copie conforme de son programme et de ses objectifs étroitement partisans. La réponse à ce qu'a esquissé Karim Tabou nous semble être encore une fois «un oui mais» dans lequel excelle son parti.