«Malgré une légère baisse sur le marché parallèle, l'euro garde toute sa bonne santé.» C'est avec cette sentence que nous accueille un cambiste de la place du 1er Novembre, situé au carrefour de la Banque centrale, la Banque nationale d'Algérie, et la grande poste, dans la ville de Constantine. Une liasse de billets de 1.000 dinars entre les mains, le cambiste nous donnera le cours du jour, les 100 euros échangés contre 12.200 dinars, non sans préciser que l'euro a perdu ces derniers jours quelque 100 dinars au change. Une baisse jugée «insignifiante» par notre interlocuteur, qui insiste sur la force de la monnaie européenne. Mais tout est relatif dans les méandres de cette Bourse informelle, car si les effets de la baisse de 100 dinars enregistrée ces derniers jours ne sont pas ressentis par les petits cambistes, car il s'agit au fait d'une perte de 1 dinar dans toute opération de change de 1 euro par rapport à sa valeur il y a moins d'un mois sur le change parallèle, par contre ceux qui manipulent de grosses sommes d'euros subissent d'importants dégâts à cause de cette fluctuation, aussi légère soit-elle. Citons à l'exemple le cas de celui qui manipule une somme d'un million d'euros, et qui se retrouverait ainsi avec une perte sèche de cent millions de centimes. Il n'y a pas à redire, le marché du change parallèle de l'euro, qui obéit à la règle classique de l'offre et la demande, «subit les caprices de ceux qui le maîtrise parfaitement, les gros bonnets de la devise en l'occurrence, qui en un clin d'oeil peuvent inonder le marché de monnaie étrangère, tout comme ils peuvent le tenir à sec en faisant mains basse sur toute la monnaie en circulation, et imposer ensuite le diktat des prix de change», nous confiera un ancien cambiste. Pour des cadres banquiers, le phénomène, qui porte une grave atteinte à l'économie nationale, trouve un immense vide, fait d'indifférence et d'absence de lutte sérieuse contre cette pratique illicite, pour s'imposer dans le décor des finances, à l'image de bureaux de change légalement institués sous d'autres cieux. «Mais la légalité n'est pas source de gros revenus, et elle n'arrangerait pas les affaires de nos cambistes informels, qui affectionnent de fixer eux-mêmes les tarifs de change de la devise», affirme avec ironie un cadre de la BADR. «En tout état de cause, le change parallèle de l'euro devrait connaître une baisse plus sensible dans les prochains jours, après la rentrée scolaire, période de légère stagnation dans les affaires de l'import-import», estimera un cambiste. La prudence est de règle sur le marché noir du change de la devise.