L'entreprise Eepad passait, il y a encore quelques mois, comme un modèle de réussite. On y avait en effet tout ce qui plaît : une entreprise qui a l'air de bien marcher et qui plus est se trouve sur le segment prometteur des TIC. Ceux qui se félicitaient de cette réussite algérienne, dont des milliers d'abonnés frustrés, savent désormais qu'il y a une bonne part de fiction dans la «success story». Bien entendu, on peut sans hésiter inclure dans les difficultés actuelles de l'Eepad et de beaucoup d'autres fournisseurs internet privés la décision, très démagogique, d'un ancien ministre des TIC de faire baisser les prix de 50%. L'opérateur public, Algérie Télécom, a été le premier à payer les contrecoups de ces fausses largesses. Mais cette décision «historique» n'explique pas tout des difficultés de l'Eepad. C'est tout le modèle de la relation entre Algérie Télécom et les fournisseurs d'accès à internet qui est en cause. Cela n'enlève rien à la responsabilité de l'Eepad qui a laissé imprudemment s'accumuler les dettes et qui subit aujourd'hui les conséquences d'une politique déterminée d'Algérie Télécom de recouvrer ses créances à tout prix. Il y a eu dans la communication d'Eepad des excès marketing qui aggravent aujourd'hui la déception et le sentiment d'avoir été dupés. Ces dérapages publicitaires ont laissé accroire pendant des mois que le nombre des abonnés avoisinait les 90.000. Il a fallu la crise de juin, avec rupture d'accès au web, pour disposer du chiffre précis de 35.000 abonnés. C'est bien entendu appréciable mais - heureusement - cela n'a rien à voir avec les 90.000 abonnés claironnés. Aujourd'hui, ces 35.000 clients se retrouvent en rade, sans accès à internet. Et surtout sans autre recours possible que celui d'attendre une solution qui paraît pour le moment très incertaine. Car si Algérie Télécom a de nouveau coupé l'internet à Eepad, c'est parce que cette dernière s'est avérée incapable de respecter l'échéancier de paiement de sa dette. On peut douter désormais de sa capacité réelle à le faire. Il n'y a donc pas de solution en vue. Dans ce conflit «purement commercial» entre Eepad et Algérie Télécom, les victimes sont les 35.000 abonnés qui ont payé un service dont ils ne bénéficient plus. Et ces abonnés n'ont aucun recours ni interlocuteur. Il y a si peu de solutions que le «15.99», le numéro d'Eepad censé informer la clientèle et recueillir les réclamations, a été mis hors service. Officiellement, les responsables d'Algérie Télécom déclarent avoir eu le souci de ne pas «pénaliser» les abonnés d'Eepad et que c'est la raison pour laquelle ils ont accepté l'échéancier. Aujourd'hui, ces abonnés sont directement sanctionnés et n'ont aucune idée de la manière dont le conflit va être résolu. Il est urgent de leur fournir une réponse. Le fait que les consommateurs algériens soient en général démunis de moyens de recours ne peut justifier qu'on les laisse dans l'expectative et une attente sans fin.