Une circulaire de la Banque d'Algérie, datée de février 2009, obligeait déjà les entreprises à soumettre leurs importations au contrôle par des sociétés étrangères avant même la promulgation de la loi de finances complémentaire pour 2009. « Nous y avons été soumis depuis le début de l'année. Les équipements que nous avons importés en mars dernier ont été contrôlés par une société étrangère au niveau du port de leur embarquement », nous disait hier le directeur d'un important établissement public. Pour assurer son application, la Banque d'Algérie avait pris le soin d'en faire dépendre l'ouverture d'un crédit documentaire aux entreprises importatrices. En effet, l'on précise que les entreprises publiques ne pouvaient depuis le début de l'année en cours prétendre à l'ouverture d'un crédit documentaire (credoc) que si elles présentaient une attestation dûment signée par une de ces sociétés étrangères d'inspection avant expédition des marchandises importées. « La banque où est domicilié l'établissement que je dirige n'a pas voulu procéder à l'ouverture d'un credoc et m'avait exigé pour le faire, l'attestation de la société qui était chargée de contrôler les équipements importés au niveau du port de leur embarquement », expliquait encore notre interlocuteur. L'obligation de passer par ces sociétés a été ainsi notifiée aux sociétés d'importation avant qu'elle ne soit retranscrite dans la loi de finances complémentaire pour 2009. C'est la direction générale des changes de la Banque d'Algérie qui l'avait fait par une circulaire datée du 6 février 2009 qu'elle avait adressée aux banques et établissements financiers intermédiaires agréés avec, pour objet, : « Du contrôle des importations de biens réglées par crédit documentaire ou par remise documentaire ». On y lit « il est souligné que pour tout règlement d'une importation de biens par remise documentaire ou par crédit documentaire (...), il y a lieu d'exiger parmi les documents constitutifs du dossier, le certificat phytosanitaire pour tout produit agroalimentaire, le certificat de contrôle de qualité de la marchandise, le certificat d'origine de l'importation. Ces documents, dorénavant obligatoires, doivent être établis par des organismes dûment habilités du pays exportateur, lesquels sont nécessairement différents du fournisseur ». En réglementant une opération de commerce extérieur, la Banque d'Algérie s'était substituée au ministère du Commerce et aux services des Douanes en piétinant leurs prérogatives légales. C'est, comme diraient nos sources, une sorte de test que les décideurs ont voulu mener auprès des opérateurs publics pour en voir le résultat et déduire les conséquences d'une intervention étrangère dans le contrôle des importations pour le compte des Douanes nationales. Il semble qu'ils ont été convaincus de l'efficience du procédé puisqu'ils en ont fait une loi. Il faudrait signaler, cependant, que la disposition de la LFC n'a fait que reprendre un autre, l'article 92 bis, celui-ci contenu dans le code des douanes de 1979. L'article 46 de la LFC pour 2009 précise en effet, qu'« il est créé dans la loi 79-07 du 21 juillet 1979, modifiée et complétée, portant code des douanes, un article 92 bis rédigé comme suit « avant leur expédition sur le territoire douanier, les marchandises peuvent faire l'objet d'un contrôle pour le compte de l'administration des Douanes par des sociétés agréées ». Interrogé sur les raisons qui avaient motivé à l'époque l'inscription de cet article dans le code des douanes, un haut cadre du secteur estime que « le recours aux sociétés étrangères de contrôle existe, en effet, dans le code comme possibilité de faire appel à d'autres moyens de contrôle mais n'appelle pas à sa mise en oeuvre. Or, la loi de finances complémentaire est venue dicter la mise en oeuvre de l'article 92 bis », nous explique-t-il. Notre interlocuteur a pris le soin de noter qu'à l'époque « en 1979, le législateur algérien était tenu de prendre en compte les possibilités de contrôle des importations parce que les services des Douanes n'avaient ni moyens humains ni matériels pour pouvoir l'exercer convenablement. C'est pour cela qu'il l'avait inscrite dans le code des douanes de l'indépendance». Mais aujourd'hui, fait-il remarquer, «il n'est nullement nécessaire d'y recourir parce que les Douanes algériennes ont mis en oeuvre une politique de modernisation et de développement de l'ensemble de leurs services et de leurs infrastructures. Au lieu de passer outre et décider d'autre chose, il faut d'abord en faire le bilan». Et, si pour des considérations d'efficacité, les pouvoirs publics veulent, explique notre source, «diversifier les moyens de contrôle du commerce extérieur, allons alors à la carte ! Dans tous les codes universels, on a la possibilité de se référer à un avis extérieur ponctuel sur des opérations de commerce extérieur, mais la flexibilité dans les choix est permise ». L'on tient à rappeler que Hidouci ou Benbitour n'ont pas été les seuls à proposer l'intervention de sociétés étrangères dans des opérations de commerce extérieur. «Mourad Medelci durant les années 2000, quand il était au ministère du Commerce et après au ministère des Finances, n'a pas cessé de les revendiquer. Il avait beaucoup insisté sur ça », affirment nos sources. « On ne comprend pas pourquoi nos responsables acceptent toujours que notre pays demeure l'éternel laboratoire », interroge-t-on avec la remarque qu'« aucun de nos pays voisins n'accepte de l'être ».